Dans les locaux du Laboratoire océanographique de Villefranche-sur-Mer (LOV), les chercheurs font des essais sur des millions de microalgues, pouvant être considérées comme un produit énergétique, étant riches en lipide et capables de faire tourner un moteur. Une microalgue ? Un organisme microscopique qui pousse par photosynthèse dans l'eau douce ou l'eau de mer. Olivier Bernard, chargé de recherche à l'Inria (Institut national de recherche en informatique et en automatique) de Sophia-Antipolis nous apporte des précisions : "La particularité de certaines espèces de microalgues est de produire des réserves de lipides allant jusqu'à 70% de leur masse lorsqu'elles sont soumises à des stress comme la privation d'azote ou une augmentation brutale de lumière."

Le premier avantage : avec cent grammes d'huile extrait d'un litre de microalgues, la production de ces cellules permet d'espérer un rendement à l'hectare trente fois supérieur aux oléagineux terrestres tels le colza ou le tournesol !

Le deuxième avantage : si les biocarburants des céréaliers sont accompagnés de pesticides et des engrais néfastes pour l'environnement, la culture de microalgues en serre à grande échelle (des photobioreacteurs) n'a pas ces désagréments et permet de contrôler le cycle de l'azote et du phosphore grâce au recyclage des éléments nutritifs.

Le troisième avantage : le gain de place par rapport aux cultures oléagineuses terrestres! Antoine Sciandra, directeur de recherche du CNRS au laboratoire de Villefranche, explique que "selon certains experts, il faudrait planter l'équivalent de la surface de la France en oléagineux pour faire rouler toutes les voitures du pays".

L'objectif : rendre rentable la production des acides gras issus des microalgues et leur transformation en biocarburant. Pour réussir cela, l'Agence nationale de la recherche (ANR) a confié cette tâche à sept équipes universitaires françaises, cordonnées par Olivier Bernard et associées à la PME Valcobio. Le programme Shamash, disposant d'un budget de 2,8 millions d'euros pour trois ans, a commencé à plancher sur les microalgues en décembre 2006 après avoir été labellisé par le pôle de compétitivité "Mer" de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur. Afin d'améliorer la rentabilité, Olivier Bernard donne l'hypothèse suivante : "Outre les acides gras, les microalgues contiennent des molécules très recherchées dans les domaines agro-alimentaire et pharmaceutique, comme les Oméga 3 et les antioxydants. Il nous faut améliorer les procédés de séparation de ces molécules". Les scientifiques cherchent la microalgue qui parmi les 200 000 à un million d'espèces existantes permettra la meilleure production lipidique. "Nous sommes en compétition avec des scientifiques d'Amérique, du Japon, d'Allemagne, d'Angleterre, chacun cherche "la bête de course"!".

Source : enquête de Sophie MAKRIS de l'AFP