Les constructeurs automobiles continuent bel et bien à faire croire à leurs clients que s'ils n'entretiennent pas ou ne réparent pas leur voiture dans le réseau, ils ne pourront pas bénéficier de la garantie en cas de pépin. A quelques jours de l'ouverture du Mondial de l'Automobile, l'UFC-Que Choisir publie une grande enquête ce mardi qui démontre que ce propos malhonnête – car archifaux ! - reste largement tenu, voire gobé. Pourtant, les prix pratiqués par les marques sont beaucoup plus élevés qu'en centre autos.


L'association de consommateurs a ainsi pris deux modèles en référence, une Peugeot 207 HDi et une Renault Clio dCi, et a visité quelque 1 440 enseignes (structures affiliées aux constructeurs, centres autos, garages indépendants), du 9 au 23 juin derniers, pour récupérer les prix des révisions à 30 000 et 60 000 km, ainsi que les différents tarifs de la main d'œuvre. Résultat : la révision des 60 000 km d'une 207 est « en moyenne 70 % plus cher » que les centres auto (Feu Vert, Midas, Norauto, Roady, Speedy, etc.) et "110 % plus cher que le plus compétitif d’entre eux » ! En l'occurrence, il s'agissait d'un Leclerc proposant le service à 165 €, contre 350 € dans le réseau du Lion. Et les clients du Losange n'ont guère de raisons de se réjouir davantage, puisque pour la Renault Clio, la majoration moyenne tourne autour de 50 % !


D'une manière générale, constate Alain Bazot, le président de l'association de consommateurs, le « surcoût est d'environ 20 % par rapport à un centre auto pour des prestations généralistes et autour de 50 % pour les révisions ». Et malgré ces écarts de prix, souvent énormes, les constructeurs détiennent encore « 83 % de part de marché dans la réparation et l’entretien pour les véhicules de moins de deux ans », déplore l'association. C'est ces « inadmissibles verrous à la concurrence », qui l'agacent tout particulièrement. Car comment les constructeurs parviennent-ils en effet à garder autant de clients ? En leur mentant de manière éhontée !


Obliger les constructeurs à dire la vérité...

Malgré l'adoption en mai 2010 par la Commission européenne d'un nouveau règlement (rappelé en substance cet été) en vue de rendre le marché automobile plus concurrentiel, notamment en tentant de bannir cette idée que les véhicules entretenus – ou réparés – en dehors du réseau perdent leur garantie, les constructeurs automobiles continuent à bafouer les règles. « 40 % d’entre eux affirment ainsi qu’il est risqué ou anti-économique d’entretenir son véhicule hors du réseau et ont refusé de prendre en charge un véhicule d’une marque concurrente », révèle l'enquête. « Dans 56 % de ces cas de refus de prise en charge, on nous a invité à conduire notre auto dans le réseau », précise Edouard Barreiro, le directeur des études de l'UFC-Que Choisir. Pour s'en expliquer, ils avançaient alors par exemple que « seul le constructeur X a les capacités techniques et humaines pour entretenir le véhicule de la marque X ».


« On ne peut plus accepter ces dérapages non contrôlés et non sanctionnés ! », tempête Alain Bazot. Ce dernier réclame ainsi qu'on oblige « les constructeurs d’informer les consommateurs sur la possibilité d’entretenir leur véhicule en dehors du réseau, en insérant par exemple cette information dans leurs contrats et dans le carnet d’entretien des véhicules ». L'association compte aussi peser dans la rédaction du projet de loi sur la consommation que Benoît Hamon doit présenter au Parlement début 2013. Le texte vise à renforcer les droits des consommateurs, notamment en favorisant la concurrence.


En attendant, c'est la répression des fraudes qui pourrait s'intéresser de près à la grande étude de l'UFC-Que Choisir. Trop souvent, comme on peut s'en rendre compte sur la carte interactive mise en place par l'UFC pour illustrer les résultats de son enquête, les ateliers inspectés, en plus de rechigner à divulguer leurs prix, ne respectent pas toujours leur obligation légale d'afficher leurs tarifs. Alain Bazot se plaint d'ailleurs de « l'inertie » de la DGCCRF. Mais bénéficie-t-elle de moyens suffisant pour mener à bien sa mission de protection des consommateurs ? Devant l'ampleur du phénomène, on peut se le demander.