Sitôt rentré du Mans, sitôt reparti pour la riante bourgade suèdoise de Göteborg pour l'essai de la Saab 9-3 phase 2 dont vous trouverez dès la semaine prochaine le compte-rendu complet dans le magazine de Caradisiac. Mais ce n'est pas ce qui nous intéresse aujourd'hui dans News Auto, comme d'habitude on se tourne plutôt vers les coulisses de l'essai, et dieu sait qu'elles étaient fournies cette fois-ci.

A côté des classiques balades dans la campagne suédoise, de la dégustation de Krisprolls, d'une croisière le long de la côte et de l'essai sur circuit de prototypes 9-3 à 4 roues motrices, le fait le plus marquant pour moi de ces deux jours est sans aucun doute la mise à disposition de tous les modèles marquants de l'histoire de Saab. En plus d'une magnifique Sonett III de 1970 et d'une caravane Saab (!), huit voitures en tout attendaient au soleil qu'on grimpe dedans pour aller faire un tour dans les environs : 92 de 1952, 93 de 1957, 99 EMS de 1974, 99 Turbo de 1978, 900 Turbo 16S Aero de 1986, 900 Turbo 16 Cabriolet de 1989, 9000 Aero de 1996 et Viggen de 1999, toutes issues du musée de la marque. Pour quelqu'un comme moi qui ai appris à conduire au volant d'une 900i Classic et qui ai toujours gardé une tendresse particulière pour la marque, on se rapproche du nirvana. Tant de volants désirables offerts et si peu de temps...

Je parviendrai quand même à poser mon postérieur dans chacun de ces bijoux, conservés dans un état exceptionnel. Après avoir fait le tour des cireuses de bitume que sont les Saab Turbo de la 99 à la Viggen au point que les voisins du centre d'essai ont cru bon d'appeler la police pour mettre fin à tout ce tapage composé d'un mélange de crissement de pneu, de sifflement de turbo et de tonitruants éclats de rire de ma part, je me garde les plus anciennes pour la fin. En dessert.

Et j'avoue un coup de cœur. Oui, en 2007, on peut se faire plaisir au volant d'une Saab 92 dont la fiche technique est la suivante : 2 cylindres 2 temps 764 cm3, 25ch et boîte trois rapports. Mais le plaisir ne réside pas dans la performance ou la lecture des chiffres affichés par un chronomètre. Commençons par entrer à son bord, en ouvrant la portière antagoniste. Sanglons-nous avec son harnais 4 points de voiture de course rajouté depuis pour assurer un semblant de sécurité. Puis vient la séquence de démarrage. On commence par tourner la clé de façon classique, puis on tire une poignée. Le bicylindre refroidi par eau s'ébroue. Il est temps maintenant de passer la première. Le levier de changement de vitesse se trouve sur la colonne de direction et suit la grille suivante : première, on tire le levier vers soi et on abaisse ; seconde, on le remonte au point mort puis encore d'un cran, et la troisième se trouve en dessous. Pour la marche arrière, on tire vers soi et on monte. Simple comme un jeu d'enfant, et ça devient vite naturel.

Quel bonheur de cruiser à 40km/h ! Je me surprends à sourire, le bras à la portière, avec le ploploplop du petit moteur en fond sonore. Toutes les bonnes odeurs sont là, celle des vieux sièges un peu poussiéreux qui sentent le grenier, l'huile chaude, les vapeurs d'essence, elles racontent déjà toute une histoire. Si les 55 ans de la voiture se ressentent au niveau des performances et du freinage symbolique demandant un mollet de sprinter olympique dopé, la direction et la tenue de route sont tout à fait remarquables : la Saab 92 se place au millimètre, permettant d'adopter des trajectoires tout simplement parfaites.

Sur le chemin du retour, je ne résiste pas à tenter une petite Vmax dans la longue ligne droite avant le centre d'essai. Surprise assez déconcertante : alors que je me cramponne à son grand volant et que l'aiguille du compteur de vitesse pointe sur le chiffre 80, le capot avant, qui s'ouvre (heureusement) vers l'avant, se soulève d'une dizaine de centimètres ! Il semblerait que des confrères l'aient mal refermé après avoir pris des photos du moteur. Les noms sont notés et seront transmis aux autorités compétentes. Une fois le capot refermé correctement cette fois-ci, je prendrai 100km/h pédale au plancher dans la petite Saab, penché sur le volant en position de recherche de vitesse et avec toute la caisse vibrant autour de moi. Ce qui valide les chiffres d'époque, ce qui nous fait une belle jambe.

Quel bol d'air frais de conduire ces anciennes pures et sans artifice, quelle déception ensuite de remonter dans un habitacle moderne hermétiques aux odeurs, aux bruits et aux sensations... Merci, M'sieur Saab, pour cette séquence nostalgie.