Dans la montée du Turini, Jean-Claude Andruet dirige avec précision l'Alpine qui glisse sur la neige. Déjà le col, tout autour du bolide les flashes crépitent. Dans l'habitacle surchauffé, la tension monte d'un cran. La voiture vient de s'affaisser... roue crevée ! Imperturbable, le pilote entraîne la berlinette dans la descente...

Jean Claude a du mal à maintenir l'Alpine sur la trajectoire. Avec seulement trois roues de valide, elle a tendance à "embarquer". A cet instant précis, l'équipage français le sait bien, toute chance de remporter ce rallye de Monte Carlo 1971 s'est envolée.

Mais qu'importe. Pour Jean-Claude, cette 3e place au classement final, vaut toutes les victoires. Elle marque le retour en forme de ce pilote capable du meilleur comme du pire. Le meilleur c'est l'année précédente, il remporte le Championnat de France et d'Europe des Rallyes. Le pire, ce sont ses éternelles crises d'angoisse, ce mal de vivre. Ainsi au rallye d'Italie 1970, il pleure en pleine épreuve spéciale. Au Tour de Corse de la même année, incapable de se défendre face à son éternel adversaire (ils se détestent !) Bernard Darniche, il laisse s'échapper la victoire. Cette dernière crise va durer jusqu'aux dernières spéciales du Monte Carlo 1971. Voyant qu'il se fait "enrhumer" par ses équipiers Ove Andersson et Jean-Luc Thérier. Jean-Claude dans un sursaut d'orgueil, fait tonner la grosse artillerie. Il remonte au grand galop et sans cette crevaison dans le Turini, la victoire était à sa portée.

Son grand rival : lui même

Drôle de bonhomme cet Andruet. Dans le milieu du sport automobile, c'est un cas à part. Cet être complexe, hypersensible, à l'émotivité exacerbée est souvent victime de son honnêteté. Si en compétition, il est préférable de cacher ses faiblesses, Jean-Claude lui ne triche pas. Et lâchement, le sentant diminué, ses adversaires en profitent pour lui porter l'estocade, si toutefois il ne s'est pas déjà sabordé lui-même.

Le champion d'Europe des rallyes 1970, n'a pas été toujours aussi compliqué. Gamin, il se posait moins de questions. Son enfance, en plus de l'école il la passe à aider sa mère qui tient un hôtel-restaurant à Montreuil (là où il naquit le 13 août 1942). Le petit Jean-Claude se lève à six heures du matin pour ouvrir les portes de l'auberge. A cette époque, il s'imagine plus tard entrant dans les ordres ! Cette décision va faire long feu, puisque dès 16 ans, il convole en justes noces ! Il est papa deux années plus tard.

Pris par ses obligations familiales, il débute dans la représentation industrielle. Il court les routes en voiture pour visiter ses clients. A l'époque, la vitesse n'est pas limitée et Jean-Claude peut s'essayer aux joies de la glisse sur route ouverte au volant de 2CV, Simca 1000 puis Dauphine Gordini. Pour l'instant, par manque de moyens, il ne peut être question de compétition. Bien qu'il s'y soit déjà essayé... en judo. Il a obtenu dans cette discipline un titre de Champion de France en 1961. Pour lui le sport est nécessaire à son équilibre, mais à chaque fois qu'il est battu, il doute et n'en dort plus...

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