C'est donc officiel. L'accord de compétitivité mis en place chez Renault a convaincu le partenaire Nissan de produire 82 000 de ses nouvelles Micra en France, sur le site de Flins. Cet accord, c'est celui-là même qui avait été si épouvantablement dénoncé dans les lettres d'un ouvrier de Cléon poussé à un tel désespoir qu'il avait mis fin à ses jours sur son lieu de travail. Un contraste, un choc, une coïncidence que l'on ne peut que constater. Telle est la violence larvée d'une crise sourde, profonde et corrosive qui délite, dilue, dissout.


Adjurer de rendre des comptes à des orphelins, le patron du losange s'est trouvé en mesure de se présenter comme le chef d'une entreprise française capable de dérouler une sémantique que l'on croyait à jamais perdu. Cet accord avec Nissan ? « Ça va créer une dynamique de progrès dans l'usine qui va se préparer, en améliorant la qualité et la productivité, à recevoir ces productions de Nissan. C'est une bonne nouvelle pour l'usine, c'est une bonne nouvelle pour Renault et pour la France.» Car ce n'est pas tout : « on va être obligé, bien sûr, d'embaucher puisque l'usine de Flins produit aujourd'hui un peu plus de 120.000 voitures par an. D'autres partenaires peuvent être tentés, c'est pourquoi je trouve que c'est une très grande chance pour Renault de montrer que, sur un cas très précis qui est la fabrication de la Micra, produire en France, c'est attractif


Produire en France ? Le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, ne pouvait que rejoindre le débat dans une technique d'accrobranches rodée : "ce n'est pas au gouvernement de faire des annonces même si je vous confirme que la direction de Renault se bat pour charger les sites de production en France" a assuré le politique qui, après tant d'échecs, tient enfin un succès à raconter. «  La décision qui a été prise, à la fois par Nissan et par Renault, marque historiquement un point d'inflexion dans le mouvement de délocalisation de Renault. Ce n'est qu'un début vers le retour de Renault en France et vers le made in France." Comme pour insister sur la marge de progression possible, au risque de rappeler toute la complexité d'un ADN national dans une marque automobile en cette époque de mondialisation, le ministre a glissé : « Renault ne produit plus aujourd'hui que 23% de ses véhicules en France. »


Mais ne faisons pas la fine bouche : « dans cette période où le marché de l'automobile est en difficulté dans toute l'Europe, avec des baisses de marché entre -10% et -20% dans tous les pays européens, cet accord a de quoi nous donner des raisons d'optimisme" a conclu M. Montebourg. Et qui pourra dire le contraire ? D'ailleurs, du côté de PSA on a écouté et on a rappelé que l'on avait aussi son plan social. De fait, dès lundi prochain, le lion a bien de l'intention de le mettre en route. Avec ce succès de Renault, c'est effectivement l'instant d'insister sur les nécessités de la flexibilité.