EV Dragster


Cette P85D est le fleuron de la gamme Tesla, celle qui propose le plus de performance et qui se retrouve le plus souvent engagée dans des drag-races que l'on retrouve en vidéo sur internet. Une raison à cela, ses deux moteurs électriques proposent jusqu'à 700 ch en pic (224 ch pour l'avant et 476 ch pour l'arrière) et un couple impressionnant de 930 Nm qui, vous le savez, débarquent dès que vous écrasez la pédale lorsqu'il s'agit d'une électrique. Ce débordement s'exprime sur le papier grâce à un chiffre : 3,3s de 0 à 100 km/h ! Plus clairement, une Model S pulvérise à peu près tout ce qui roule sur un exercice d'accélération à partir de l'arrêt ou sur une reprise à partir de 20/30 km/h. C'est même physiquement difficile à supporter les premières fois et ceux à qui vous infligerez ce tour de manège vont vous expliquer qu'ils ont l'estomac qui, soit remonte, soit chatouille puis les tempes ou les oreilles qui font mal. Quant à vous, vous percevez très bien votre champ de vision qui se rétrécit pendant que vous plissez les yeux pour supporter l'accélération. C'est spectaculaire et réellement impressionnant pour un engin de 5m de long qui plus est silencieux (ou sonore comme une auto-tamponneuse haut de gamme !). Rappelons qu'une Model S ne possède qu'un seul rapport et que la poussée est sans rupture du début à la fin. Bref, si vous circulez en famille ou avec quelques personnes à l'estomac sensible, basculez du mode « Accélération Inouïe » (930 Nm de couple) à « Accélération Standard » (600 Nm) ou alors emportez quelques sacs à vomi.

Essai vidéo - Tesla Model S : l'électrique qui pique

La poussée fulgurante de départ s'essouffle très vite et au delà de 100 km/h, on retrouve un univers nettement moins sensationnel et toutes les sportives les plus puissantes qui se seront fait laminer sur les 250 premiers mètres reprendront irrémédiablement l'avantage. L'auto est tout de même prévue pour atteindre 250 km/h même si ça ne rime pas à grand chose chez nous et que ça réduit l'autonomie très rapidement.


Essai vidéo - Tesla Model S : l'électrique qui pique

Cela n'a guère de sens pour une berline familiale de 5m mais nous avons quand même tenu à vérifier sur le circuit Paul Ricard combien de temps cette Model S garde l'avantage qu'elle s'est octroyée en ligne droite sur des sportives de « puristes » telle qu'une Caterham 275 que nous avions sous la main ce jour là. Avec 2,2 tonnes sur la balance contre 540 kg (soit le poids des batteries de la Tesla) pour la Caterham déposée précédemment en ligne droite, pas de miracle, l'auto a des difficultés à s'inscrire en courbe, elle met ses gommes au supplice et ne suit pas longtemps l'insecte devant. Mais le bilan n'est pas totalement noir grâce notamment à un bel équilibre assuré par une répartition des masses idéale 50/50 et un centre de gravité assez bas. Par ailleurs, la gestion de motricité et de trajectoire n'étant pas déconnectable, elle manque de naturel dans ses réactions trop souvent parasitées par les puces cherchant à maintenir le paquebot à flot. Dans l'exercice, une AMG ou une M déconnectées seront beaucoup plus ludiques mais garderont leurs pneus moins longtemps encore. La direction paramétrable n'est pas non plus un premier prix de précision et de ressenti mais cela reste dans la moyenne.

Essai vidéo - Tesla Model S : l'électrique qui pique


Vrai plaisir de conduite


Essai vidéo - Tesla Model S : l'électrique qui pique

Étrangement, alors que notre modèle était équipé de la suspension pilotée pneumatique optionnelle, seule la hauteur de caisse est réglable, sans aucune possibilité de modifier la fermeté avec des modes Sport ou Confort comme cela se fait ailleurs. Le compromis est toutefois assez agréable et permet de conserver un peu de souplesse pour les passagers et de la rigueur lorsque le rythme s'accélère mais elle gagnerait beaucoup en confort si elle troquait ses énormes roues de 21 pouces chaussées en pneus taille basse (245 et 265/35) pour des enveloppes moins extrêmes. Reste que conduire une Model S est probablement l'exercice le plus reposant qui soit : pas d'embrayage, un mode D pour Drive, un Neutre et un mode R pour la marche arrière (avec son énorme écran HD affichant les images de la caméra de recul), pas de vitesses à passer, jamais de rupture de couple à l'accélération, une énorme réserve de puissance pour doubler, un silence de fonctionnement extrêmement agréable, un freinage efficace (étriers rouges Brembo 4 pistons sur la Performance) finalement assez peu utilisé tant la récupération d'énergie à l'intensité réglable peut quasiment arrêter la voiture sur un simple lever de pied, la conduite devient naturellement fluide et étonnamment rapide car l'absence de sonorité gomme un peu l'impression de vitesse. Hormis le gabarit qui oblige à la circonspection sur les petites routes de campagne, c'est réellement un bonheur à conduire.

