Voilà une Renault Clio. Un produit, un objet somme toute commun pour la majorité d’entre vous qui lisez ces lignes. Voilà bien pourtant la Renault Clio au centre d’une polémique qui est en train de naître notamment entre le gouvernement français et l’entreprise, française elle aussi.

Rien d’étonnant à ce que le gouvernement se mobilise. Il représente les intérêts de la France qui avait accordé un prêt bonifié à Renault pour affronter la crise à la condition que l’ancienne Régie nationale ne ferme pas d'usine en France.

La polémique est née suite à la parution d’un article paru dans La Tribune qui faisait état que Renault, détenue à 15% par l’Etat, pourrait produire la Clio 4 en Turquie (laquelle n’est pas encore, toujours pas, en Europe…), au détriment d’une production en France. Devant la levée de bouclier suscitée par cette « révélation », Renault s’est empressé d’indiquer que, pour le moment, aucune décision n’avait encore été prise. Hier, le ministre de l'Industrie, Christian Estrosi, a assuré que « la Clio 4 serait produite en France et veut convaincre le constructeur automobile de préférer les équipementiers français ». C’est dans cette situation que ce mercredi matin, Patrick Pelata, le directeur général du constructeur, et après une réunion ce mardi avec des représentants de Renault et de la filière automobile, avait rendez-vous « chez le ministre ».

Mais la polémique a pris une nouvelle tournure ce matin. Selon Le Monde, « Nicolas Sarkozy a convoqué Carlos Ghosn à l'Elysée samedi pour qu'il se justifie sur ce dossier. Le PDG de Renault doit ainsi rentrer dans la précipitation des Etats-Unis où il se trouve. » Rien de moins. Il faut sans doute rappeler que les élections régionales approchent et qu’une délocalisation de la production, totale ou partielle, de la production de la Clio en Turquie ferait tache au moment où la droite cherche à regagner du terrain dans les conseils régionaux.

En fait, dans ce genre d’affaire, on le voit, un grand nombre d’acteurs, un nombre incalculable de personnes, sont concernées. L’affaire est politico-économique. Car pour produire une Renault Clio il faut beaucoup de gens, beaucoup d’intelligence, beaucoup de travail, beaucoup de matières premières, beaucoup de machines. Et la production d’une Clio est source de richesse, une richesse (re)distribuée. En Turquie, Renault dispose de l’outil industriel pour fabriquer la Clio à moindre coût (de main d’œuvre). Ce coût de fabrication moindre pourrait se traduire soit par une marge accrue (redistribuée en quelle direction ?) soit par un tarif de commercialisation plus compétitif. A moins que Renault ne souhaite accomplir un tour de force : payer ses ouvriers turcs à des salaires équivalents de ceux pratiqués en France ! Nous le voyons, par tous les bouts qu’on la prenne, cette affaire est politique et économique. Seulement il faut y ajouter une dimension internationale. L’affaire n’est pas stricto sensu franco-française.

Cette affaire autour de la Renault Clio, un objet en l’espèce bien encombrant, focalise les impasses que l’époque doit affronter. Elle ne constitue ici qu’un nouvel épisode d’une histoire en train de s’écrire.

Quelques éléments sur la production de la Renault Clio (source: France Info):

  • la Clio est actuellement fabriquée en France (site de Flins dans les Yvelines), en Turquie (site de Bursa), en Colombie (site de Envigado), en Argentine (site de Santa Isabel), au Brésil (site de Curitiba)
  • en 2008, la Clio a été produite en 476258 exemplaires dans le monde (dont 34% en France)