Le camping-car, une passion française

2 km de queue sur l'autoroute A1 pour pouvoir accéder au parking du parc des expositions du Bourget. Que se passe-t-il avec le camping-car, nouvelle passion française, avec des ventes à + 25 % au cumul de ces deux dernières années ? Et cocorico, trois constructeurs français - Trigano, Rapido et Pilote - qui trustent le gros des ventes.

Pour moi, cet engouement reste parfaitement mystérieux. Il faudrait que l'on m'explique :

- Comment peut-on investir 45 000 à 100 000 € - pour les modèles les plus courants -, soit le prix d'une petite résidence secondaire, pour ce machin de 8 ou 10 m2 avec une cabine de douche plus petite que mon placard à balais et qui fait souvent aussi office de WC… Machin qui se dépréciera de 10 à 20 % par an les premières années, comme une voiture, et vaudra peau de balle passé une quinzaine d'années.

- Comment considérer - pour ceux qui le louent - qu'il s'agit de vacances économiques sachant que le prix à la journée dépasse souvent celui d'un gîte rural confortable et bien équipé ? Voire avec piscine. Sachant qu'il faut en plus payer le stationnement-ravitaillement sur aire spécifique ou camping, les 11 à 13 l/100 km de gazole, la bouteille de gaz et laisser une caution de 1 500 à 2000 €, perdue au moindre gros Crac ! en marche arrière.

- Quel sentiment de liberté peut-on éprouver au volant d'un machin de 8 X 2,30 X 3 m pesant 3,5 tonnes, capable de s'embourber sur un terrain de camping, interdit de stationnement voire de circulation dans le moindre village pittoresque, assigné à résidence sur des parkings moches et goudronnés et pourchassé par les polices municipales de presque tout le littoral français ?

- Alors que la décoration de son intérieur est devenue un hobby national, sujet de nombreuses émissions, sites et magazines, comment peut-on passer des semaines dans ces cellules aux teintes invariablement blanchâtres, maronnasses, beigeasses et grisâtres ? Une chambre d'hôtel low cost est souvent plus pimpante.

- Pourquoi y a-t-il bien moins d'engouement pour la caravane, trois à quatre fois moins chère, plus durable, moins coûteuse à entretenir, et qui laisse, à l'étape, le loisir d'aller partout où va une voiture ?

- Pourquoi mes enfants - 9 et 12 ans -, en sont-ils devenus littéralement dingues après avoir vu cet été un documentaire sur les camping-cars, au point de me tanner pour que j'en loue un - je résiste…. - et de me traîner ce dimanche au Bourget pour les admirer ?

Bref, le phénomène m'échappe complètement.

Le camping-car, c'est l'enfance de l'automobile

C'est en bavardant avec eux que j'ai un peu mieux compris ce qui fait rêver des millions de Français. Le camping-car, c'est être partout chez soi, la cellule familiale sur roues qui fait défiler le paysage aux fenêtres du foyer. C'est dormir tous ensemble dans un cocon minuscule, le nid parfait où se tenir chaud avec papa-maman et reprendre la route quand ça nous chante.

Le camping-car, à les entendre, c'est l'enfance de l'automobile, son sens premier : la cabane volante que je rêvais d'avoir enfant.

En y repensant, c'est d'ailleurs ce que j'aime le plus dans l'automobile, le voyage en famille.

D'accord, mais pas en camion !

Mon fils me fait remarquer que les routes sont désormais limitées à 80 km/h et que je ne les atteins même pas dès que la route tournicote, pour ne pas faire vomir sa petite sœur…

La ferveur des premiers salons de l'auto    

 Mais retournons au salon du Bourget avec mes deux morveux impatients de tout voir et visiter.

Traîné du matin au soir de van en profilé, de capucine en intégral, de baroudeur en familial, visitant même de véritables autobus aménagés, j'ai fini par me prendre au jeu. Et constaté, à mon grand effroi, qu'il y a désormais plus à s'esbaudir sur la créativité et l'astuce des fabricants de ces bétaillères que sur celles des constructeurs automobiles.

Pour faire dormir, manger, cuisiner et se laver 2 à 7 personnes dans ces espaces réduits, et aussi caser des bagages et des vélos, il faut des trésors d'imagination, d'inventivité, être à la fois architecte et ingénieur, sans cesse remettre en cause les règles établies, surprendre le client et lui faire changer d'avis.

Comparé à ce véritable concours Lépine du transformisme et à l'énorme diversité des solutions techniques, l'industrie automobile est d'un convenu et d'un suivisme à peine croyables.

Le dernier truc qui m'ait un peu épaté dans une voiture, c'était, il y a un bail, le volant à moyeu fixe de la première Citroën C4 et les sièges à malice de la Honda Jazz. Et aussi les systèmes CarPlay ou Androïd Auto qui reproduisent sur l'écran central celui du téléphone. J'ai moins été bluffé par le fameux tiroir-boite à gants du Renault Captur…

Depuis 20 ou 30 ans, la voiture ne s'est que peaufinée et alourdie, toujours mieux équipée mais pas plus maligne, boursouflée de gadgets et de kilos jusqu'à aboutir à l'actuelle impasse du SUV, la pire bagnole au plus mauvais moment.

Il faut reconnaître que les camping-cars sont bien plus passionnants et étonnants. A travers les allées du Bourget, j'ai même retrouvé dans le public la ferveur du visiteur du "Salon de l'Auto" des documentaires des années 50 et 60, quand la voiture se cherchait encore et quand le pékin y croyait.

Finalement, j'ai passé une excellente journée.

Et dans deux jours, le Mondial de l'automobile. Pfffff…..