Quick Test: Porsche 911 biturbo JK-Racing

Riding on the Storm

Au détour d'une courbe sur un circuit du Sud, elle est apparue. Perdue au milieu de congénères toutes plus affriolantes et bariolées, elle n'a pas séduit d'emblée. Manifestement, son « pilote » ne cherchait pas le dernier dixième et pourtant à chaque boucle, elle conservait sa position. Etrange. Tout comme son bruit dans la ligne droite. L'anguille était sous Paul Rosche aurait dit un bimmer à l'oreille attentive.

En effet, sous ses atours de première de la classe bien proprette, la Porsche 911 type 993 façonnée par JK-Racing est une sacrée bombasse ! C'est ce que nous vous détaillions lors d'une précédente note. Vous appréhendiez alors la liste des transformations maison qui permettait à une simple Carrera 2 de 272 ch de devenir une Bi-Turbo couvant 220 ch de plus. Et pas plus sauvages qu'un bon dogue allemand bien dressé !

Bref, dans ces circonstances, il faut sortir sa carte de visite et son «sourire avec les dents», son agenda puis convenir d'un rendez vous pour une rencontre plus approfondie. Ce fut chose (rapidement) faite.

JK-Racing est une officine qui cache sous une apparence de garage de quartier, un lieu où des miracles s'accomplissent chaque jour. Les sujets « miraculés » sont généralement quelques spécimens en provenance de Zuffenhausen. Sans être un messie, on peut affirmer que Rodolphe Jank a le talent d'un chirurgien qui, plutôt que d'officier sur du ventricule et de l'oreillette, s'exprime sur du flat 6, voire 4.

Ses connaissances de motoriste sont d'une ampleur à peu près aussi grande que la modestie et la timidité qui le caractérisent. Rodolphe Jank travaille seul. Les fanas des show-rooms de préparateurs allemands gorgés de vendeurs en seront pour leur compte. Mais il faut voir ça différemment: ici, pas d'intermédiaire, vous laissez les clés au patron qui est le même qui va ouvrir le cœur de votre belle. Du producteur au consommateur sans blabla commercial !

Le rideau de métal de JK-Racing s'ouvre sur un local qui fleure bon l'artisan rigoureux et soucieux de bien faire. Tout y est à sa place mais on est loin du « bloc opératoire » glacial que se plaisent à montrer les « grands » du milieu. Non, une chaleur se dégage de ce décor Proustien, donnant à ce local aux côtes réduites une aura, une identité que l'esprit se surprend à ressentir comme il le ferait avec un être humain. Les choses inertes ont une âme...

Une mythique RS 2.7l de 1973 trône au centre attendant de se faire « manipuler » par le maître des lieux pour une restauration complète. A sa droite, repose une Carrera SC subtilement retouchée en attente de son propriétaire. Rodolphe Jank ne verse pas dans le siliconesque et la prothèse outrancière. À ce genre de pratiques, il préfère celle plus méritante d'ausculter puis de remettre les artères des mamies pas encore décrépies en état de fonctionner, et plutôt mieux qu'à l'origine !

Pour cela, point besoin de pilules bleues, mais plutôt d'un banc de flux sur lequel nous nous attardons 20 bonnes minutes. Mon incompétence dans le domaine se réduit alors. Rodolphe Jank dispose d'un banc de flux que certains élèves ingénieurs lui ont envié lors de la semaine passée à Nogaro pour subir la formation nécessaire à son utilisation. L'engin, sur lequel vous branchez votre moteur permet de jauger de l'efficacité et de la pertinence de vos travaux. Le but n'est pas d'élargir tous les orifices comme vous pouviez le faire sur votre 103 SP mais bien d'optimiser les flux internes de l'admission jusqu'à l'échappement. Ce banc sert à s'assurer que le flux n'est pas freiné plus que de raison dans les entrailles du moteur.

Lorsque il évase des cylindres, qu'il retravaille des chambres de combustion, il sait alors si cela va dans le bon sens. La question qui vient à l'esprit : Comment ne pas dépasser la limite ? Simple, Rodolphe m'explique qu'il récupère des blocs moteurs usagés qu'il travaille « à blanc ». De la même façon, pour savoir où il y a moyen de gagner et inversement, où il ne faut pas retravailler un moteur, il découpe simplement ces blocs « de travail » pour juger des épaisseurs et des positions des conduits de refroidissement. Ses observations méticuleusement notées servent ensuite à doper efficacement le bloc du client.

Un moteur mal travaillé et il est possible de perdre jusqu'à 1/5e de puissance, et passer sa vie à tenter de le régler convenablement. Quand je lui demande si les moteurs actuels ne sont pas déjà trop optimisés (cf. V10 BMW M5), il me dit que les marges de la production de masse (quoique relatives pour un V10 BMW) laissent toujours la place pour une optimisation du moteur. Mais il m'avoue aussi que si les anciennes (années 70) avaient un rendement au banc de flux d'environ 65%, aujourd'hui cela sort d'usine proche des 80/85%. Ce qui rend beaucoup plus mince la latitude de travail des préparateurs et qui par conséquent fait émerger les meilleurs d'entre eux.

Les clients de JK-Racing ne se plaignent vraiment pas de ses préparations. Ce qui n'est pas le cas des adversaires de ses client-pilotes.

Pour revenir à l'engin ‘citron pressé ‘ qui nous attend devant le garage, la (re)lecture des caractéristiques techniques m'interpelle sur l'insertion du double turbo et de son cortège de tuyauteries dépendantes. Comment parvenir à faire entrer toute cette tripaille dans une caisse à hanche étroite sans qu'il n'y ait de soucis? En fait, cette 993 Bi-Turbo est la voiture personnelle de Rodolphe Jank et sa réalisation s'est étalée sur 6 mois pendant ses moments de temps libre. Un moteur complet a donc été fabriqué sous forme de gabarit à l'aide d'un vieux bloc et de pièces usinées rapidement ou modelées en tôle. Une fois monté dans la caisse, il est alors possible de constater de visu les modifications à apporter et de refaire un nouveau propulseur "placebo" aux côtes revues. Et ainsi de suite, jusqu'à que tout soit parfaitement intégré. Ca n'est qu'ensuite que la fabrication des tubulures et autres échappements définitifs est lancée grâce aux mesures relevées. Du vrai travail d'artisan.

Sous nos yeux, le résultat est cette 911 Biturbo qui se cache sous une robe anonyme et stricte dont la couleur jaune pourrait être un avertissement quant à la teinte que risque de prendre le slip de l'impétueux qui prendrait un peu à la légère la fiche technique pourtant éloquente...

Au lancement (à main gauche) de l'usine à gaz, les premiers hoquets caverneux du flat 6 bi-soufflé auraient pourtant du me mettre la puce à l'oreille...

A suivre. Si vous pouvez !

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Connaissiez vous les échappements Monte-Carlo ? En voici un exemple. Les 2 sorties centrales officiaient pour le circuit pendant que l'échappement latéral était bouché. Celui-ci servait sur route ouverte, une fois les 2 autres obstruées ! Aaah les années 70....

L'essai est à lire ici

Photos: Patrick Garcia