En direct de la loi - Radar automatique : une simple attestation de votre conjoint peut suffire à vous disculper !

En direct de la loi - Radar automatique : une simple attestation de votre conjoint peut suffire à vous disculper !

 

La question de la semaine

« Mon véhicule a été flashé. Je sais que ce n'était pas moi au volant, puisque c'était en pleine nuit et que je dormais chez moi. Mon épouse pourrait attester que j'étais d'ailleurs à mon domicile à ce moment-là. Une telle attestation pourrait-elle suffire à m'innocenter ? »

George (Aix-en-Provence)

 

Oui, une simple attestation peut suffire

à vous innocenter entièrement !

Maître Tichit : « La question est très intéressante car, récemment, la chambre criminelle de la Cour de Cassation a eu à se pencher sur ce problème… Et une attestation ainsi faite par une épouse comme quoi son époux se trouvait bien avec elle, cette nuit-là, est tout à fait conforme, et peut permettre de s'exonérer [de l'amende du "propriétaire-payeur"] sur le fondement de l'article L121-3 du Code de la Route.

Caradisiac : C'est une jurisprudence très forte, car nouvelle et surtout en provenance de la Cour de cassation, la plus haute juridiction de l'ordre judiciaire français. Elle a de quoi tout de même surprendre… Une simple attestation de ce genre peut-elle vraiment suffire, selon vous, à échapper à toutes les sanctions, et donc non seulement au retrait de point(s), mais aussi au paiement de l'amende ?

Maître Tichit : Oui, la preuve est tout à fait libre. En fait, ce qu'il faut reprendre, c'est la genèse de cette redevabilité pécuniaire, soit cet article L121-3 du code de la Route, qui a été déclaré conforme à la Constitution justement parce qu'il n'envisageait qu'une présomption de culpabilité simple. Une présomption simple, cela signifie que par tout élément de preuve, vous pouvez rapporter la preuve contraire [laquelle est constituée sinon de témoignages* et/ou d'écrits, NDLR]. Donc une simple attestation, c'est ce que la chambre criminelle de la Cour de cassation reprend et affirme, suffit à vous innocenter et donc à vous exonérer. Sur le seul fondement de cet article L121-3, non seulement, vous n'avez pas de perte de point(s) correspondant à cet excès de vitesse, mais pas non plus d'amende correspondant à une telle infraction. »

 

Plus de retrait de point, plus d'amende,

sans dénonciation d'un tiers !

Conclusion de Caradisiac : Pour donner plus de poids à un tel témoignage, il serait sans doute préférable que votre conjoint prenne le temps de venir sur place au tribunal pour attester de vive voix cette version des faits. Il ne faut pas oublier en effet que contester un excès de vitesse par radar automatique pour ce motif - que vous n'étiez pas au volant de votre véhicule au moment des faits - vous vaudra, à n'en pas douter, une citation à comparaître devant le juge pour vous en expliquer. Et là, il faudra apporter tous les éléments permettant donc de vous disculper si vous voulez échapper à l'amende du "propriétaire-payeur", en plus d'éviter le retrait de point(s).

Il est aussi à rappeler en effet que lorsque les propriétaires des véhicules flashés contestent être les auteurs des infractions relevées par les radars automatiques (de vitesse comme des feux rouges), les juges n'ont bien souvent d'autre choix que de les relaxer sur le plan pénal, et, ce faisant, leur permettent d'éviter de subir le retrait de point(s). D'ailleurs, en 2011, selon les ordres de grandeur donnés à une mission parlementaire sur la Sécurité routière par le ministère de l'Intérieur, sur les 10 millions de contraventions issus des radars automatiques envoyées par an, seule la moitié, soit 5 millions, donnait réellement lieu à un retrait de point(s). C'est dire combien le système peut déjà paraître faillible de ce point de vue là.

 

Une jurisprudence très forte

Maintenant, sans aucune preuve de leur innocence, les propriétaires en question demeurent redevables d'une amende. On dit qu'ils restent "redevables pécuniaires". Or, le montant de l'amende est toujours beaucoup plus lourd au tribunal, de l'ordre de 150-200 euros pour un excès de vitesse de moins de 20 km/h, alors qu'il n'est que de 45 euros à réception de la contravention (au taux minoré, durant les quinze premiers jours).

Maintenant, si les conducteurs concernés apportent des éléments permettant de prouver leur bonne foi, soit de confirmer qu'ils n'étaient pas au volant au moment des faits, ils n'ont plus rien à payer du tout ! Ils doivent être entièrement et totalement relaxés. Et, avec cette récente jurisprudence de la Cour de Cassation, cela ne devrait plus paraître aussi compliqué à beaucoup… les éléments de preuve à apporter pouvant donc se limiter à une simple attestation du conjoint, sans nulle obligation de dénoncer un tiers. Si tout le monde devait d'ailleurs tenter sa chance, c'est tout le système qui risquerait de s'effondrer, avec d'une part l'engorgement des tribunaux et de l'autre plus aucune rentrée d'argent. C'est dire combien l'arrêt de la Cour de Cassation pourrait bien faire un tabac à en casser la baraque !

 

* L'article 537 du code de Procédure pénale stipule en effet que normalement les PV font foi jusqu'à preuve contraire, et que cette « preuve contraire ne peut être rapportée que par écrit ou par témoins ». Mais ce n'est pas cet article-là qui s'impose en ce qui concerne les contraventions issus du contrôle automatisé, a ainsi précisé l'arrêt de la Cour de Cassation. Là, seul vaut l'article L121-3 du code de la Route, qui parle lui de "tous éléments", dans le sens de "n'importe quel élément" permettant d'établir que le propriétaire n'est pas l'auteur véritable de l'infraction. D’où la possibilité d’accepter une simple attestation d’un conjoint.

 

Combien coûte un avocat ? Si vous souhaitez vous faire défendre par un avocat pour un excès de vitesse, comptez de 600 à 2000 euros selon la nature de la procédure et si elle a lieu à Paris ou en province. La réputation de l'avocat a également une influence sur les tarifs.

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