Il existe d’innombrables façons de dépenser la somme de 3 200 €. Toutefois, celle qui consiste à suivre le stage Aston Martin on ice est assurément l’une des plus jouissives. Voici pourquoi.

Allez hop, direction Saint-Moritz ! Chaque hiver depuis cinq ans, la chic-issime station de ski helvétique est le cadre des journées Aston Martin on ice, programme de conduite musclée sur neige au volant des dernières nouveautés de la marque. Entre hôtel de luxe, champagne Bollinger et longues glissades en contrebraquage, l'ensemble pourrait se résumer ainsi : " Vis ma vie de milliardaire"... Ou de James Bond, c'est selon.

Mais avant d'aller plus loin, abordons la question qui fâche, pour ne plus avoir à y revenir. Oui, la participation à ces réjouissances coûte terriblement cher, en l'occurrence 3 200 € par tête pour moins de 24 heures, nourriture et hébergement - de luxe, en hôtel 5 étoiles - compris. Une somme qui disqualifie d'office 99,9 % d'entre nous, mais peu importe dans la mesure où le nombre de places est limité, et la liste d'inscriptions quasiment bouclée plusieurs mois à l'avance… On le voit, la crise et ses conséquences demeurent des concepts assez abstraits dans l'univers du luxe, ce que confirment notamment les résultats obtenus par Ferrari ou Porsche en 2012. Reste à déterminer si l'offre Aston Martin tient de l'attrape-pigeons ou si elle justifie que vous entamiez votre Livret A par des prestations hors-normes. Pour le savoir, rien ne vaut une immersion totale (dur métier, on sait !). Une exclusivité Caradisiac.


Test exclusif - Aston Martin on ice : 007 raisons de craquer votre Livret A (ou pas ?)

L’hiver prochain, vous pourriez participer

aux sessions Aston Martin on ice parce que…


Jour 1


Le stage démarre l’après-midi, une fois que vous êtes arrivé par vos propres moyens à l’hôtel, en l’occurrence le Kempinski Grand Hotel des Bains, aux interminables couloirs garnis d’une moquette triple épaisseur. Dans la chambre individuelle - prévoir une rallonge de 600 € pour disposer d’une double - vous attendent quelques goodies badgés Aston Martin, notamment un sweat-shirt exclusif « Aston Martin on ice » (Monseigneur est trop bon !). En début de soirée est prévu un pot d’accueil dans un igloo (une structure souple installée devant l’hôtel) comprenant force petits fours arrosés de champagne Bollinger Special Cuvée. Suivent un briefing, puis un dîner typique dans un restaurant rustico-chic du cru. Un bon début.


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Jour 2


Après un copieux petit-déjeuner (les œufs au bacon n’ont rien d’obligatoire, heureusement !), direction le circuit, à 5 minutes de là en navette. Ou plutôt l’immense aire plane, d’une surface équivalente à celle de 6 terrains de football. Là attendent, impeccablement garés en épi comme il se doit (la marque est anglaise, mais dirigée par des Allemands), TOUS les modèles composant le catalogue Aston Martin, à l’exception logique de la Cygnet (bizarrement, personne ne s’en plaindra) et celle, prévisible, de la rare V12 Zagato. Pour le reste, vous avez l’embarras du choix : Vantage V8 ou V12, coupés ou roadsters, DB9, Rapide, et bien sûr la récente Vanquish. Seule différence par rapport à la série, les autos sont équipées d’indispensables pneus neige. Le groupe (20 personnes maxi) est scindé en deux, et deux sympathiques et polyglottes moniteurs se partagent le travail. « Brenez la foiture que vous foulez, on chanche à chaque eksercice ». Avec de tels engins en libre accès, on parlera surtout de « non-embarras » du choix… Pour ma part, j’attaquerai la journée en DB9. Simply delicious.


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Certes, le stage s’étale sur une courte journée, mais avec l’intensité d’un programme serré ! Ici, on ne vous assomme pas de théorie pour mieux privilégier la pratique, avec des modules qui chacun durent au moins une demi-heure : tourner en rond autour de cônes pour « sentir » les voitures et leurs limites de décrochage, évitement après un freinage appuyé, slalom, demi-tour à 180° en marche arrière (voir plus bas), etc. Avec en bouquet final une petite compétition avec des tours chronométrés. Les exercices sont nombreux, le rythme soutenu, le fun omniprésent et, surtout, vous passez suffisamment de temps au volant pour améliorer vos compétences. En d’autres termes, vous conduisez VRAIMENT. Rapporté à la pratique effective et au kilométrage parcouru, le tarif apparaîtrait donc - presque - raisonnable…


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Précisons que l’on vous invite à débrancher l’ESP autant que possible, ce qui a pour conséquence de nombreux décrochages et autres « donuts ». C’est d’ailleurs l’après-midi, à mesure que les apprentis pilotes prennent leurs aises et alors que des parties verglacées apparaissent çà et là, que l’on assiste aux figures les plus spectaculaires.