Pour ajouter à l'ambiance et à la sérénité, on peut compter sur la sono optionnelle 12 HP (dont un caisson de basse 8'') particulièrement impressionnante ou encore le GPS couplé à Google Earth qui rend les guidages tellement plus intuitifs et précis. Il est même capable de garder en mémoire le trajet en cas de perte momentanée de connexion internet empêchant la carte de s'afficher. Bref, Tesla aurait pu se contenter de faire une voiture électrique technologiquement surprenante et laisser de côté la partie « automobile 20e siècle » tellement ringarde mais non, ils ont choisi d'être irréprochables sur ce plan du comportement, il faut absolument saluer cette volonté de bien faire.

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Pisté

Par contre, ce statut de voiture d'une nouvelle ère va vous obliger à accepter d'être « épié », ausculté, analysé avec d'entrée de jeu, une Model S qui vous reconnaît lorsque vous approchez d'elle et qui extrait les poignées puis dès que vous posez le pied sur le frein, elle « démarre » dans un silence total. Elle est aussi capable au bout d'un certain temps d'activer elle-même des réglages que vous actionnez toujours au même endroit. Étant en permanence reliée à Tesla, la firme californienne peut savoir exactement où vous êtes et tous ce que vous faites, on imagine assez facilement l'utilisation que vont en faire des sociétés comme Google qui sont partenaires et fournissent les cartes et le système GPS. Certes, en cas de problème cette géolocalisation est utile et on peut imaginer que cela évitera aussi certains vols.

Vous même pouvez profiter de tout cela car vous êtes en mesure de localiser votre auto alors que vous n'êtes pas dedans via une application sur smartphone qui vous offre en outre la possibilité d'engager à distance la climatisation, klaxonner, ouvrir et fermer les portes et le toit ouvrant ou encore de surveiller l'état de la recharge batterie en cours. Du gadget pour certains mais pas seulement, car la surveillance ou la programmation de la recharge est importante (pour ne charger qu'en heures creuses par exemple) tandis que pénétrer dans une voiture fraiche en plein été est un bonheur délicieux et apprécié.


Autonomie sous assistance

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Cette journée bien entamée n'a pas épargné la voiture qui a fait fait une session plateau tournage/photo puis a roulé jusque chez Tesla Aix en Provence avant de prendre la direction du circuit Paul Ricard où nous avons longuement testé les accélérations et la tenue en virage. Sur une thermique de niveau de puissance équivalent, la jauge serait probablement dans le dernier quart, vous vous demandez sans doute où en est notre Model S. Un coup d'œil au compteur qui affiche « l'autonomie typique » montre qu'il nous reste encore 170 km à parcourir, soit de quoi aller boire un coup à Cannes ! Mais attention à l'enthousiasme !


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La Model S chargée à plein propose un peu plus de 400 km « d'autonomie typique » qui correspond à une utilisation donnée et repérée par une médiane sur les diagrammes divers proposés par l'auto. Pour atteindre cette autonomie typique, il faut réellement conduire léger et espérer que la topographie du parcours soit avec vous. L'auto indique également une autre autonomie baptisée « rating » correspondant à votre mode de conduite sur les derniers kilomètres et c'est souvent une toute autre histoire que la valeur « typique ». Il ne faut donc pas se tromper car la chute d'autonomie n'a rien à voir avec un réservoir qui se vide plus progressivement. Certes, le GPS dans lequel vous avez au préalable entré votre destination vous dira si vous pouvez faire le trajet désiré ou s'il y a un risque de ne pas y parvenir auquel cas, il recherche le Supercharger le plus proche et vous guide jusqu'à lui mais toute cette assistance bienvenue ne vous évitera pas quelques crises d'angoisse si vous n'anticipez pas vos déplacements. Voir la jauge estimer que vous parviendrez à destination avec seulement 5% d'énergie restante n'est pas des plus confortables et vous pousse à ne pas dépasser les 100 km/h sur autoroute pour garder votre courbe de consommation au plus près de la médiane « typique ». La France compte déjà plus d'une vingtaine de Superchargers rassurants qui « font le plein » de votre auto en moins d'1 heure mais hors ces stations, la recharge est une autre paire de manches. Une prise domestique classique 220v ne recharge qu'à un débit d'environ 10 à 12 km par heure, c'est très peu si bien que les propriétaires de Tesla installent généralement une prise 380v qui permet d'atteindre 40 à 50 km par heure, de quoi recharger durant la nuit. Mais dans le cas de notre étourdi en quête d'une prise en rase campagne, il risque fort de devoir passer la nuit sur place. Reste que ce genre de problème n'arrive qu'aux conducteurs occasionnels ou alors seulement dans les premiers temps car une fois que l'on connait sa voiture, on s'adapte et les véritables 300 km d'autonomie suffisent amplement dans 95% des cas d'utilisation.

Le vrai désagrément consiste en fait à devoir manipuler en permanence des prises, choisir le bon embout, sortir le câble, espérer qu'il soit assez long pour aller jusqu'à la prise femelle, manœuvrer à nouveau pour se rapprocher, mettre en charge, espérer que cela fonctionne, débrancher la prise sale qui a trainé par terre à l'extérieur, la ranger et tout cela parfois plusieurs fois par jour. La multiplication des bornes rapides dotées d'une prise normée (Tesla a adopté un système normé, ce qui n'est pas le cas de Renault par exemple !) sera appréciée ou mieux encore, la concrétisation de la recharge par induction améliorera grandement le confort d'utilisation.


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