DE LA MIRAGE A LA GT 40...

Si les voitures de l'équipe Gulf utilisent bien des numéros de châssis de GT 40 produites alors dans l'usine de Slough, elles n'en sont pas moins construites à partir des châssis allégés des Mirage, dont elles reprennent également les voies élargies. Vues pour la première fois à Daytona, les deux GT 40 à la robe bleu ciel barrée d'une bande orange, se distinguent par leur ligne plus compacte. Une silhouette rendue presque agressive par le montage de deux prises d'air latérales destinées à refroidir les freins, d'un pare-brise plus large qui réduit d'autant la surface des vitres latérales et d'une poupe fortement arrondie pour abriter des pneus Firestone de 15 pouces (comme sur la Mirage). Sur le plan mécanique, les voitures qui ont dû renoncer au 5.7 litres, retrouvent le V8-4.7 litres mais celui-ci coiffé de la nouvelle culasse Gurney - Weslake développe désormais 410 ch. Toutefois, c'est sur la balance que les GT 40 Gulf affichent leur "vraie" différence.

L'utilisation intensive de matériaux légers (titane, magnésium) conjuguée au montage d'une carrosserie en fibre de verre renforcée de filaments de carbone autorise un poids de 960 kg à vide. Un cocktail à la fois explosif et efficace qui permet aux deux voitures de signer les deux meilleurs temps aux essais de Daytona. Rapides, les Ford manquent cependant encore de fiabilité et enregistrent deux revers consécutifs à Daytona et Sebring. Jugée responsable, la transmission fragilisée par l'adhérence supérieure des nouveaux pneus Firestone est renforcée et les GT 40 débutent leur campagne européenne par une victoire à Brands Hatch. Elles s'imposent ensuite à Monza, Spa et Watkins Glen, revenant ainsi dans le sillage immédiat de Porsche au Championnat. Tout va se jouer au Mans. Porsche présent en force (quatre 908 et trois 907) incite John Wyer à engager une troisième voiture (un modèle tout neuf construit en août). Si la logistique ne pose guère de problèmes à la solide équipe britannique, le recrutement des pilotes s'avère nettement plus ardu. Wyer ne peut compter sur son équipage de pointe (Ickx et Redman ont été blessés en F1) et il décide de faire appel à Pedro Rodriguez et Lucien Bianchi. Les deux hommes possèdent une immense expérience du Mans et ils ont demandés (chacun de leur côté) à Wyer d'être associés sur la même voiture. Le "Patron" ne regrettera pas son choix.

Les deux hommes remplissent leur contrat à la perfection et triomphent au terme de 24 heures d'une course rendue piégeuse par les averses nocturnes. Une victoire Ford qui se teinte pour la première fois d'une dimension humaine, presque affective liée à la personnalité des vainqueurs, mais aussi à la relative modestie de l'équipe, que la "superproduction hollywoodienne" du géant américain n'avait su générer.

John Wyer avait vu juste en croyant depuis toujours à la GT 40 et il savoure sa revanche sur les "technocrates" de Detroit. Le temps est venu d'enterrer les vieilles querelles et cette troisième victoire qui offre à Ford un nouveau titre mondial fournit enfin le prétexte d'un réchauffement des relations entre les deux partenaires.

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