Aux Etats-Unis, le monde politique et le milieu des affaires évoquent beaucoup en ce moment un sujet explosif : le réchauffement climatique. Les démocrates, majoritaires au Congrès américain, souhaitent faire de cette question un thème majeur de leur politique et préparent plusieurs projets de loi sur ce sujet qui commence à inquiéter l'opinion. La présidente de la Chambre des représentants Nancy Pelosi, très engagée sur ce dossier, a déclaré : "Pour empêcher les effets les plus graves du réchauffement, nous devons réduire de moitié environ les niveaux actuels des émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2050. En janvier, j'ai demandé la création d'une commission parlementaire spéciale sur l'indépendance énergétique des Etats-Unis et le réchauffement climatique. Une grande loi sur le climat est attendue le 4 juillet, jour de l'Indépendance." Les républicains du président George W. Bush semblent plus sensibles qu'auparavant au discours sur les changements climatiques. Candidat à l'investiture républicaine pour l'élection présidentielle de 2008, John McCain est cosignataire d'une proposition de loi sur le sujet au côté des deux espoirs démocrates Hillary Clinton et Barack Obama.

La publication le mois dernier d'un rapport alarmant du Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat (Giec) (qui prévoit une très forte augmentation des températures (4 à 6°C en plus) à la fin du siècle et la hausse du niveau des océans si les émissions de CO2 continuent à leur rythme actuel), a réveillé les consciences. "Le fait que des projets de loi sont en préparation, que des Etats (comme la Californie et des Etats du nord-est) souhaitent également légiférer, que des entreprises se mobilisent et que nombre de chefs spirituels se sont saisis de la question du changement climatique est significatif", a affirmé Robert Watson, directeur scientifique de la Banque mondiale qui a dirigé le Giec de 1997 à 2002. Les chrétiens évangéliques, pourtant proches du gouvernement républicain, estiment que la protection de la planète est un devoir religieux : "On commence à voir l'émergence aux Etats-Unis d'une coalition pour agir", estime M. Watson.

Des parlementaires de différents pays, dont la Chine, l'Inde et les Etats-Unis, ont appelé à Washington à l'élaboration d'un accord post-Kyoto pour lutter contre la menace "catastrophique" du réchauffement climatique. Et les entreprises américaines entendent être de la partie estimant que l'inaction risque d'avoir un coût très élevé pour l'économie américaine. Le monde des affaires, emmené par des poids lourds comme Alcoa, General Electric ou DuPont, attend que le gouvernement américain ouvre la voie en matière de législation et de réglementation. A l'heure actuelle, les Etats-Unis sont responsables de 25% des émissions de dioxyde de carbone (CO2) -le principal gaz à effet de serre- dans le monde. Les Etats-Unis n'ont pas signé le protocole de Kyoto, dont sont également absents les pays émergents dont la Chine et l'Inde, les deux grandes puissances économiques montantes. Le président George W. Bush continue à défendre une approche basée sur le volontariat pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et la Chine construit une centrale à charbon par semaine. "C'est un moment crucial. Nous avons une fenêtre de 10 ans" pour agir, a déclaré le démocrate John Kerry appelant à une mobilisation avant que la planète n'atteigne "un point de non-retour". Entré en vigueur il y a deux ans, le protocole de Kyoto expirera en 2012, il serait temps de se réveiller !