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PV pour non désignation : les amendes majorées à 1 875 €, c'est pour maintenant !

Dans Pratique / Radars

Stéphanie Fontaine , mis à jour

Info Caradisiac. Alors que les nouvelles contraventions "pour non dénonciation" sont suspectées d'être illégales, que la jurisprudence tarde malheureusement à s'élaborer tant les affaires sont envoyées au compte-gouttes devant les tribunaux, les officiers du ministère public, eux-mêmes en charge des poursuites dans ce type d'affaires, et directement responsables du peu de dossiers présentés aux juges, viennent de recevoir pour consigne de valider les majorations. Toutes les amendes initiales - au montant déjà bien salé de 450 euros, en cas de paiement rapide - qui n'ont ainsi été ni contestées ni réglées dans les temps sont majorées à… 1 875 euros ! Si ces amendes forfaitaires majorées (AFM) ne sont pas encore arrivées dans les entreprises, elles ne sauraient tarder.

PV pour non désignation : les amendes majorées à 1 875 €, c'est pour maintenant !

La pilule dans les sociétés, grandes ou petites, chez les autoentrepreneurs comme les artisans, avait déjà bien du mal à passer à 450 euros l'addition, alors à 1 875 euros, elle risque de ne plus être avalée du tout ! Pour rappel, selon le discours officiel, les patrons ont l'obligation de dénoncer leurs salariés, coupables d'avoir été flashés par un radar automatique au volant d'un véhicule de leur flotte.

Ils s'exposent sinon théoriquement à une amende de 135 euros, selon les textes en vigueur depuis le 1er janvier 2017, mais une amende qui dans les faits est systématiquement quintuplée par Rennes à 675 euros, payable dans les 60 jours, et minorée à 450 euros en cas de paiement rapide dans les 30 jours. Maintenant, attention, si les délais de paiement (ou de contestation) ne sont pas respectés, la douloureuse passe alors à… 1 875 euros !

Sauf que jusqu'à maintenant, ces amendes forfaitaires majorées (AFM) à 1 875 euros restaient "très théoriques", comme nous le confirme l'avocate Caroline Tichit, aucun cas n'étant à sa connaissance à signaler. Seulement voilà, selon les informations de Caradisiac, ces AFM sont en passe de devenir réalité !

Instruction vient en effet d'être donnée aux officiers du ministère public (OMP), en charge des poursuites pour ce type de contraventions, de passer au cran supérieur et de donner le coup d'envoi aux majorations. Seules les amendes initiales (à 450/675 euros donc) qui n'auront été ni contestées, ni réglées dans les temps sont théoriquement concernées. Mais il règne une telle pagaille sur ce nouveau contentieux qu'on peut s'attendre à tout.

Des amendes à 1 875 € pour qui ? Méfiance…

Il n'est ainsi pas rare que les OMP, également en charge du traitement des contestations, "se permettent de rejeter en toute illégalité les réclamations des sociétés concernées", ou encore "de leur faire parvenir 'des relances', comme ils les appellent, pour leur enjoindre de régler les amendes", dénonce Me Tichit. La France a pourtant déjà été condamnée à plusieurs reprises par le passé pour des faits similaires par la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), mais les mauvaises pratiques ont, semble-t-il, la vie dure…

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Que se passera-t-il dès lors pour ces contestations que les OMP ont bien du mal à accepter ? Que dire également de ces entreprises, qui ont à gérer un parc immense de véhicules et qui ont pu se retrouver complètement noyées par la réception simultanée de centaines de PV "pour non désignation de conducteur" (NDC) ? "Il est déjà arrivé que des clients me fassent parvenir des contraventions qui avaient ainsi échappé à leur vigilance, et pour lesquelles le règlement comme la contestation étaient hors délais", reconnaît Caroline Tichit. Forcément, on peut s'attendre à ce qu'il y en ait eu qui ont complètement été égarées… et qui ne manqueront pas de donner lieu à un rappel à 1 875 euros.

Des amendes illégales ? Une loi contraire à la Constitution ?

La situation est d'autant plus ubuesque - voire surtout "scandaleuse" pour nombre d'avocats - que ces nouveaux avis de contravention pour NDC ont tout l'air d'être complètement illégaux. "Non seulement ils n'ont aucune existence juridique, puisqu'ils ne sont même pas prévus par les textes", s'agace Me Tichit, mais en plus "il y a tout lieu de penser que ce nouvel article du code de la Route, ce L121-6, à la base duquel ces nouveaux PV sont dressés, soit contraire à la Constitution ! C'est pourquoi j'ai décidé de déposer au nom de plusieurs de mes clients des Questions Prioritaires de Constitutionnalité (QPC)".

