Si Manuel Valls a immédiatement clôt le débat, les politiques s'insurgent contre l'idée de Ségolène Royal de rendre les autoroutes gratuites le week-end. En particulier les écologistes.

Quel est le comble d'un ministre de l'Ecologie ? Se mettre à dos les écolos. Ce qui ressemble à une mauvaise blague est pourtant la triste réalité.

Hier matin, Ségolène Royal a émis une idée surprenante sur RTL : à l'heure où les sociétés d'autoroutes se gavent outrageusement sur le dos des conducteurs, la ministre a proposé de baisser leurs tarifs de 10%, et surtout « leur gratuité, par exemple le week-end ». Si de plus en plus de conducteurs avouent délaisser les autoroutes par souci d'économie, la mesure aurait pour but de les encourager à revenir... entrainant par conséquent une hausse du trafic, avec plus d'embouteillages et de pollution.

En pleine phase de négociation avec les concessionnaires d'autoroute justement, Manuel Valls a aussitôt recadré Madame Royal en déclarant à la presse que la mesure serait « difficilement envisageable ». Soit. Mais nombreux sont les politiques qui se sont engagés dans la brèche, pour mettre encore plus à mal un gouvernement qui peine à redresser le pays.


Une idée plus démagogique qu'écologique ?

Après le tollé de l'écotaxe, la proposition de la ministre raisonne davantage comme une mesure démagogique, un appel à tous les conducteurs ulcérés d'être pris pour les vaches à lait du gouvernement.

Une stratégie qui n'est pas sans rappeler celle de Marine Le Pen, furieuse contre la politique répressive de l'exécutif. La présidente du Front National déclarait au mois d'août dernier : « Il faut supprimer les radars : les radars n'empêchent pas les accidents, il remplissent les caisses de l'Etat. (…) Les Français savent que les radars sont mis sur des routes qui rapportent, pas sur les routes accidentogènes. »

En dehors de toute considération politique, force est de constater que dans le contexte actuel, flatter l'ego des automobilistes maltraités est la meilleure façon de s'attirer des points dans les sondages.

Sauf que le Premier ministre ne l'entend pas de cette oreille pour des raisons économiques et financières : selon ses déclarations hier, « la question n'est pas à l'ordre du jour. »


Les Ecolos montent au créneau

Le débat est censé être clos, et pourtant. Visiblement très agacée par l'idée, Cécile Duflot a lancé à l'Assemblée : « L'autoroute gratuite le week-end... au secours... ». A Anne Bringault, coordonnatrice sur la transition énergétique pour les ONG chez Réseau Action Climat (RAC), de rajouter : « Ce qu'il faut c'est une baisse des tarifs de train le week-end ! »



Gratuité des autoroutes de Ségolène Royal : une idée pas très écolo ?


Désigné « Envoyé spécial » de la planète par François Hollande, Nicolas Hulot s'est évidemment refusé à critiquer ouvertement la ministre, mais pointe un certain manque de logique : « Cette annonce, dans la dernière ligne droite de l’adoption de la loi sur la Transition énergétique, ne sonne pas comme un élément très cohérent... »

Au lieu de rendre les autoroutes gratuites, Nicolas Hulot songe à d'autres alternatives plus vertes, comme « la gratuité systématique des transports en commun en cas de pic de pollution, des tarifs préférentiels sur les autoroutes pour les véhicules peu polluants ou ceux qui covoiturent. »


Les autres ironisent : « et pourquoi pas les patisseries gratuites le dimanche ? »

Chef de file des députés UMP, Christian Jacob a qualifié l'idée de Ségolène Royal de « n'importe quoi », s'inscrivant dans « la liste à couacs de la machine gouvernementale », pour conclure sur un trait d'humour noir : « Et pourquoi pas les patisseries gratuites le dimanche ? »

Sous la déferlante de critiques, la ministre a déclaré assumer ses propos : « Je parle avec bon sens. (…) J'ai voulu mettre des idées sur la table. (…) J'ai ma liberté de parole, je voulais montrer qu'il faut bouger. Pourquoi pas cette idée là ? Je ne veux pas épiloguer sur le mode d'application ».


Et de terminer avec un sourire qui en dit long : « En tout cas, les sociétés d'autoroutes sont très réticentes à l'idée de faire de la gratuité...» La messe est dite.