La pollution automobile est au coeur des préoccupations.

L'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (Afsset) s'est penchée sur la question : elle met en avant que les véhicules Diesel sont responsables de niveaux de dioxyde d’azote (NO2) problématiques pour la santé en zone de trafic. Elle appelle ainsi à une réaction dès maintenant.

L’Afsset souhaite attirer l’attention sur le dioxyde d’azote (NO2) émis par les véhicules Diesel. Elle explique que cet irritant respiratoire, typique de la pollution due au trafic routier, n’a pas diminué depuis le milieu des années 1990 en situation de proximité au trafic routier et continue de poser des problèmes sanitaires en agglomération (exacerbation de l’asthme, irritations respiratoires…).

D'après l'Agence, la réglementation européenne "EURO" sur les émissions des véhicules a pris du retard sur la maîtrise des émissions de NO2. Elle a fait une priorité de la lutte contre les polluants organiques et les particules. Elle fixe ainsi des contraintes sur les émissions de particules pour les véhicules Diesel qui entraîneront une généralisation des filtres à particules dans les années à venir. En contrepartie, elle a négligé le NO2 qui n’est aujourd’hui comptabilisé qu’au sein d’un agrégat, les oxydes d’azote (NOx).

Selon les scénarios étudiés par l’Afsset, si rien n’est fait, l’application des normes EURO successives sur les émissions des véhicules ne produira pas d’effet significatif sur ce polluant d’ici à 2014 (entrée en vigueur d’EURO VI et EURO 6). Il faudra maintenant attendre 2014 et la sixième génération de norme EURO avec de nouvelles réductions à l’émission sur plusieurs polluants (hydrocarbures et NOx notamment) pour envisager de premiers effets bénéfiques.

Pour ne pas attendre plus longtemps, l’Afsset recommande de prendre dès aujourd'hui les mesures suivantes pour contrer les émissions de NO2 par les véhicules Diesel :

1) retenir systématiquement le NO2 comme critère dans toutes les nouvelles réglementations sur les émissions de véhicules routiers, et non plus seulement l’agrégat "NOx totaux" :

En particulier, il conviendrait de mesurer le NO2 lors des tests sur les véhicules neufs (cycles d’homologation) et de le retenir comme un des critères de choix pour évaluer les performances des technologies moteur et de post traitement des émissions.

En particulier, certains filtres à particules accroissent les émissions de NO2 ; les technologies de ces filtres évoluant rapidement, seules les plus performantes vis-à-vis du NO2 doivent être retenues par les industriels.

Une avancée sera faite à partir de 2014 avec la future norme Euro VI (poids lourds) qui impose la mesure des émissions de NO2 et qui laisse la possibilité de définir ultérieurement une valeur limite portant sur ces émissions. Cette avancée n’a pas été retenue par la norme EURO 6, son pendant pour véhicules légers qui entrera en vigueur également en 2014.

L’Afsset regrette que cette possibilité n’ait pas été ouverte pour les véhicules légers et recommande de définir une valeur limite portant sur les émissions de NO2 des poids lourds (Euro VI).

2) ne retenir que les filtres à particules les moins émissifs de NO2 lorsqu’ils sont installés sur les flottes captives de véhicules (bus, véhicules utilitaires, taxis...) :

Le nouveau "deuxième plan national santé environnement" encourage la mise en place de filtres à particules, par exemple sur des flottes captives. L’Afsset recommande de retenir le critère NO2 pour le choix des technologies de filtres. Ceci est d’autant plus important que la ville de Londres a effectivement mesuré une augmentation du NO2 dans l‘air à proximité du trafic entre 2002 et 2004 en lien avec l’installation de filtres à particules sur ses bus avec un choix de technologie de filtre défavorable.

3) mettre en place un dispositif d’évaluation de l’efficacité des technologies de contrôle des émissions Diesel (y compris filtres à particules, catalyseurs d’oxydation, technologies de contrôle des NOx) en s’appuyant sur les expériences de la Suisse, de l’Allemagne, de l’Autriche et des Etats-Unis :

Un tel dispositif prendrait notamment en compte la réduction des particules, la réduction des NOx, la limitation des émissions de NO2 et la résistance dans le temps des performances des technologies.

4) renforcer les connaissances dans le domaine de la toxicologie des émissions des véhicules Diesels équipés de dispositifs de post-traitement :

En particulier, il est préconisé de renforcer les travaux sur la toxicité des émissions considérées dans leur globalité (aérosols émis comprenant les phases gazeuse et particulaire).

Ces travaux de l’Afsset ont été réalisés à la demande des ministères chargés de l’Ecologie, de la Santé et du Travail.

