Essai - Harley Davidson Nightster 2022 : mini sportster à sensations 

Accessible, accessible, tu parles. À 15 190 € prix de base pour le coloris noir, on se dit que l'on a déjà vu plus accessible, notamment chez la marque américaine. Déjà, rappelons que les produits venus du pays de l'oncle Sam ne sont plus surtaxés depuis le début de l'année. Ils subissent par contre les augmentations liées au transport et aux carences de "fournitures", comme tout constructeur. Et parfois des délais de livraison rallongés.

Ensuite, souvenons-nous qu'une 883 Iron était proposée à moins de 11 000 € à l'époque. Bon, ça, c'était avant. Avant l'arrivée d'un nouveau moteur à refroidissement liquide, avant qu'une nouvelle architecture reposant sur ledit moteur ne vienne alléger la moto et donc avant que la Nighster ne vienne chambouler l'offre HD. Son régime draconien et surtout une conception plus "plastique", ont ainsi permis de perdre près de 40 kg et une belle dose de finition par rapport au dernier modèle "access" de la marque à l'aigle. Enfin plutôt de la marque au crâne. Et dire qu'aux Etats Unis le Nighster 2022 est facturé 12 999 $ soit un peu plus de 11 900 €… Passons.

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La nouveauté affiche donc fièrement 211 kg à sec, soit 221 kg tous pleins faits en ordre de marche, et ce n'est pas tout. Pour ajouter ces 10 petits kilos au poids à vide, il faut considérer un réservoir de seulement 11,7 litres dorénavant placé sous la selle (qui s'ouvre sur le côté et libère l'accès à un bouchon vissé), tandis que la batterie se trouve en position basse, dans le sabot moteur et face à la route. Harley mélange les cartes, se modernise de maière significative et pourtant pas toujours visible. La boîte à air se cache du coup sous le faux réservoir en tôle. Ce postiche constituant une belle pièce sonnant creux, affiche bien la forme classique walnut, mais il est un parement. L'entrée d'air se fait par le côté droit de la moto, tandis que le cache rond aisément amovible peut être remplacé par un cornet optionnel.

Quel que soit le choix, la Nighster demeure une moto asymétrique au possible entrant en conflit avec les genoux et leur périphérie. Une Harley, ça ne se sert pas, ça s'effleure. À deux visages, la 2022 surprend, y compris visuellement. Elle impose d'écarter les jambes sur la petite selle placée à seulement 700 mm de haut. Une assise au demeurant ferme, dont on peut légitimement redouter le non-confort au regard des 76 mm de débattement des deux amortisseurs arrière dont on peut encore augmenter la fermeté (pré charge par ressort). Côté fourche, on se console avec un élément conventionnel siglé Showa, joliment fini mais bien entendu non réglable, afin là encore de respecter une certaine tradition maison. On n'est pas monté rigide, mais on sent bien que le fessier va chercher à se plaindre à un moment ou à un autre, d'autant plus qu'il se retrouve dans une "cuvette" et reculé par rapport au "réservoir".

Esprit Sportster et plus encore

Le guidon, quant à lui, demeure avancé et suffisamment bas pour basculer le haut du corps, tandis que les repose-pieds standards ménagent une position agréable et haute pour lesdits pieds. La posture de conduite n'est pas des plus naturelle, mais elle passe plutôt bien. De toute façon, c'est un classique, on ne met pas une Harley à sa main, c'est une Harley qui vous met à la sienne… On oubliera vite les rétroviseurs positionnés en bout de guidon. C'est mode, mais sur une moto qui n'a pas oublié de vibrer, même si c'est assez bien amorti, on aurait bien besoin d'un décodeur dès que l'on dépasse les 3 000 tr/min.

Autre point notable : durites, câbles et serre-câbles encombrent le cintre et la colonne de direction. Et même si les commandes à la main sont relativement standards dans leur emploi, elles sont volumineuses dans leur forme. La commande de clignotant, certes non dissociée "pouce gauche, pouce droit" comme par le passé, est placée haut. On regrette également qu'il ne se désactive pas automatiquement. Une option devenue courante sur les motos de ce niveau tarifaire et qui aurait été utile en l'occurrence. On se console en regardant les commodos, bien agencés, mais malheureusement non éclairés. Avec un départ à 5 heures du mat', autant dire qu'on a pu s'y perdre le bout des doigts avant qu'ils ne soient gelés (pas de poignées chauffantes non plus).

