Lors du procès de l'Erika, le tribunal correctionnel de Paris s'est posé une question importante : comment chiffrer les dommages écologiques engendrés par le naufrage de l'Erika, un calcul complexe sur la "nationalité" des espèces migratrices ou les nuisances aux ramasseurs de coquillages. La facture risque en tout cas d'être élevée : en plus des indemnisations des pêcheurs et des professionnels du tourisme pour leur manque à gagner ou le remboursement des sommes investies pour lutter contre la marée noire, les régions touchées revendiquent un "préjudice écologique". Cette notion, comprenant les atteintes à un patrimoine naturel et la détérioration des rapports entre l'homme et la nature, est difficile à mesurer. François Bonnieux, chercheur à l'INRA et auteur d'un rapport sur "L'évaluation économique du préjudice écologique causé par le naufrage de l'Erika", met en avant le chiffre global de 371,5 millions d'euros, en se basant sur de savants calculs prenant à la fois en compte les atteintes à la biodiversité et les pertes de jouissance des habitants. La somme finale représente "une valeur relativement conservatrice", notamment parce que l'étude part du principe que le préjudice n'a duré que jusqu'en 2001, et aussi parce qu'elle n'a pas pris en compte les nuisances liées à d'autres loisirs comme la baignade ou les sports de voile. "Comment évaluer?", s'interroge le président Jean-Baptiste Parlos. "Toute la difficulté est là", répond Jean-Pierre Beurier, professeur de droit maritime. Pour autant, dit-il, la justice reconnaît au moins "le remboursement des frais engagés pour remettre en état la nature." Un défenseur du Rina, la société de classification italienne de l'Erika, proteste : "Mais peut-on dire que les oiseaux et les poissons migrateurs font partie du patrimoine national ?" Les dégâts causés par le pétrole mettent dans une colère noire les écologistes.

Source : AFP