Dans le flot des décisions prises après le Grenelle de l’Environnement, le gouvernement a décidé de lancer très rapidement le bonus/malus écologique. Cette précipitation cacherait-elle quelque chose ? Nous avons enquêté.

Y aurait-il anguille sous roche ? Cela se pourrait. Les grandes lignes sont bien sûr maintenant connues. A titre de rappel : Le gouvernement a opté pour un système purement incitatif. Le bonus (200 euros) sera versé, au moment de la première immatriculation d’une voiture émettant entre 121 et 130 g de CO2/km, c’est-à-dire environ 1/3 des ventes. La somme passera à 700 euros pour un véhicule rejetant entre 101 et 120 g et elle pourra atteindre 1 000 euros pour les véhicules émettant moins de 100 g. À cette prime s’ajoutera un « super bonus » de 300 euros pour la mise à la casse d’un véhicule vieux de plus quinze ans et ce pour l’achat d’un modèle propre.

Si tout paraît clair, l’empressement du gouvernement à appliquer le bonus/malus laisse en suspens quelques interrogations.

· Pourquoi si rapidement ?

Avant tout, même si on se doutait de la mise en place imminente de ce bonus/malus, personne ne l’attendait vraiment si tôt. Pour quelles raisons ? Avant tout, pour « faire une sorte de cadeau de Noël » aux automobilistes respectueux de l’environnement. Le gouvernement veut ainsi prouver son attachement à la lutte contre la pollution.

Cette stratégie vise également à contenter le plus grand nombre. La majorité des automobilistes sera faiblement touchée et voit le spectre du retour d’une vignette écologique disparaître.

Le ministre de l’écologie fait aussi un geste envers les associations telles que France Nature Environnement en mettant un point d’honneur à taxer les voitures les plus polluantes. Tout le monde pourrait donc être satisfait si ce n’est ces dernières qui estiment que les mesures prises sont"en retrait par rapport aux ambitions initiales"

· Un passage en force ?

Alors que le gouvernement avait surmédiatisé le fait que le Grenelle soit un modèle de dialogue et de concertation, l’application du bonus est le contre-exemple parfait. Ainsi, aucune des associations qui avait participé au Grenelle de l’environnement n’a été consultée sur le calendrier de la mise en place. France Nature Environnement ou Agir pour l’environnement ont donc appris la décision de l’Etat par les médias. Une méthode qui est dénoncée ouvertement. Michel Dubromel, porte-parole de France Nature environnement (FNE), s’est dit «surpris» de cette annonce: «Aucune concertation n’a eu lieu alors que les associations sont à l’origine de cette proposition», regrette-t-il.

Une nouvelle fois, le gouvernement souhaite donc agir vite. Au risque de soulever des contestations, on peut s’interroger également sur la différence de traitement entre les deux mesures. Le mécanisme du bonus relève d’un décret simple déposé le 5 décembre pour une application immédiate tandis que la mise en place du malus a fait l’objet d’un amendement au projet de loi de finances rectificative pour 2007, adopté récemment. Sa date d’entrée en application sera donc le 1er janvier 2008. Renseignements pris auprès de l’assemblée nationale, nous avons obtenu comme réponse que le bonus était assujetti à une subvention tandis que le malus est considéré comme un prélèvement obligatoire, donc doit se faire dans le cadre d’une loi.

· Des zones d’ombre éclaircies progressivement

Même si l’entrée en fonction peut sembler simple, il demeure toutefois de nombreuses zones d’ombre et les choses ne semblent pas totalement arrêtées, du moins pour le malus.

Ainsi, un des amendements déposé au Sénat qui a été adopté le 18 décembre dernier proposait que les véhicules commandés avant le 5 décembre, jour de l’annonce du dispositif bonus/malus, soient exonérés du malus à condition que la commande soit accompagnée du versement d’un acompte de 10%. Par extension, cela signifie que les véhicules d’occasion importés ne sont pas assujettis au malus si le certificat d’immatriculation est antérieur au 1er janvier 2008, qu’ils aient été immatriculés en France ou dans leur pays d’origine.

Mauvaise surprise en revanche pour tous ceux qui voulaient acheter des véhicules Flexfuel puisque ceux-ci seront taxés comme les autres voitures. On se demande pourquoi le gouvernement n’a pas fait un geste pour les exonérer. Les ventes peinant à décoller, cette décision risque de les handicaper encore plus.

· Des questions sur le financement ?

Au vu des tendances du marché, le malus devrait toucher environ une voiture sur quatre, selon les estimations du ministère de l’Ecologie même si le malus maximal (2600 euros), lui, ne devrait impliquer qu' 1% des ventes. Le bonus sera a priori plus massif : il concernera près d’un véhicule sur 3. Du coup, par déduction, on relève qu’un peu moins d’1 voiture sur 2 – soit 45% ne sera pas affectée par la mesure, car fluctuant dans la zone de pollution "neutre". Il y aura donc forcément un manque à gagner pour le gouvernement qui devra donc chercher ailleurs le financement.

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