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Une fois en plein jour, on distingue à gauche un bouton pour alterner entre les informations du petit afficheur LCD que l'on retrouve sous le compteur analogique. Rien ne manque, pas même une jauge à essence (minuscule, mais bien intégrée), tandis que l'on peut évaluer la distance avant réserve et bénéficier de deux partiels en sus de l'odomètre. Il ne faudra cependant pas demander plus qu'une montre pour alterner avec le compte-tours numérique. L'indicateur de rapport engagé, lui, est permanent. À noter que l'on dispose d'une boîte 6 et bien entendu d'une transmission par courroie.

Pile ou face

De l'autre côté du guidon, c'est encore une fois un sans-faute. Feux de détresse, mode moteur (Rain, Road et Sport), désactivation du contrôle de traction, on est en terrain connu et conquis. C'est simple une fois encore, basique, mais les modes moteur pilotent automatiquement le niveau de l'anti patinage pour l'adapter aux conditions de route, y compris en roulant. Le frein moteur et la réponse à l'accélérateur sont également modulée vers plus ou moins de douceur. Enfin, l'ABS est toujours actif, qui plus est sur l'angle, mais il se déclenche plus ou moins tôt selon que l'on se rapproche du mode pluie. C'est une bonne nouvelle. D'autant plus que le disque arrière affiche une bonne taille et que l'unique disque avant habille la jante de 19 pouces de ses 320 mm de diamètre. Il est pincé par un étrier 4 pistons au maître-cylindre Brembo réglable en écartement, tout comme le levier d'embrayage. C'est sensible, c'est efficace et les leviers sont de forme accessible pour les petites mains. Ah, vous voyez, quand vous voulez, M'sieur Harley !

Bon, l'habillage de la transmission finale n'est pas des plus heureux, et on regrette la forme basique du bras oscillant en acier. Ce n'est pas là le seul grief à formuler. Cette moto nous a immédiatement fait penser au Ducati X-Diavel. Pas de forme, ni de qualité, mais de conception. Le design est moins heureux, moins impressionnant, mais on sent bien qu'ils ne se sont pas trop creusé la tête dans le bureau d'études pour masquer les faisceaux électrique et embellir le côté gauche de la moto. Côté pile, le propre, l'efficace et le bien rangé, côté face, tout ce que l'on n'a pas su masquer ou passer ailleurs… On s'y fait, mais on aimerait que d'origine ce soit une peu plus flatteur (15 190 €, quand même…).

Durites, câbles et même ventilateur, on voit tout depuis le poste de conduite et cela n'a rien d'heureux. D'autant moins que le bras oscillant voit lui aussi des durites et fils électriques courir sur tout son long. Sur une moto à 100 000 francs (mais pour 100 000 t'as plus rien comme le disait Édouard Molinaro dans le film éponyme), on aurait aimé mieux, surtout de la part d'une marque passée maîtresse dans l'art de la dissimulation et de l'intégration sur ses autres modèles (pas un câble sur le guidon). On se croirait revenus au temps de la 750 Street, une moto certes amusante et sympathique, mais produite en Inde et dont la finition laissant à désirer. Si la Nighster est bien plus propre de présentation, elle n'en a pas moins certaines lacunes, laissant présager que l'on sera obligé de piocher allègrement dans le catalogue d'options pour finaliser le produit.

La nouveauté de cette Nighster vient aussi et surtout d'une cylindrée inédite pour un moteur qui ne l'est pas tout à fait. À sa forme, on reconnaît le bloc nouvellement apparu en version 1250 sur les Pan America et Sportster S. Il est ici dégonflé, mais toujours aussi beau à voir. Porteur pour le cadre et les éléments de partie cycle, la puissance du bicylindre en V de 975 cm3 est annoncée à 90 ch, soit moins de 70 kW, et une version A2 de 35 kW est disponible sur le marché moyennant un bridage électronique. Ça, c'est une bonne nouvelle ! Pour information, le rupteur intervient aux alentours de 9 750 tr/min, soit une valeur élevée au regard de l'architecture.

Sur le papier, voici qui promet donc quelques bonnes sensations. Mais en direct, qu'est-ce que cela peut bien donner ? Pour le savoir, nous avons commencé par un Paris by night. Tout du moins à 5 heures du matin, lorsque la ville s'éveille selon Dutronc. De fait il aura fallu attendre 6 heures et quelques pour croiser un chat. Il faut dire que la ville de lumière porte à présent bien mal son nom, étant devenue sombre, encombrée et en chantier… Les monuments ne se montraient même plus, tandis que la moto, elle révélait sur les pavés défoncés l'un de ses défauts...