"C'est une grande première mondiale. C'est la première fois qu'un pays, qu'un ministère de l'Écologie, du Développement durable et de l'Énergie (...) met en place un système scientifique, de contrôle pour identifier s'il y a des équipements frauduleux sur un véhicule" a déclaré la ministre en préambule.


Mais en quoi vont-ils consister ? Nous en savons désormais plus. Pour rappel, ce sont 100 véhicules qui doivent passer entre les mains de l'Utac-Ceram, qui est d'ailleurs le seul laboratoire français à être habilité pour homologuer les véhicules. Ces 100 véhicules seront tirés au hasard, et fournis en majorité par une société de location. Quelques véhicules seront en provenance de particuliers volontaires.


Le but est de leur faire passer trois tests. Les deux premiers seront réalisés en condition d'homologation, c’est-à-dire en laboratoire, sur des bancs à rouleaux, selon la procédure en vigueur, donc NEDC (New european driving cycle). Comme c'est le cas aujourd'hui pour valider le respect des normes. Le troisième sera réalisé sur circuit (le circuit d'essai de l'UTAC sur l'autodrome de Linas-Monthléry), avec un système de prise de mesure embarqué PEMS (Portable emission mesurement system).

Béatrice Lopez, directrice de l'UTAC, précise : "Il s'agit d'essais discriminants. À chaque phase, nous allons leurrer le véhicule pour qu'il ne reconnaisse pas qu'il est en phase de cycle. Ce qui est reproché [à Volkswagen, NDLR] c'est justement une reconnaissance du cycle".



Un test sur circuit, mais selon la même procédure qu'en laboratoire


Autre information : les tests menés sur circuit seront effectués selon le même cycle qu'en laboratoire, transposé sur circuit, légèrement modifié a-t-il été expliqué.


Dans un premier temps, ce sont 10 véhicules qui seront testés, pour valider la méthodologie (la première est une Peugeot 208, et il y aura dans le lot 2 véhicules Volkswagen qui inclut de façon certaine le logiciel de triche). Ensuite 90 autres passeront à leur tour. Il y aura une proportion globale de 50 % de voitures françaises et 50 % de voitures étrangères (allemandes, coréennes, japonaises, italiennes, américaines) respectant les normes Euro 4, Euro 5 et aussi Euro 6b, cette dernière catégorie n'étant a priori pas concernée par les triches. C'est ce que nous verrons. Dans le lot, des voitures essence.


A été annoncé également le prix approximatif de ces tests. Et ce sera en moyenne 10 000 € par voiture, soit 1 million d'euros en tout. Les premiers résultats sont attendus dans un petit mois, et le résultat global des 100 autos avant la fin de l'année.


L'analyse Caradisiac :

L'idée de départ est bonne. Tester en conditions réelles 100 voitures. Cela n'a jamais été fait. Même si l'échantillon peut paraître faible, il est plus gros que tous ceux qui ont déjà été testés par d'autres organismes, aux USA ou en Europe, et il inclut des modèles essence, ce qui est bien.

Mais lorsqu'on apprend que les tests se feront pour partie en labo, sur banc, selon le protocole NEDC à peine modifié, et que de plus, le test sur circuit se fera selon le même cycle, on déchante un peu. Clairement, on sera encore et toujours bien loin des conditions réelles de circulation.

Par contre, et cela est déjà très bien, cela permettra à coup sûr de débusquer les éventuels logiciels tricheurs. Il est avéré que le logiciel VW détectait les conditions de test en labo sur banc à rouleau (capot ouvert, pas d'angle au volant, roues non motrices ne tournant pas, etc.). Ici, la partie effectuée sur circuit aura pour conséquence que le logiciel tricheur ne pourra pas s'activer, ne reconnaissant pas un cycle d'homologation. Donc a priori open bar au niveau des émissions, en mode "on se lâche".

Autre gros avantage, faire passer des véhicules pris au hasard. C’est-à-dire des véhicules non optimisés par les constructeurs pour passer les tests. On va donc pouvoir estimer dans quelles proportions ces optimisations peuvent faire baisser les émissions et la consommation (donc les rejets de CO2). Cependant, on reste sur un cycle NEDC, bien éloigné de la réalité, répétons-le.

Au final, on devrait avoir la confirmation de gros écarts sur les émissions de NOx concernant les modèles Volkswagen qui passeront les tests. Et nous verrons bien s'il y a des surprises avec les autres modèles et marques. Pour les constructeurs qui ne trichent pas, les différences entre labo et circuit devrait être assez minime au final, si les cycles utilisés sont les mêmes.

Dans tous les cas les résultats de ces tests seront attendus avec impatience dans le monde de l'auto. La prochaine étape serait dans l'idéal de passer des tests en conditions "vraiment réelles" de circulation, ce qui a été fait aux USA et est à la base du scandale Volkswagen.


Photographie : Christophe Bouillon