Précisons tout de suite que dès le départ et pour des questions d’assurance, la place de gauche m’était tout simplement interdite et que ma journée en GTO devait se faire dans le baquet passager. Pas de quoi refuser l’invitation, vous en conviendrez.

Michel, un propriétaire de Ferrari comme les autres ?

Les virées Caradisiac : Ferrari 599 GTO, supercar ou super GT ?

Michel est probablement le propriétaire de Ferrari le plus cool que j’ai jamais rencontré. Volontiers disert sur ses autos, sur l’histoire de sa région, sur ses expériences, on l’écoute avec attention sans jamais se lasser. Jamais il ne se met en avant et chose rare pour un « Ferrariste », il possède aussi une Mustang, une Alfa, une Alpine, il aime les Aston Martin, ne dit même pas de mal d’une Nissan GT-R et parvient à couvrir de louanges sa Porsche 928. Certes, ça n’est pas une 911 mais tout de même, ça n’est pas commun. En fait, Michel est un amoureux des belles autos et n’est pas un monomaniaque imbuvable comme on peut en voir parfois. Bien entendu, il ne cache pas avoir succombé plus qu’à d’autres aux charmes des filles d’Enzo dont il possède encore aujourd’hui quelques exemplaires (une 430 Scuderia et une 575 Superamerica en plus de la GTO). Son histoire avec Ferrari a débuté avec une 328, un modèle qu’il adore mais il a également rangé dans son garage une Mondial, une 456 mal née qui fut un véritable cauchemar et a conduit quasiment tous les modèles de Maranello depuis les années 70, Testarossa et Enzo comprises. Mais ce tifosisme sévère n’a pas altéré son jugement et il sait parler honnêtement de sa passion, de Ferrari ou encore de son pilotage. Sa 599 GTO n’a que 3 semaines, elle est l’une des premières fabriquées sans que l’on sache vraiment quel numéro elle porte. En effet, les plaques fixées sur la console identifiant cette série limitée ne mentionnent plus aucun chiffre pour éviter les bisbilles et autres spéculations mal placées, toutes les GTO sont « 1 of 599 », un point c’est tout.

Un petit café, une 599 GTO, un bonheur simple à 320.001,50 euros

Les virées Caradisiac : Ferrari 599 GTO, supercar ou super GT ?

Première constatation, démarrer sa 599 GTO est un bonheur simple mais un vrai bon moment. Les ingénieurs Ferrari sont devenus de formidables acousticiens et lorsque le V12 craque dans le silence d’une matinée ensoleillée sur une Riviera encore endormie, un frisson vous parcourt l’échine. Ce râle continu prend aux tripes et ça n’est qu’un début. Pour moi, l’imagerie GTO constituée par les 2 précédentes générations est faite de gestes virils effectués par des pilotes à la poigne de fer et aux  mollets d’acier. Terminé ces tableaux éculés, il n’est plus besoin de « souffrir » en GTO, la bête est d’une docilité absolument déconcertante. Rappelons que sous ce long capot avant, se trouve un V12 de 670 ch et 620 Nm de couple s’exprimant sur les seules roues arrière et qu’à la simple évocation de ces chiffres, il n’est pas interdit de s’extasier et d’imaginer que la personnalité du propriétaire d’un tel engin tend plus vers le robuste dresseur de bête sauvage que le gentil retraité adepte de la boîte automatique. Et pourtant, si l’on oublie les conséquences financières d’un petit accrochage urbain, la 599 GTO se manie comme une Fiat 500. La boîte F1 robotisée (ça n’est pas une double embrayage) envoie ad patres la pédale d’embrayage et est capable de gérer le mode automatique, un véritable bonheur dans les bouchons des centres-villes. En se baladant au rythme saccadé d’un trafic citadin, on a tout à coup une pensée émue pour ces propriétaires de supercar oldschool aux auréoles sous les bras et aux mollets tétanisés après avoir simplement traversé une rocade à l’heure de pointe. Michel est d’ailleurs d’une sérénité absolue au moment de s’insérer dans la circulation et finalement, il n’est pas très difficile de manœuvrer 320.000 euros  en milieu hostile. La seule difficulté reste finalement de s’adapter aux harnais qui vous vissent de façon définitive à votre siège. Michel s’en est accommodé facilement, sa femme moins. Gare à celui qui laisse choir son téléphone au sol, il faudra se détacher pour aller le récupérer ou, si l’on veut rester dans la légalité, se condamner à le regarder longtemps se balader sur la moquette !

Même pas mal

Les virées Caradisiac : Ferrari 599 GTO, supercar ou super GT ?

Malgré la facilité avec laquelle elle s’y comporte, la ville n’est pas l’endroit où une GTO se plaira et tout naturellement, on l’imagine destinée (et dessinée) exclusivement pour la piste. Contrairement à d’autres engins tout aussi extrêmes, la 599 GTO se montre d’un confort étonnant sur route. La suspension Magne-Ride commandée via le « manettino » trônant sur le volant est paramétrable en fonction de l’utilisation que vous prévoyez de faire de l’auto ou des conditions que vous rencontrez. En mode « Routes Glissantes », le plus surveillé par les puces, c’est véritablement confortable. Michel m’avoue toutefois qu’il aurait souhaité une GTO encore plus radicale et pour le prouver, bascule très vite en mode ‘Race’ tout en ironisant sur la présence d’un capteur de pluie automatisant la mise en route des essuie-glaces,  « le même système que sur la Modus de sa femme » ! Pour lui, les vitres électriques, la climatisation (bizone qui plus est) sont des accessoires alourdissant l’engin, et donc diminuant son efficacité en piste, un endroit  pour lequel elle est censée être étudiée et optimisée. Michel n’est pourtant pas un pilote du dernier millième, il semble en fait plus sensible à l’esprit, au caractère et à la cohérence d’une auto. Une GTO devrait être radicale par nature, il regrette qu’elle ne le soit pas totalement. À ce sujet, il se félicite du choix de Ferrari de ne pas avoir installé une boîte à double embrayage sur la GTO, comme c’est le cas sur les California et Italia. Cela procède de la même réflexion et selon lui, la douceur du passage des rapports de cette transmission est une sensation de moins offerte au conducteur. Il accepte l’idée de la boîte double embrayage sur des autos destinées exclusivement à la route comme la California par exemple mais il est plus réservé sur le choix de l’installer dans la 458 Italia. Ce que veut Michel, c’est vivre et faire vivre ses autos. Michel n’est pas un contemplatif, il veut rouler et accepte volontiers des gens à ses côtés pour partager ses moments de bonheur. Tant mieux pour nous.