Hier matin avait lieu le Comité Interministériel, présidé par le Premier Ministre François Fillon, venant valider le volet Sécurité Routière du projet LOPPSI. Au total, 14 mesures ont été décidées pour répondre à 6 objectifs majeurs : combattre l'alcool au volant, dissuader les excès de vitesse, sanctionner plus sévèrement les grands délits routiers, sécuriser l'usage des deux roues motorisés, sensibiliser les futurs conducteurs et enfin prévenir le risque routier professionnel.

Les chiffres de la sécurité routière en 2009 ont été médiocres, avec une stagnation à -0,3% du nombre de tués et une légère diminution du nombre de blessés de -10,5%, et ils ont bien failli même être mauvais si les neiges abondantes de décembre n'avaient pas dissuadé les automobilistes de prendre leur véhicule, avec -18,5% de tués et -25,1% de blessés sur ce seul mois. Avec 4262 tués sur les routes l'année dernière alors que le Président de la République Nicolas Sarkozy a fixé l'objectif de passer sous la barre des 3000 victimes d'ici 2012, ces nouvelles mesures viennent en renfort de l'arsenal existant pour tenter d'y parvenir. Mais il existe d'autres objectifs, comme diviser par deux le nombre d'accidents mortels dus à une alcoolémie excessive, de diviser par trois le nombre de jeunes tués sur les routes et de diviser par deux le nombre de tués dans des accidents de deux roues. «Il  n'y a pas de palier atteint, il n'y a pas de seuil incompressible, nous devons en permanence rechercher les meilleurs moyens de lutter contre l'insécurité routière. Pour atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés, nous devons régulièrement réajuster notre dispositif, améliorer la prévention, faire porter notre effort sur les points qui n'ont pas progresser » a déclaré le Premier Ministre, avant d'énumérer ces 14 nouvelles mesures divisées en six catégories.

Combattre l'alcool et la drogue au volant

En 2002, la part des décès sur la route pouvant être imputés à l'alcool était de 27%, un part qui reste stable puisqu'en 2008, elle était encore de 26%, ce qui représente 1200 vies. On estime aussi à 230 le nombre de tués lors d'accidents dont la cause a été imputés directement à la consommation de cannabis. C'est à cause de cette stagnation que la lutte contre l'alcoolémie et la drogue au volant fait l'objet à elle seule de quatre nouvelles mesures.

Ainsi 5 000 éthylomètres embarqués, pour un budget de 5,4 millions d'euros, seront repartis entre la Police et la Gendarmerie d'ici à 2012, soit 1 200 de plus qu'aujourd'hui. Aujourd'hui de 63 500, le nombre annuel de contrôles de stupéfiants passera à 100 000, des contrôles qui seront effectués de façon obligatoire à la suite de tout accident corporel mortel ou non, de façon facultative à la suite d'accidents matériel ou d'une infraction quelconque et de façon aléatoire lors d'opérations dédiées. Après un test salivaire positif aux stupéfiants, une prise de sang doit être effectuée puis analysée par un laboratoire, des frais médicaux estimés à 300€ jusqu'ici financés par le Ministère de la Justice mais qui seront dorénavant à la charge du contrevenant. Limité à ceux ouverts entre 2h et 7h du matin, dorénavant tout lieu titulaire d'une licence lui permettant de vendre de l'alcool, bar, restaurant ou discothèque, sera tenu de mettre à disposition de sa clientèle des dispositifs pour contrôler leur alcoolémie avant de reprendre le volant.

Dissuader les excès de vitesse

Depuis 2003 et l'introduction des premiers radars automatiques, la vitesse moyenne sur les routes françaises a baissé de 10% et le taux d'infraction est passé de 52% en 2002 à 26,5% en 2009. Cependant, en 2009, on estime à 763 le nombre de tués lors d'accidents ayant pour cause directe une vitesse excessive, un chiffre qui a donné lieu à deux mesures supplémentaires.

Estimée à million d'euros, la première est de taille : il s'agit de supprimer les panneaux indiquant 400 mètres en amont un radar fixe de façon systématique au profit d'une signalisation, implantée de façon aléatoire, d'une zone avec « contrôles radar fréquents » qui pourra être renforcée périodiquement par des radars mobiles si elle s'avère très accidentogène. Il est à noter que le parc de radars fixes existant sera augmenté de 800 unités d'ici 2012.

Autre grosse nouveauté : un nouveau type de radar sera mis en place contrôlant la vitesse moyenne dans des zones dites sensibles comme aux abords de chantiers, dans des tunnels ou sur des ponts. 100 modèles de ce dispositif seront déployés sur le territoire et mis en service à partir de 2011.

Sanctionner plus sévèrement les grands délits routiers

La législation va aussi se durcir envers les automobilistes s'affranchissent des règles du Code de la route de façon outrageuse et répétée, les faisant tomber dans la case des « délinquants routiers ». Pour eux, deux nouvelles mesures seront mises en place.

