2. Ludivine Puy : L’interview

Ta dernière course du mondial à Brignoles, tu remplis le contrat.

Oui, c'était un week-end hyper stressant, je savais que j'arrêtais au soir de ces deux jours, je voulais finir sur une bonne note, je n'ai pas fait un bon championnat du monde cette année, on a eu du mal à mettre la moto au point, cela a été assez compliqué pour moi.

Nous n'avions que 4 courses, comme les premières étaient assez condensées, je n'ai pas eu le temps de trouver les bons réglages en début d'année. J'ai donc pris du retard au classement (sur Laia Sanz).

Les formats de courses ont beaucoup changé cette année, c'était très trialisant, ce qui favorisait beaucoup Laia, je voulais donc à Brignoles prouver à tout le monde que j'étais encore la plus forte, et démontrer que sur un terrain 50/50 avec « trial et enduro » j'étais devant. J'ai donc tout donné c'était ma dernière échéance, cela a marché. (Et elle remporte les deux jours)

Tu m'avais dit espérer être poussée dans tes derniers retranchements avant la fin de ta carrière, c'est fait ?

Rire…. Ha oui, c'est fait et plus que fait. J'attendais de la concurrence depuis pas mal de temps, Laia est arrivée un peu tard mais mieux vaut tard que jamais, elle m'a permis de retrouver un dernier souffle, une dernière motivation, elle m'a fait faire une dernière saison assez stressante, situation que je n'avais jamais vraiment connu. C'est exactement ce que je voulais.

Comment vois-tu l'avenir de l'enduro mondial, chez les garçons et les filles bien sûr ?

(Réflexion),,,,,,,,, Pour les garçons je pense que l'on va vers une catégorie unique, on voit les esprits changer, les garçons se comparent avec le classement scratch, j'ai bien peur, ce n'est pas pour moi une bonne chose, que l'on aille vers une seule et unique catégorie, donc avec beaucoup moins de pilotes.

Quand aux filles j'ai bien peur qu'il y en ait de moins en moins, elle ne sont déjà pas nombreuses, parce que l'enduro est devenu trop difficile, les vraies enduristes ne viendront plus au profit de trialistes comme Laïa, on en a eu quelques-unes cette année. Si l'enduro va vers une catégorie Elite, c'est peut-être pour avoir un promoteur avec pas mal d'argent pour attirer de grands médias, télés, TF 1 ou France Télévision, il faut présenter du spectaculaire, quelque chose de vendeur. L'enduro a beaucoup changé et va encore changer.

Avec des troncs d'arbres, traverses, rochers et autre buses en béton, on est très loin de l'enduro original, l'enduro de base !

On n'y est même plus du tout, en fin de CH, on n'a que peu de temps pour boire, manger. Quand les spéciales dites « Extrêmes » ont été créés, je me souviens avoir vu le règlement, c'était marqué que l'Extrême doit rester naturelle, cela pouvait être un mur dans une carrière, mais rien de rajouté. En Italie, on avait une super test avec des sauts en troncs d'arbres, des enrouleurs de câbles à sauter, (Qui poussent rarement dans la nature) des pierres rapportées, des piscines artificielles, on est carrément très loin, on a aujourd'hui de l'enduro indoor en outdoor. C'est un peu du cirque, loin de ce que j'aimais de l'enduro, si j'avais faire du cirque j'en aurais fait, mais je voulais faire de l'enduro.

En te retirant, imagines-tu le vide que tu laisses dans le monde de la moto féminine ?

Non, je n'ai pas du tout conscience de cela, …. Je n'ai même pas encore conscience de m'être retirée après Brignoles, comme c'est l'hiver, je n'ai pas encore réalisé que tout cela s'arête. Après Brignoles, j'ai reçu plein de photos de ma carrière, les deux semaines suivantes j'ai fait que pleurer !! (Et nous on en remet une couche)

Je vais vraiment réaliser quand les copines vont recommencer à rouler, pour préparer la saison.

J'espère pouvoir travailler avec les filles, avec la fédé, peut-être créer un pôle féminin, quelque chose pour faire évoluer le niveau, aujourd'hui je me retire, mais la concurrence, la relève française, elle n'est pas la. Ce n'est pas être prétentieuse, aujourd'hui c'est une constatation, quand je vois en mondial que je termine avec 6 mn d'avance sur la deuxième française, il y a bien un problème.

On te reverra sur une moto ?

Je ne sais pas, …..Je pense que c'est la passion qui parlera, aujourd'hui c'est quelque chose que je n'envisage pas, j'ai envie de fonder une famille, (petit (e) Puy au programme) on verra comment la moto me manque, la manière dont je vais aborder les choses, comment les choses vont évoluer pendant mon absence, on verra.

Peut-être plus vers des courses « plaisir », pouvoir profiter des copains sur des courses, passer du temps avec eux, ce qui était impossible en mondial ou sur le France. Je crois vraiment plus revenir vers cette notion de « moto plaisir », alors en compétition ou juste en rando, je ne sais pas.

Une carrière de 25ans, c'est des centaines de souvenirs, si je te demande LE souvenir ?

Il y en a un, toujours le même, mon premier Dakar en 2005.

Merci Ludivine, merci d'avoir porté si haut les couleurs de la moto, et des filles particulièrement, show must go on.

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