Me Tichit n'est d'ailleurs pas la seule. Le cabinet d'Eric de Caumont en a déposé plusieurs aussi. Les avocats Sandra Chirac-Kollarik et Pascal Rouiller, ont été les premiers à en plaider une devant le tribunal de Police d'Angers à la mi-octobre 2017… Et alors ? La Cour de Cassation qui a pour rôle d'examiner la recevabilité des QPC avant leur éventuel renvoi au Conseil constitutionnel, le seul à juger si une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, n'a pour l'heure étudié qu'une seule QPC, celle des deux avocats angevins. Mais la Cour a considéré que celle-ci n'était pas suffisamment "sérieuse" et ne l'a pas transmise au Conseil constitutionnel. Quant aux autres QPC, elles n'ont donc toujours pas passé son filtre, ou celui, avant elle, des tribunaux de Police, devant lesquels ces QPC sont déposées.

Le Conseil constitutionnel ne s'est toujours pas prononcé…

La Sécurité routière a beau claironner que "la Cour de cassation a statué sur la question de constitutionnalité" de cette obligation de désignation, et qu'elle a estimé que celle-ci "est exprimée sans ambiguïté et qu’elle assure un juste équilibre entre les nécessités de la lutte contre l’insécurité routière et le droit de ne pas s’auto-incriminer, sans méconnaître les prérogatives de la défense", la question de la constitutionnalité de cette nouvelle loi, soit du L121-6 du code de la Route, continue bel et bien à se poser.

Si la Cour de Cassation considère que ce nouvel article ne remet pas en cause les droits de la défense, tel que l'ont défendu Me Chirac-Kollarik et Rouiller, d'où sa conclusion que leur question "ne présente pas un caractère sérieux", cela ne signifie pas pour autant que d'autres droits ne seraient pas bafoués.

D'ailleurs, dans sa décision du 7 février, la Cour de Cassation rappelle bien également que "la disposition législative contestée [le L 121-6 du code de la Route] est applicable à la procédure" et qu'elle "n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution"…

Un accès à la justice limité

Le plus navrant avec ce nouveau contentieux des PV pour NDC, c'est de constater combien il est difficile de déposer des QPC, alors que ce dispositif a justement été créé pour permettre "à tout justiciable de contester la constitutionnalité d’une disposition législative à l’occasion d’un procès", au cours duquel le juge a théoriquement à se prononcer sur cette QPC "sans délai". Or, Caradisiac a pu assister directement, en particulier à Paris, à au moins une dizaine de QPC bloquées par les juges, aux prétextes qui n'avaient rien à voir avec une éventuelle irrecevabilité ! Combien de cas similaires ont pu se produire sur toute la France ?

Cette manière de faire est d'autant plus préoccupante que les occasions sont rares d'avoir accès aux juges. "On a rentré énormément de dossiers, effectué au nom de nos clients des milliers de contestations, et pourtant, le nombre de procès relatifs à ces NDC se comptent sur les doigts de la main", nous confiait il y a quelques semaines Maître Roxane Malaret, du cabinet de Caumont, confirmant la situation également vécue par Me Tichit.

Une loi, des poursuites… pour rien ?

Que deviennent alors ces contestations ?

  • Soit les OMP les classent sans suite, ce qui signifie qu'ils abandonnent les poursuites à l'encontre de leurs auteurs et que ces derniers peuvent donc se considérer comme victorieux, quand ils sont tenus au courant - ce qui est toutefois loin d'être la norme puisque les OMP ne sont pas tenus de les informer.
  • Soit les OMP retiennent les dossiers, sans jamais se décider à les enrôler à une audience, afin d'éviter d'avoir à renvoyer ces affaires devant les juges, dont la jurisprudence risquerait de faire des vagues.

"Les arguments juridiques pour balayer ces contraventions se ramassent à la pelle !", justifie Caroline Tichit. "Bien évidemment, le parquet est loin d'être à l'aise avec ces dossiers. C'est un non-sens juridique toute cette histoire !" À l'entendre, rien ne tient la route avec ces PV NDC. En clair, les représentants légaux pourraient très bien s'abstenir de répondre à cette pseudo-obligation de désignation qu'ils ne courraient guère de risque de se voir pour finir condamnés…

 

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