En cas d'infraction grave, l'autorité préfectorale, tout comme le Procureur de la République auparavant, pourra décider de la confiscation et de la mise en fourrière pour une durée de sept jours du véhicule de l'automobiliste en infraction. Par « infraction grave », on entend la conduite sans permis (qu'il n'est jamais été passé ou qu'il est été retiré) ou sans assurance et la récidive de conduite en état d'ivresse, sous l'influence de stupéfiants ou de grands excès de vitesse. Une mesure déjà connue que l'association « 40 millions d'automobilistes » juge anticonstitutionnelle.

Jusqu'ici, un délit de fuite, une pratique dont la fréquence a augmenté de 31% en 7 ans, pouvait coûter à son auteur 2 ans d'emprisonnement et 30 000€ d'amende. Pour inverser cette tendance, ces peines passent respectivement à 3 ans et à 75 000€.

Sécuriser l'usage des deux roues motorisés

Les deux roues motorisés représentent entre 1 et 1,8% du trafic routier en kilométrage parcouru. Pourtant, ils représentaient 26% des tués sur la route en 2008 dont 7% pour les cyclomoteurs et 19% pour les motos, des accidents dont ils sont responsables dans 38% des cas. Malgré ces chiffres, amis motards chevauchant de grosses cylindrées en majorité débridée, rassurez-vous, vous n'êtes curieusement toujours pas concernés, puisque sur les quatre mesures, seule une vous concerne et elle n'est pas répressive.

Car ce sont plutôt les cyclomoteurs et les scooters de 50 cm3 qui sont dans la ligne de mire et le débridage qui leur permet de dépasser les 80 km/h au lieu des 45 km/h réglementaires. Une pratique loin d'être exceptionnelle puisque dans 50% des accidents impliquant un deux roues de 50 cm3, celui-ci est débridé. Pour y mettre fin, une infraction spécifique assortie d'une contravention de 4ième classe à hauteur de 135€ va être créée pour sanctionner les conducteurs de cyclomoteurs débridés et les contrôles seront accrus.

Sujet tabou jusqu'ici, les deux roues feront l'objet à partir de 2011 d'un contrôle technique tous les deux ans et d'une expertise après accident et avant remise en circulation. Une nouvelle fois, cela ne concernera étrangement que les 50 cm3. Son coût sera de l'ordre de 50 à 60% mais il pourra éventuellement être compensé grâce aux efforts des assureurs en matière de tarifs en cas de baisse des accidents.

Un autre bastion tombe, celui du privilège pour tout titulaire du permis B de pouvoir conduire un deux roues jusqu'à 125 cm3. En obtenant le carton après le 1er janvier 2007, celui-ci devait déjà obligatoirement effectuer préalablement 3 heures de formation mais, à partir du 1er juillet 2010, celle-ci sera étendue à 7 heures et à tous les automobilistes voulant conduire un 125 cm3 même s'ils ont obtenu leur permis avant 2007, avec comme seule exception ceux en ayant déjà un, leur expérience étant considérée comme une formation suffisante. Les utilisateurs de tricycles à moteur sont aussi concernés.

Enfin, de nouveaux équipements tels que panneaux de signalisation, éclairage routier ou feux tricolores seront expérimentés en 2010 avant d'être déployé en 2011 avec comme particularité d'avoir des supports dits fragilisés. Cela permettra de réduire la gravité des conséquences lors d'un choc éventuel avec un conducteur de feux roues.

Sensibiliser les futurs conducteurs

Si des actions de sensibilisation à la Sécurité Routière sont menées dans les écoles primaires et au collège, ce n'est pas le cas du lycée malgré le fait que ce dernier se solde en général par deux examens : le baccalauréat et le permis de conduire. Cet oubli sera comblé à partir de la rentrée scolaire 2011, avant une expérimentation dès la rentrée 2010.

Prévenir le risque routier professionnel

Plus d'un accident du travail mortel sur deux est un accident de la route, soit 469 sur 956 personnes tuées, et les blessures occasionnées par ces accidents routiers professionnels représente plus de 5 millions de congés maladie. Suite à ces statistiques, un état des lieux va être effectué dans les trois mois afin d'élaborer un plan de prévention d'ici un an, en partenariat avec les entreprises.

Deux roues de plus de 125 cm3 mis à part, l'arsenal répressif et (un peu) préventif semble complet afin de satisfaire les objectifs de passer sous la barre des 3000 morts sur les routes. Pour conclure, laissons la parole à François Fillon, connu pour son goût pour les belles voitures rapides, avec ces mots prononcés à la fin de son discours : « il faut que chacun de nos concitoyens se rendent compte qu'il est hors de question de relâcher l'effort sur ces sujets et que notre responsabilité est de rappeler les règles, d'adapter la réglementation et de veiller à ce que les contrôles sont les plus effectifs possibles car c'est la meilleure façon de sauver des vies humaines ».