Thèse

La voici la digne héritière de la 2 CV ! Une voiture qui revient enfin aux besoins fondamentaux du conducteur : aller d'un point A à un point B avec une voiture du segment C. D'accord, il ne s'agit plus de traverser un champ labouré avec un panier d'œufs sans les casser. Nous avons des besoins plus subtils, comme de brancher un smartphone en USB, choisir sa température au demi-degré près et pouvoir perdre trois points sur autoroute sans être à fond de cinq.

Citroën C4 Cactus : à pique ou face

Pourtant, même si elle est à des années-lumière de la Deuche – 66 années exactement – la Cactus en reprend un principe essentiel : simplifier au profit de l'économie et de la praticité. De fait, cette drôle d'auto marque une rupture avec le toujours plus compliqué, plus cher et plus superflu qui a enflé nos berlines d'une demi-tonne en un demi-siècle. Une familiale de 1 000 kilos, ça ne s'était pas vu depuis… la BX. Avec la Cactus, il ne s'agit plus de monter en gamme, augmenter, ajouter, mais de recentrer, alléger et supprimer. A-t-on besoin de vitres arrière qui descendent quand on a la clim ? Et de tous ces cadrans, voyants et bitoniaux à l'heure de l'écran tactile ? En s'épurant, la Cactus réconcilie design et fonctionnalité, deux mots qui avaient divorcé depuis longtemps. C'est un bel objet, un produit honnête, pas du low cost mais du "fair cost" : les prestations d'une C4 pour le prix d'une C3, une sono de qualité, un confort et une insonorisation haut de gamme quitte à se passer de quelques gadgets.

Le tout emballé dans un design piquant mais pas trop qui donne envie de rebaptiser Concombre la C4 normale et Courge la DS4. Pour Citroën qui a tant fait bouger les lignes de l'automobile dans le passé, c'est à la fois un retour aux sources et un pari pour l'avenir. Bien mieux qu'une nouvelle deuche façon New Mini, New Beetle ou Nuove Fiat 500 que certains appellent de leurs vœux.


Antithèse

La "voiture essentielle" qu'ils disent chez Citroën. Tout ça pour nous présenter l'habituelle déclinaison aux chevrons d'une nouvelle Peugeot. La Cactus, c'est la 2008 de Citroën, comme la Xsara était sa 306. Citroën ne fait d'ailleurs pas mystère de cette filiation. Du coup, la présenter comme la voiture que le peuple attendait et qu'il n'osait pas demander, c'est un peu gonflé. D'accord, elle est 1 500 euros moins chère que la 2008, mais c'est au prix de quelques sacrifices comme les vitres arrière à compas et le toit vitré non occultable (600 €) qui feront suer les passagers de celui qui aura mégoté l'option climatisation (1 000 €). Autre mesquinerie, la banquette non fractionnable, grosse bourde pour une voiture qui se veut fonctionnelle. "Chéri, on prend aussi la poussette ?" "Oui, mais on laisse bébé à la maison".

Citroën C4 Cactus : à pique ou face

Pas chère la Cactus ? Presque deux fois plus qu'une Logan. Voiture "light" ? Elle est certes plus légère de 200 kg qu'une C4 "normale" mais seulement de 80 kg comparée à sa cousine Peugeot. On est très loin du radical concept-car Cactus présenté en 2007 qui avait, lui, tout de la 2 CV du XXIème siècle, originale laideur comprise. Là, on est dans le mignon et la révolution attendra. Sa banquette à l'avant ? Illusion d'optique d'un accoudoir qui se rabat dans le vide entre les sièges et n'a d'autre intérêt que d'éviter d'y perdre son téléphone ou ses clefs. Quant à ses Airbumps, ces bandeaux en plastique garnis de capsules d'air, vous pouvez être sur que le caddy de Madame Michu ou la portière de son mari taperont juste à côté, droit dans la tôle. Pour le reste, le coup de la voiture différente, du nouveau concept pour conducteur pionnier, on en reparlera dans un an. Quand il y aura 50 000 Cactus en circulation entre Dunkerque et Perpignan, ce sera juste la bagnole à la mode. Et quand il y en aura 150 000, d'ici 3 ans si tout va bien, elle ne sera plus que la voiture du Français moyen, comme la Renault Scénic qu'à ses débuts on achetait pour se distinguer.


Synthèse

Concept génial ou baratin marketing, peu importe si l'acheteur y trouve son compte. Car la Cactus est surtout une bonne affaire, pas seulement par son tarif, mais aussi par sa sobriété et son coût d'entretien promis très bas, par son confort et son agrément de conduite. En attendant, cet intérieur dépouillé repose le regard, et même le cerveau quand on le compare aux cockpits d'avion de chasse de certaines rivales. Idem pour le style extérieur qui parvient à associer l'impression de virile robustesse propre au SUV à une dégaine débonnaire, dénuée de toute agressivité, qui démode d'un seul coup les statutaires plis et boursouflures de la plupart des SUV. La Cactus n'est sans doute pas une voiture révolutionnaire, mais sa sobre simplicité et sa technologie décomplexée apportent un courant d'air frais dans une industrie automobile qui semble encore vivre à l'heure des trente glorieuses et n'a toujours pas compris que le progrès est une banalité qui n'émeut plus le conducteur.