Une expérience à grande échelle vient d'être lancée en Allemagne pour tenter de vérifier si le C02 émis par les industries polluantes peut être enfoui dans les profondeurs de la Terre au lieu d'être rejeté dans l'atmosphère où il contribuera au réchauffement climatique. A Ketzin, une bourgade de l'ex-RDA située à 40 km de Berlin, une équipe internationale de scientifiques a commencé à forer le sol afin d'atteindre une nappe d'eau salée souterraine à 800 m de profondeur. A partir de l'été prochain et pendant deux ans, ces scientifiques envisagent d'injecter près de 60 000 tonnes de CO2 pur amenés par camions-citernes. Günter Borm, professeur au Centre de Recherche de la Terre (GFZ) de Potsdam près de Berlin (l'institut coordonnant le projet), a déclaré : "Nous allons équiper le site de toute une série de capteurs qui nous aideront à vérifier la pérennité d'un tel stockage. Il n'y a rien de dangereux : le site choisi est très stable et le gaz que nous injectons est le même que celui utilisé pour gazéifier la limonade."

Ce projet est co-financé par l'Union europénne, l'Allemagne, la France et par des universités et entreprises européennes. Son objectif : "vérifier la faisabilité du "stockage géologique" du CO2, principal gaz responsable de l'effet de serre. C'est dans un aquifère salin profond, c'est-à-dire une nappe d'eau salée souterraine, sans contact avec les nappes phréatiques, que les chercheurs allemands (mais aussi britanniques, français, polonais et scandinaves) ont choisi d'injecter le gaz." Ce projet coûtera 35 millions d'euros. Cette technologie revient très cher, au moins 40 euros la tonne de CO2 enfouie alors que sur le marché européen du carbone, les entreprises ayant dépassé leur quota d'émission paient moins de deux euros la tonne pour compenser la pollution qu'elles engendrent.

Certains militants écologistes s'y opposent. Matthias Seiche, de la Fédération allemande pour l'environnement et la protection de la nature (BUND), a déclaré : "On ferait mieux d'affecter les énormes investissements nécessaires à ce stockage au développement des énergies renouvelables." La géologue Gabriela von Goerne de l'association Greenpeace, a pointé du doigt "une expérience qui n'empêchera pas que l'on continue à utiliser massivement les énergies fossiles".