Michelin et sa philosophie de compétition



Si Audi a gagné aux 24h du Mans, ils le doivent à leur R18, à leurs pilotes mais également à un prestataire de haut niveau qui est le fournisseur de pneus, en l’occurrence Michelin. Mais à chaud, les mérites de la victoire ne peuvent pas être partagés et ce d’autant plus que Peugeot courait également en Michelin. Mais jugez plutôt :

L’Audi victorieuse, alors aux mains de Benoît Treluyer, a réussi la performance d’aligner un quintuple relais sans changer de gommes, soit 750 km, sans perdre en performance. Michelin répète d’ailleurs à l’envie que la pole signée par le même Treluyer a été réalisé avec des pneus ayant déjà effectué plus de 300 km, soit la distance d’un Grand Prix de F1. Vous imaginez après ça pourquoi Michelin n’est plus en F1 et ce que pensent les responsables du choix de Pirelli cette année. Michelin avait fait acte de candidature mais demandait d’une part la concurrence et ne voyait pas l’introduction artificielle d'une forme de spectacle par le biais des pneumatiques de la même façon que son concurrent italien.


L’Audi victorieuse a réussi la performance d’aligner un quintuple relais sans changer de gommes, soit 750 km sans perdre en performance. Pourquoi aller en F1 ?

Les responsables de Michelin avaient proposé de diviser la saison en 3 parties et d’offrir un nombre déterminé de pneus aux équipes durant ces 4 ou 5 Grand Prix, libre à elles de gérer leur nombre de pneumatiques dans cet intervalle. On le sait, ça n’a pas convaincu les patrons de la F1.

Même si Michelin s’interroge sur la perception du grand public en F1 (comment jugent-ils la performance des pneus Pirelli ou la jugent-ils tout simplement ?), ils ne cachent pas être heureux d’être en Endurance et en Rallye afin d’exprimer un savoir-faire directement transposable à la série résumé en quelques mots : performances, sécurité, longévité. Car oui, le client de supersportive est comme vous et moi, il ne veut pas que de la perf sur sol sec, il veut aussi un pneu qui dure et qui soit sûr par tous les temps. Le pneu étant une affaire de compromis, juger une gomme impose de la tester dans plusieurs domaines et d’établir une moyenne de tous les relevés pour dessiner une hiérarchie représentative.


Des tests comparatifs réalisés par le TÜV et Dekra


Pour nous faire prendre conscience de leur expertise dans le domaine et du transfert de technologie de la piste à la route, nous avons eu droit à quelques sessions en piste mais ce n’est pas en 2 tours que l’on juge réellement de la tenue d’un pneu. Certes, entre un slick et un pneu route, on sent très bien l’écart de performance, entre un Pilot Sport Cup+ homologué route mais étudié pour les sorties circuit et les Pilot Super Sport et Pilot Sport 3 plus « sages », on perçoit bien la différence de grip mais entre 2 tailles de pneus (18 et 19 pouces), difficile de juger quoi que ce soit alors qu’il faut découvrir et apprendre le tracé du circuit et la voiture (Audi TTRS, Porsche 911, Audi R8) en seulement 2 tours.


20.000 ch pour célébrer les succès de Michelin. Ou quand la course profite aussi aux clients

Bref, nous avons du coup été nettement plus impressionnés par les résultats des tests organisés non pas par Michelin, ce serait trop facile, mais par les organismes indépendants que sont le TÜV et Dekra, présents sur l’évènement. Les tests opposent 6 pneus concurrents mais les résultats n’indiquent que la place de l’enveloppe française tandis que les autres sont rendues anonymes et désignées par une lettre. Je vous laisse tenter de découvrir à quel pneu se rapporte chaque lettre. On constate que les gommes Michelin, si elles ne sont pas à chaque fois en tête du test (jamais très loin), représentent à tous les coups le meilleur compromis tous temps sanctionnés par une première place finale lors de ces tests de freinage sur route mouillée, route sèche, de tenue de route ou de longévité. Le seul exercice physique auquel nous avons pu participer visait à mettre en évidence la supériorité des gommes hautes performances Michelin face à la concurrence lors d'un freinage sur route mouillée. Pirelli P Zéro et Goodyear Eagle F1 ont servi de sparring-pas trop-partner et ont joliment démontré à leur corps défendant qu’une BMW M3 lancée à 90 km/h sur un bitume trempé stoppe 2 m plus court en Michelin. Là, c’est clair même si c’est un résultat parcellaire qui ne met en évidence qu'une facette des qualités d'un pneu. Pour voir le reste des résultats, voici les tableaux qui ne sont pas l’œuvre de Michelin et qui sont assez parlants.

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Sur BMW 320D face aux Bridgestone Potenza S001, Continental ContiSportContact 5P, Dunlop SP Sport Maxx GT, Goodyear Eagle F1 Asymetric et Pirelli P Zero

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Idem mais sur Audi A4 (traction)

Michelin, force de proposition


Lorsque nous abordons la partie « tuning », nous découvrons une facette étonnante du travail du manufacturier qui passe une grande partie de son temps à essayer de convaincre les constructeurs de tester ses pneumatiques. Si l’on excepte les partenariats à long terme comme celui signé avec Porsche, Michelin démarche et tente de placer ses gommes avec tout le monde. C’est notamment ce qui c’est passé avec Gumpert dont l’Apollo a récemment battu le record du tour de la Nordschleife pour une voiture de production en explosant son précédent chrono de 11s. Tout cela en chaussant seulement des Michelin Sport Cup ! Grâce à cela, la Gumpert signe un 7’11 qui la place devant la Donkervoort D8 RS mais un coup d’œil au tableau montre que bon nombre des autos en tête de la feuille des temps de la Nordschleife roulent aussi avec les gommes de Clermont-Ferrand.

Même topo pour ce qui est des records de vitesse avec un constat que l’on ne remarque pas au premier abord. En compétition, les vitesses maximales aux 24h du Mans sont de l’ordre de 330 km/h quand une supersportive actuelle dépasse allègrement les 350 km/h, lorsqu’elle ne dépasse pas les 400 km/h comme la Bugatti Veyron, évidemment équipée en Michelin ! Une petite rétrospective des records de vitesse enregistrés depuis 13 ans montrent là aussi un certain savoir-faire.


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Bref, sans faire ombrage à ses partenaires en compétition, Michelin souhaitait montrer ce que n’aiment pas admettre les ingénieurs des équipes de course : à savoir que le pneumatique représente une part prépondérante de la performance que ce soit en compétition ou sur la route. En F1, obtenir mécaniquement le gain de performance offert par un bon pneu est quasiment impossible dans un laps de temps réduit, c’est ce qui explique là aussi pourquoi les équipes de F1 sont favorables à la règle du manufacturier unique (pour éviter que l'on attribue « leurs » victoires aux mérites de leurs pneus !) et pourquoi Michelin préfère aujourd'hui être en Endurance et en WRC. Une question vient alors à l'esprit :

À quand un championnat organisé par les manufacturiers disputé sur les mêmes autos mais équipées en pneus de marques différentes ?