Traversant la piste en marchant d'un pas tranquille pour protester contre le départ "type Le Mans", Jacky Ickx s'élance bon dernier. 24 heures plus tard, il se révèle le meilleur sprinter au volant de sa Ford GT 40 et bat d'un souffle la Porsche 908 de Hans Herrmann au terme d'un final haletant.

Victorieux à Brands Hatch, Monza, à la Targa Florio, Spa et au Nürburgring, Porsche vient d'enlever sa première couronne mondiale en endurance. Face à des Ford GT 40 vieillissantes, des Mirage trop tendres et des Ferrari 312 P aussi superbes qu'imprévisibles, les voitures allemandes ont véritablement écrasé la saison européenne. Si les Porsche 908 déclinées en versions coupé ou spider se sont montrées intraitables dans les courses de 1000 km, elles ont encore une fois montré leurs limites dans les épreuves de longue durée, essuyant deux revers significatifs à Daytona et à Sebring. Profitant des aménagements du règlement qui a ramené de 50 à 25 le nombre d'exemplaires requis pour l'homologation d'un modèle en catégorie Sport (5 litres), Porsche compte bien sur sa nouvelle 917 pour réduire ce handicap dans les courses de 12 ou 24 heures et tenter d'accrocher enfin un premier succès au Mans. Toutefois si la 917 a bien explosé tous les records lors de sa première sortie au essais d'avril, sa tenue de route est si délicate que les pilotes de l'équipe officielle ne se bousculent pas pour en prendre le volant.

La qualité à défaut de la quantité

Dans ce contexte, Porsche a décidé de panacher son matériel en alignant deux 917 et quatre modèles 908, dont un nouveau spider à carrosserie profilée. Confiées à Stommelen - Ahrens et Elford - Attwood, les 917 pèsent 950 kg et peuvent compter sur une puissance de 560/580 ch. Mitter-Schutz, Lins - Kauhsen et Herrmann - Larrousse se partagent trois coupés 908 à carrosserie longue, tandis que Siffert - Redman ont choisi de partir sur un spider 908-2 doté d'un capot arrière long surmonté de dérives verticales. L'effectif officiel est complété par la première 917 "client" acquise par le Britannique John Woolfe qui s'est vu adjoindre le précieux Herbert Linge, le pilote d'essais de Porsche depuis l'époque des spider 550 ! Face à cette armada, les Ford GT 40 de l'équipe Gulf - Wyer dotées des nouvelles culasses "Gurney" (420 ch) peuvent tabler sur leur fiabilité et une logistique qui frise la perfection. Les chances des trois autres GT 40 engagées par des équipes plus modestes pour Kelleners - Joest, Gardner - Guthrie et Sadler - Vestey semblent bien plus aléatoires, de même que celles de l'unique Lola T 70 Mk IIIB à moteur Chevrolet 5 litres alignée par la Scuderia Filipinetti pour Bonnier - Gregory. Absent officiellement en 1968, Ferrari est de retour en catégorie Prototype avec deux 312 P (V12-3 litres-400 ch) qui ont reçu pour l'occasion une superbe carrosserie fermée. Elles sont conduites par Amon - Schetty et Rodriguez - Piper, tandis que Posey et Zeccoli doivent se contenter de la vieille 250 LM du NART (la voiture victorieuse en 1965 !). Encouragé par sa prestation de l'année précédente, Matra a décidé d'engager quatre prototypes à moteur V12-3 litres. Beltoise - Courage se partagent le volant de la nouvelle barquette 650, tandis que Servoz Gavin - Müller et Nanni Galli - Widdows pilotent d'anciennes 630/650 transformées en spider et que Guichet - Vaccarella, les vainqueurs de l'édition 1964, héritent de l'ancien coupé 630. Matériel uniforme chez Alpine Renault qui présente quatre coupés A 220 pour Depailler - Jabouille, Grandsire - Andruet, De Cortanze - Vinatier et Thérier - Nicolas. Après le forfait de l'équipe officielle Alfa Romeo dont les modèles 3 litres sont loin d'être au point, la marque italienne est représentée par les deux "33" de l'équipe VDS confiées à Pilette - Slotemaker et Gosselin - Bourgoignie. Quatre Alpine A 210 deux Porsche 910, une Chevron B8, une Healey SR, une Nomad-BRM et une minuscule Abarth 1000 complète l'effectif en sport-prototype, alors qu'en GT, la Corvette de Greder - Wisell et la Ferrari GTB de Rey-Haldi doivent faire face à sept Porsche 911.

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