Aux Etats-Unis, les sondages révèlent que les inquiétudes environnementales sont en augmentation. D'après un sondage Gallup réalisé en 2007, 36 % des Américains sont "très préoccupés" par le réchauffement de la planète notamment. La pollution et le réchauffement climatique deviennent même des sources d'angoisse aux Etats-Unis : du coup, les Américains peuvent consulter un éco-psychologue !

Théodore Roszak, un historien de l'Université d'État de Californie évoluant dans les milieux de la contre-culture depuis les années 1960, a inventé en 1995 le terme "éco-psychologue" : "L'idée de l'éco-psychologie est que nos troubles sont causés par la distance avec la nature et par l'angoisse devant les dommages que l'homme cause à la planète. Nous avons besoin de la nature, tout comme nous avons besoin du soleil. On peut faire un parallèle avec la dépression saisonnière, qui a longtemps été ignorée par le monde de la santé mentale. Nous avons trop longtemps nié l'anxiété que cause cet éloignement de la nature."

Melissa Pickett, une éco-psychologue du Nouveau-Mexique, voit de 40 à 80 patients chaque mois. D'après elle, l'éco-anxiété est un problème bien réel. Pour les "éco-psychologues" en général, ces troubles d'anxiété sont de plus en plus fréquents aux Etats-Unis et les symptômes surviennent suite à une actualité, telle la publication des rapports sur le réchauffement climatique. Andrée Letarte, psychologue à l'hôpital Louis-Hippolyte-LaFontaine, explique que l'éco-anxiété n'est toutefois pas un diagnostic reconnu officiellement : "Je pense qu'on parle de gens souffrant d'anxiété généralisée : parfois, ils vont adopter certains thèmes qui reviennent souvent dans les médias. Je n'ai jamais vu d'éco-anxieux, mais après le 11 septembre, alors qu'on parlait beaucoup du risque d'attentat dans le métro de Montréal, j'ai eu plusieurs patients que l'idée de prendre le métro inquiétait beaucoup. L'anxiété généralisée est gravement sous-diagnostiquée : elle touche 3 % de la population et une personne court 5 % de risques d'en souffrir durant sa vie."

Voici différents cas d'éco-anxiété :

  • Alain souhaite à tout prix réduire son impact sur l'environnement : il a renoncé à sa passion pour les grosses voitures, il limite le nombre de barbecue et rapporte ses bouteilles vides du Maine où il passe ses vacances parce que les touristes n'ont pas accès au programme local de recyclage. Alain précise :

"C'est plus fort que moi, je me sens mal si je ne fais pas un effort supplémentaire. Si je prends ma voiture le dimanche pour aller au centre-ville plutôt que de prendre mon vélo, je ne suis pas vraiment fier de moi."

  • une dame qui avait été horrifiée par la photo d'un ours polaire bloqué sur une banquise au point de ne plus pouvoir dormir.
  • une étude de l'Université du Michigan a constaté qu'entre 1981 et 2002, le nombre de minutes que les enfants passent à jouer dehors a chuté de moitié, de 110 à 40. Un essayiste écologiste américain, Richard Louv, a publié le livre "Last Child in the Woods" où il affirme que les enfants d'aujourd'hui souffrent d'un "trouble de déficit de la nature". L'intérêt pour l'éco-anxiété est attisé par les inquiétudes que causent l'inactivité et l'obésité des enfants qui ne jouent plus dehors. Mitchell Thomashow, directeur du collège Unity dans le Maine, met en avant l'étude de l'environnement : "J'ai assisté au cours de l'été à une conférence en Nouvelle-Écosse sur le manque de contacts avec la nature qu'ont les enfants. Ce n'est pas simplement une question de santé et d'obésité. Si les enfants ne jouent plus dehors, c'est toute une facette de l'expérience humaine qui change."

Pour que les patients maîtrisent leur conscience environnementale et se soignent, les éco-psychologues mentionnent qu'ils peuvent notamment s'impliquer dans des projets bénéfiques pour l'environnement. Et les parents doivent expliquer le réchauffement de la planète aux enfants sans les inquiéter outre mesure : il faut leur montrer qu'ils peuvent agir, notamment en participant à l'effort familial de recyclage. Linda Buzzell-Saltzman, thérapeute californienne qui dirige l'Association internationale d'écothérapie, explique : "L'an dernier, une étude britannique a calculé qu'en cas de dépression légère, une promenade en nature est aussi efficace qu'un antidépresseur. Je suggère généralement trois étapes. Il faut combattre les comportements néfastes, par exemple le gaspillage, élaborer des solutions de rechange, comme de participer à un programme de compostage et améliorer son niveau de conscience, grâce entre autres à des promenades, au sport, de la méditation ou même par l'intermédiaire de la spiritualité traditionnelle." L'éco-psychologue Melissa Pickett met en avant qu'il est possible de traiter tous les maux en prenant l'exemple d'un enfant perturbé et turbulent : "Quand le parent vient me voir, je lui suggère de penser à une analogie naturelle, par exemple une tornade. Le centre d'une tornade est toujours calme. Alors, on peut penser à aménager un endroit où l'enfant pourra se calmer. Et après la tornade, la nature se régénère. De la même manière, il est important de rétablir les liens avec son enfant après une crise."

Incroyable mais vrai ! Et vous, êtes-vous éco-anxieux ?

(Source : La Presse Photo : framboise78.free.fr)