"Monsieur Sécurité"

La saison 1966 s'ouvre sur une nouvelle victoire à Monaco, mais à Spa, théâtre du second GP de l'année, l'ascension du pilote écossais manque de se briser. Un orage surprend le peloton des F1 à l'autre bout du circuit. Une demi douzaine de monoplaces partent dans le décor dont la BRM de Stewart qui finit sa course folle en se retournant dans un fossé. Emprisonné dans la carcasse de sa monoplace, Jackie a la clavicule cassée et deux cotes brisées. Pire l'essence coule à flots et à tout instant l'incendie peut éclater. Il n'y a personne à cet endroit du circuit, ni sauveteurs, ni commissaires et c'est Graham Hill sorti de la piste à quelques dizaines de mètres qui vient le libérer en empruntant des outils à un spectateur. Lorsque Stewart est enfin évacué en ambulance, le chauffeur s'égare en chemin... Au-delà du traumatisme, cette incroyable accumulation d'incompétence sera un véritable déclic. Dès lors, Stewart ne cessera d'oeuvrer pour la sécurité sur les circuits. Il est plus que temps. A cette époque, les Grands Prix ressemblent, en effet, plus à des jeux du cirque qu'à des joutes sportives.

Entre 1966 et 1970, près d'une dizaine de pilotes de Formule 1 trouvent la mort en course et autant sont grièvement blessés. La tâche est immense pour Stewart mais il n'accepte pas la fatalité. Il avait un crédo : "je ne suis pas payé pour prendre des risques, je suis payé pour gagner". Il parle alors au nom de tous et se bat avec le pouvoir sportif, les organisateurs, les constructeurs. Il impose un rail de sécurité ici, des grillages ailleurs, des antennes médicales ou encore des structures déformables anti-feu dans les voitures. Il est le premier pilote à rémunérer de ses deniers un chirurgien qui le suit sur chaque circuit, le premier à tester les nouveaux équipements (casque intégral, combinaisons et sous-vêtements ignifugés). Dans ce rôle, il ne se fait pas que des amis et les anciennes gloires de la F1 ne manquent pas de déclarer qu'en leur temps, les pilotes savaient mourir sans se plaindre. Stewart s'en fiche, il sait que son combat est juste : "j'aurais été plus populaire si je ne m'étais pas occupé de sécurité. Je serais peut-être mort aujourd'hui, mais je serais un mort populaire." De plus, Stewart sent que la F1 est en train de changer avec l'arrivée des sponsors et de la télévision. Il sera l'ambassadeur de la F1 moderne, accompagnant le mouvement au point de s'y identifier. Aujourd'hui si les pilotes se tuent moins et gagnent davantage d'argent, ils le doivent pour une large part à la volonté et aux choix de Stewart.

Forum :

  • Venez élire le meilleur pilote de tous les temps, sur notre Forum

Lire aussi :