De Monza à...Monza

Auréolé de son titre mondial, Fangio entame alors une tournée triomphale en Amérique du Sud. Retrouvant le volant de sa Ferrari 166, suralimentée cette fois par un compresseur, il s'impose dans six des sept courses organisées au Brésil, Argentine et Uruguay. Son retour en Europe se transforme bientôt en une véritable course contre la montre : Mille Miles avec Alfa, séances d'essais avec la nouvelle Maserati et meetings de courses avec la BRM. Pour honorer ses contrats, Fangio est précipité dans un véritable tourbillon.

Ainsi en juin 1952, il doit disputer le Trophée de l'Uster le samedi et le GP de Monza le lendemain. Contraint d'abandonner une nouvelle fois avec la capricieuse BRM, il se retrouve bloqué en Irlande à la fin de la course. Les liaisons aériennes interrompues par un tempête sur la manche l'empèche de rejoindre l'Italie. Fangio ne renonce pas. A minuit, Il réussit à gagner Paris avec Louis Rosier, mais toujours pas d'avion ni de trains suffisamment rapides pour Milan. Rosier lui pêt alors sa 4 CV Renault, roule toute la nuit, franchit les Alpes dans des conditions météos épouvantables et finit par arriver à Monza une demie heure avant le départ de la course.

"Je suis arrivé à Monza à 2 heures, je me suis mis au volant de la Maserati à la demie et à 3 heures j'étais à l'hôpital." Epuisé par son marathon, il a commis l'une des rares fautes de pilotage de sa carrière. Il entre trop vite dans la courbe de Lesmo et la Maserati, toute neuve s'envole, fait deux ou trois tonneaux et éjecte son pilote. Il atterrit miraculeusement entre deux arbres mais l'homme est tout de même sérieusement blessé. Touché aux vertèbres cervicales, il va être hospitalisé pendant quarante jours et devoir conserver un plâtre, de la taille jusqu'au cou, pendant cinq mois. Sa saison est terminée.

Il ne va reprendre un volant qu'en janvier 1953 pour les traditionnels GP d'Argentine où ses prestations, un peu anonymes, laissent les observateurs sceptiques sur son état de récupération. Son exploit aux Mille Miles va bientôt démoder toutes les spéculations et interrogations. Avec une direction cassée, (son Alfa n'est plus guidée que par la seule roue avant droite), il parvient à s'emparer de la seconde place en tenant les 160 km/h sur les 200 derniers kilomètres! En Grand-Prix, il ne va pas tarder à bousculer la sereine domination des Ferrari invaincues en championnat du monde et d'un Ascari en état de grâce. Très rapide la Maserati devient aussi de plus en plus fiable, et le premier coup de semonce est tiré à l'occasion du GP de l'ACF à Reims. Dans une épreuve un peu folle se jouant " à l'aspiration" dans les grandes lignes droites du circuit, la guerre d'usure entre les quatre Ferrari et les quatre Maserati va atteindre des sommets. De cet essaim bourdonnant de voiture rouges, Fangio et Hawthorn finissent par émerger en tête. Leur duel va se poursuivre pendant 32 tours pour se terminer à l'avantage du Britannique avec une petite seconde d'avance sous le drapeau à damiers!! En Italie, pour l'ultime GP de la saison, le scénario est tout aussi intense mais tourne cette fois à l'avantage de l'Argentin qui renoue avec la victoire pour la première fois depuis son accident. Et c'est à Monza, quinze mois après l'accident qui faillit lui coûter la vie, comme pour conjurer le mauvais sort!! Le Maître est de retour et la fantastique "machine à gagner" va tourner à nouveau à plein régime. Un succès, en solitaire, à la fameuse Carrera Panaméricaine avec la jolie Lancia D 24 puis deux victoires en Argentine et au GP de Belgique, avec la toute jeune Maserati 250 F ne sont que le prélude à une moisson de victoires.

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