La chasse aux sorcières, pardon aux automobilistes continue. Très conciliants avec eux lorsqu’il s’agit de relancer l’économie à grands coups de primes à la casse et de bonus pseudo-écologiques, les pouvoirs publics s’en donnent ensuite à cœur joie pour donner un goût amer à l’utilisation de notre si cher véhicule. Quand une politique municipale obtuse rencontre le zèle policier, cela donne l’histoire d’un PV absurde.

Bienvenue à Paris et son merveilleux monde du stationnement. Petit cours pour les non initiés. En plus du stationnement payant classique, appelé stationnement rotatif, les riverains se voient proposer ce que l’on appelle le stationnement résidentiel. Il ouvre l’accès à un tarif préférentiel de 3,25 € la semaine. Cependant, il n’est alors possible de se garer que dans une zone prédéfinie autour du domicile, et dans certaines rues seulement – les moins commerçantes qui sont justement… les plus résidentielles. Un « résident » peut aussi se garer sur un emplacement rotatif en payant le tarif normal, compris entre 1,20 et 3,60 € de l’heure. Les non résidents peuvent quant à eux se garer sur n’importe quel emplacement. Tous les détails sont disponibles dans la rubrique Stationnement du site de la Mairie de Paris.

Concrètement, que se passe-t-il lors du retour d’une sortie dominicale à 21 heures ? Généralement, après 45 minutes de recherche infructueuse d’une place à proximité de chez lui, le pauvre automobiliste n’a pas grand choix. Chercher plus loin, dans la limite de la zone autorisée ou en banlieue ? Bon pour qui est prêt à laisser sa voiture loin de chez lui dans un endroit peu fréquenté (Qui a dit peu fréquentable ?) puis marcher ou prendre le métro. Se garer sur un emplacement non résidentiel ? Il faudra aller déplacer la voiture le lendemain matin avant 9 heures. Surtout qu’avec la même contrainte horaire, il y a plus simple : le stationnement anciennement payant directement en bas de chez soi. Les habitants des grandes villes connaissent tous ce stationnement instauré sur une vague écolo-économique ces dernières années par les municipalités. Cela consiste en transformer des emplacements de stationnement en… rien du tout où il est interdit de se garer ; typiquement supprimer le stationnement un coté de rue, divisant ainsi par 2 la capacité de ladite rue. Ce stationnement illégal mais pas gênant semble donc parfait pour un arrêt « minute »… Ou la nuit du dimanche au lundi matin. Erreur.

« Mais de quoi se plaint-il ce délinquant ? Il se gare mal et rouspète après avoir pris un PV ? Il aurait mérité un enlèvement à la fourrière ! » En effet, je ne critique pas le fait d’avoir pris une prune. Je me suis mal garé en connaissance de cause, et j’ai payé mon dû à la société. Je m’estime même heureux d’avoir échappé à la fourrière, la demande d’enlèvement ayant été effectuée. Par contre, là où je tique, c’est que l’agent verbalisateur est passé à 5 h 15. Oui oui, du matin ! Et passé le goût amer que prend le lundi matin, je trouve que cela change tout.

Les difficultés à trouver une place de stationnement pour les riverains sont un problème connu de tous, conséquence de la politique d’expulsion des voitures de la Mairie de Paris. En conséquence, tous les soirs dans les zones résidentielles, il y a des voitures qui se garent en stationnement anciennement payant, pour partir le matin à la première heure. Venir verbaliser ces véhicules, c’est venir volontairement taper sur ceux qui ont besoin d’un véhicule et qui ne peuvent s’offrir le luxe d’un parking. Politique paradoxale pour une municipalité de gauche.

Cette mésaventure est néanmoins l’illustration de quelque chose de positif. La Police et la délinquance vont extrêmement bien ! Avoir le moyen de payer des gardiens de la paix, les nuits de week-end, pour « seulement » coller des PV de stationnement, n’est-ce pas la preuve que la Police peut se permettre de jeter l’argent par la fenêtre et qu’elle n’a pas d’autres chats à fouetter ? Mes chers compatriotes, nous pouvons dormir sur nos deux oreilles.

Moins ironiquement, le pire est que le travail a été mal fait. Verbaliser les voitures qui dépassent ? Mission accomplie. Les enlever ? Il n’y a plus personne. Pourtant, je leur ai laissé 3 heures pour ça. Verbaliser les voitures stationnées sur des emplacements mais dont les conducteurs ne sont pas passés par l’horodateur ? Encore une fois, personne. Pourtant, il y a dans la rue deux voitures ventouses, l’une n’étant pas à jour de son ticket depuis une quinzaine de jours, et l’autre depuis… 3 mois.

Finalement, quel est le message que la Préfecture de Police veut envoyer aux automobilistes parisiens ? Que les agents verbalisateurs cherchent la facilité et ne se fatiguent pas à faire leur travail correctement ? Que les PV à 35 € sont rentables, mais pas ceux à 11 € ? Qu’il y a un quota à faire avant de rentrer au commissariat et qu’il faut faire au plus rapide, parce que bon quand même, faudrait pas rater la réunion syndicale de 6 heures autour de la machine à café ? Que les rumeurs de « chiffre d’affaires » à atteindre sont fondées ? Et finalement que l’on peut se garer gratuitement impunément ?

Et vous, avez-vous quelques expériences de PV absurdes à raconter ?

Épilogue

Un mois après cette mésaventure, les voitures ventouses n’ont pas bougé. Comme le hasard fait bien les choses, le propriétaire de la première a mis un ticket d’horodateur sous son pare-brise la semaine où la police est passée 2 fois. Par contre, la seconde a eu droit à… 2 PV à 11 €. Soit 4 mois de stationnement pour un coût modique de 22 €, contre les 55 € qu’ont payé les honnêtes automobilistes. No comment.