L’un des moments forts de la session est l’exercice qui consiste à se lancer en marche arrière à 50 km/h pour effectuer un 180° et repartir aussi sec (façon de parler, au vu des gerbes de poudreuse soulevées), pied à la tôle en marche avant. Ecoutons plutôt le moniteur : « Vous accélérez à fond en marche arrière pendant près d’une centaine de mètres puis, une fois passés les cônes, vous passez au point mort, mettez un tout petit coup de volant d’un côté, puis contrebraquez immédiatement de l’autre jusqu’à sentir que la voiture pivote sur elle-même. Ensuite vous rétablissez et, une fois sur la bonne trajectoire, vous repassez la première et accélérez ! » Oui, vous avez bien lu : le genre de cascade que l’on pratique sur un parking de supermarché désert par un dimanche pluvieux au volant d’une BMW hors d’âge, vous vous y exercez ici au volant d’une Vanquish dans le cadre majestueux des Alpes suisses… En clair, vous passerez de pires moments dans votre existence. Et là encore, le nombre de passages (une quinzaine environ) permet d’affiner sa coordination, jusqu’à réaliser le sans-faute même pour les moins doués. Les sports de glisse, il n’y a que ça de vrai !


Ce qui est étrange avec ce stage, c’est qu’il met en scène des voitures surpuissantes au volant desquelles, paradoxalement, l’on ne dépassera pas les 100 km/h (et encore). Dans le même temps, les généreux dégagements permettent des glissades et autres dérapages en toute sécurité. Bref, zéro stress en perspective, afin de cultiver l’art du contrebraquage en toute sérénité… Et à vous ces sensations quasi-nautiques dans ces courbes négociées la portière en avant, la vitre ou la capote baissée pour que la poudreuse vienne vous rafraîchir le museau, le tout rythmé par le doux glouglou du V12. Miam !


L’hiver dernier, deux Chinois ont traversé la planète à la seule fin de participer à une session "on ice", soit plus de 24 heures de transport pour 24 heures sur place ! Mordus ? Assurément ! Mais au terme du stage, l’on comprend un peu mieux l’engouement suscité. Sur neuf sessions prévues cet hiver, cinq étaient d’ailleurs remplies plusieurs mois à l’avance.

Cerise sur le capot, le Dr Ulrich Bez, patron de la marque et pilote de course à ses heures, était présent lors de notre stage. L’occasion, entre deux cascades, d’échanger notamment avec lui au sujet de la saga James Bond. L’homme, pas du genre émotif, ne pourra masquer une pointe de fierté en évoquant la première de Skyfall, cet automne à Londres, où l'apparition de la DB5 a été saluée par les hourras et une salve d'applaudissements : "un grand moment, qui plus est en présence du Prince Charles…" Cela signifie-t-il qu'Aston est définitivement liée à 007 ? "Des liens très forts nous unissent, à l'évidence. Mais attention, l'apparition d'une Aston Martin dans un James Bond n'est pas gratuite, l'auto doit jouer un rôle dans l'histoire. Si c’est juste pour se rendre de l’aéroport à l’hôtel, on préfère qu’il utilise un modèle de grande série. Nos voitures doivent contribuer à l'action et à la réussite de Bond, et nous y veillons en lisant le scénario. Il est trop tôt pour vous parler de la suite, nous ne disposons d'ailleurs à ce stade d'aucune information…"


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Bilan : luxueusement vôtre


Oui, « drifter » sur neige avec une voiture à 250 000 €, c’est rigolo. Mais aussi un brin surréaliste, en y repensant quelques jours plus tard… Cela posé, et ainsi que vous l’aurez compris, ce stage tient plus de la « cool session » que du pilotage pur et dur. On n’est pas là pour chasser l’ultime dixième de seconde mais plutôt pour passer du bon temps au volant d’automobiles parmi les plus belles et désirables au monde. De ce point de vue, le contrat est parfaitement rempli. Une opération - du - tonnerre, donc.


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Reportage photo : Lennen Descamps / AM