L’Afsset évoque le NO2 et les effets sur la santé

Le dioxyde d’azote (NO2) est avec les particules fines un des indicateurs majeurs de la pollution atmosphérique. Ils sont tous deux associés au trafic routier dans les agglomérations. Le NO2 réagit en plus dans l’air des villes et contribue à la formation d’autres polluants, ozone et particules secondaires.

C’est un gaz oxydant puissant qui pénètre facilement dans les poumons. A des concentrations dépassant 200 µg/m3 sur de courtes périodes, il provoque des irritations et des inflammations de l’appareil respiratoire et une augmentation de l’hyperréactivité bronchique chez les asthmatiques.

Il est ainsi soumis à un dispositif d’information et d’alerte en cas de pics de pollution (niveau d’information : 200 µg/m3 sur une heure ; niveau d’alerte : 400 µg/m3 sur une heure).

Dans l’air ambiant, les niveaux de NO2 ont eu tendance à stagner ou augmenter en proximité du trafic automobile depuis le milieu des années 1990. A l’heure actuelle, la valeur limite annuelle (40 µg/m3) n’est pas respectée sur de nombreux sites trafic, en particulier au sein de grandes agglomérations telles que Paris, Lyon, Marseille, Nice, Grenoble, Rouen.

C’est actuellement essentiellement dans le flux de circulation en agglomération et notamment à l’intérieur de l’habitacle de véhicules que des niveaux de NO2 les plus importants sont relevés (de 100 à plus de 500 µg/m3). Ces niveaux peuvent tout à fait induire des effets toxiques sur le système respiratoire, en particulier pour les populations sensibles (asthmatiques notamment).

Des technologies de traitement des gaz d’échappement des véhicules Diesel qui conduisent à un arbitrage entre polluants sont aujourd’hui globalement en défaveur du NO2.

Le problème lié au NO2 est un effet secondaire indésirable des technologies de traitement des gaz d’échappement diesel (catalyseurs et certains filtres à particules catalysés). De nouvelles générations de ces technologies, encore en développement, pourraient notablement alléger cette contrepartie problématique sur le NO2. Il faudra cependant encore plusieurs années avant d’en percevoir les bénéfices sanitaires.

Les filtres à particules pour les moteurs Diesel sont très efficaces sur les particules (abattement d’un facteur 100 à 1000 du nombre de particules émises). Mais les suies piégées dans le filtre doivent être régulièrement brûlées pour régénérer le filtre. Or la combustion des particules s’effectue vers 550°C et la température des gaz d’échappement est très inférieure et ne suffit pas. Des catalyseurs sont alors utilisés pour abaisser la température nécessaire à la combustion. A ce jour, deux technologies de filtres se répartissent le marché : les FAP catalysés et les FAP additivés.

Les FAP catalysés font appel à un catalyseur d’oxydation, placé en amont ou intégré dans le média du filtre, et dont l’une des fonctions consiste à accroitre les concentrations de dioxyde d’azote (NO2), mettant ainsi à profit son pouvoir oxydant pour la combustion des particules. Les FAP additivés dont le catalyseur est incorporé dans le circuit carburant (ex : catalyseur à base de cérium), ne font pas appel à une augmentation des concentrations de NO2 pour la combustion des suies.

Les technologies avec catalyseur d’oxydation entraînent globalement une augmentation significative des émissions de NO2, sans pour autant modifier les émissions globales d’oxydes d’azote (NOx).

Les catalyseurs, rendus obligatoires en 1996 sur les véhicules Diesel légers par la norme EURO 2, avaient déjà provoqué une augmentation des émissions de NO2. Aujourd’hui, avant même que les filtres à particules ne se généralisent plus sur les véhicules Diesel, les émissions de NO2 des véhicules légers sont déjà le fait principal des véhicules Diesel catalysés (sans filtre) d’Euro 2 à Euro 4 (voire Euro 5).

Une analyse du parc automobile montre que les perspectives de réduction des émissions de NO2 sont faibles pour les quelques années à venir. L’Afsset a testé plusieurs scénarios en fonction du taux de répartition des FAP additivés et catalysés parmi les véhicules Diesel équipés de FAP. Si le taux de pénétration des FAP additivés était de plus de 30%, les émissions de NO2 dues aux véhicules légers se réduiraient d’ici à 2014. Mais si ce taux était inférieur à 30% environ, alors les émissions augmenteraient à terme.

Vous pouvez consulter à l'adresse www.afsset.fr l’avis, la synthèse et le rapport relatifs à l’"impact des technologies de post-traitement sur les émissions de dioxyde d’azote de véhicules diesel et aspects sanitaires associés".