Genève 2015, c'est fini, la 85e édition a fermé ses portes hier soir. Durant plusieurs jours, la rédaction de Caradisiac a couvert pour vous l'événement en direct. Rédacteurs, caméramen, photographe, tous ont vibré au rythme des révélations successives, tous ont été parfois séduits, parfois déçus, mais toujours enthousiastes, et tous ont souffert. Aujourd'hui, de retour dans leurs pénates parisiennes, quel regard portent-ils sur ce salon qui vient de s'achever?



L'avis d'Alexandre Bataille

Hormis quelques concepts prometteurs, les constructeurs, notamment les généralistes, n’ont pas fait preuve d’audace. Si autrefois le terme « restylage » avait un sens, aujourd’hui il paraît bien galvaudé. Les constructeurs font le maximum pour réduire les coûts et ne prendre aucun risque sur la vie commerciale de la voiture. Surtout si celle-ci fonctionne ! Du coup, le visiteur, qui reste un client potentiel, doit se contenter de facelifts tiédasses qui se traduisent généralement par une calandre redessinée, un clignotant de couleur différente ou l’apparition de feux à LED. Cette maladie a malheureusement tendance à se généraliser.

Pour illustrer ces dires, voici une petite sélection des modèles les moins courageux. Chez Peugeot vous apprécierez les nouveaux feux de la 208, Citroën réputé pour « innover » a effectué le même travail sur le faciès de sa C4. Que dire de Volkswagen qui figure toujours parmi les plus conservateurs avec cette sempiternelle calandre en boomerang ? Cette année, le constructeur allemand a mis deux arêtes sur le capot de ses modèles. Cette prudence excessive s’applique aussi aux constructeurs premiums : BMW et sa Série 1, Land Rover et son Evoque ou encore Audi et son Q3. Rares sont ceux qui proposent un visage remis au goût du jour et c’est dommage.


L’avis de Manuel Cailliot


Ce que je retiendrai de cette édition 2015 du Salon de Genève, c’est la démocratisation. Non pas que les supercars deviennent abordables, ou les luxueuses à la portée du porte-monnaie moyen, non. Je veux parler de la démocratisation des équipement de confort et de sécurité.

Salon de Genève 2015 - Le bilan de la rédaction

Les salons ont toujours représenté une vitrine pour les constructeurs. Ils y présentent leurs nouveautés, nouveaux modèles, mais aussi nouveaux équipements. Et ça commence toujours par une apparition sur le haut de gamme, voire très haut de gamme, avant d’apparaître sur les voitures plus "populaires" des années plus tard. Là où ça change un peu, et même beaucoup, c’est sur le rythme de cette démocratisation. Il y a peu, il fallait 10 ans, 15 ans avant de voire un équipement de Classe S apparaître sur une Classe A. Aujourd’hui, à peine 4 à 5 ans après que l’on découvre un inédit système de sécurité (freinage automatique en ville, lecture des panneaux de signalisation, aide au parking active, etc.), on le voit déjà dans le listing d’équipement ou d’options d’une citadine. Beaucoup d’illustrations de ce phénomène à Genève cette année avec par exemple une nouvelle Honda Jazz bluffante. Cette citadine à moins de 20 000 € peut disposer de la lecture des panneaux, d’une alerte de franchissement de ligne, d’un régulateur de vitesse adaptatif, du freinage automatique en ville, de l’alerte de véhicule dans l’angle mort, d’une tablette tactile connectée au web et à des applications. Bref, autant d’équipement qui étaient en option sur une BMW Série 7 il y a peu. Et pour 5 fois moins cher (on est d’accord, ce qu’il y a autour des équipements est quelque peu différent) ! Bientôt, une Citroën C1 aura la vision de nuit avec caméra infrarouge !

La Peugeot 208 restylée, qui adopte elle aussi le freinage automatique en ville ou l’aide au parking est un autre exemple, les petites citadines qui se dotent de feux full LED aussi. Bref, le progrès c’est aussi ça, et cette démocratisation rapide fait de nos voitures un moyens de transport de plus en plus sûr, il est heureux que même les conducteurs les plus modestes puissent en bénéficier aujourd’hui.


L'avis de Pierre Desjardins


Le Salon de Genève est connu pour ses stands de marques exotiques où regorgent quantité de modèles tous plus puissants et chers les uns que les autres, ce qui est plus ou moins vrai suivant les années.En 2015, c'était plus. Beaucoup plus. Cette réputation a en effet repoussé ses limites avec un nombre considérable de nouveautés avec entre autres quatre Aston Martin, deux Koenigsegg, deux Porsche, deux McLaren, une Ferrari, une Lamborghini et une Rolls Royce !

Et heureusement, puisque du côté des constructeurs plus généralistes, soit on avait tout donné au Mondial de l'Auto soit on se réserve pour le prochain Salon de Francfort. Mais le peu de voitures inédites, à côté des restylages insipides, était d'un sacré calibre, avec la Ford GT, la Honda NSX, l'Alfa Romeo 4C Spider ou encore l'Audi RS3 Sportback.

La crise ? Du passé ! Le réchauffement climatique ? Un hoax ! Sans aucun doute, ce 85e Salon de Genève était la plus belle édition depuis de nombreuses années.

L'avis d'Olivier Pagès

L'écologie semblait être rentrée dans les principales préoccupations des constructeurs automobiles, puisque même les modèles les plus sportifs (Ferrari Laferrari, Mc Laren P1 et Porsche 918, notamment) faisaient appels des motorisations hybrides. Aujourd'hui et notamment à l'occasion de cette édition, toutes ces bonnes intentions semblent être tombés à l'eau ou presque. Ainsi, si on s'amusait à chercher les moindres traces d'hybridation ou de solutions dites écologiques dans les Porsche 911 GT3 RS, Ferrari 488 GTB, FORD GT, on reviendrait presque bredouille.

Toutefois, ne voyons pas le verre à moitié vide mais plutôt à moitié plein car Honda avec sa nouvelle NSX, Audi et sa prochaine R8 e-tron perpétuent timidement cette tendance. Mais le plus ironique dans tout cela est que le modèle le plus puissant du monde est hybride. Il s'agit de la Koenigsegg Regera avec ses 1 500 ch et ses trois moteurs électriques. Révélateur de la tendance actuelle, mais une nouvelle fois, on constate que ses formes d'hybridation les plus poussées sont souvent réservées à une minorité ou alors ne sortent jamais réellement des cartons. Dommage.


L'avis de Patrick Garcia


Si le Mondial de Paris s'était paré de bleu, celui de Genève a sacrément viré au rouge. Chez Ferrari, évidemment, mais aussi Renault, Mazda, Honda, Quant, Mitsubishi, Audi, Kia, Porsche, Ssangyong, Mercedes, BMW et d'autres encore. Il ne faut pas en avoir honte (le rouge, la honte ...), Genève est un salon sans pression pour les constructeurs qui se sentent plus libres d'exposer ce qu'ils préfèrent. Après une grande et longue séquence verte qui a gentiment viré au bleu, la tendance est redevenue aujourd'hui rouge passion. Genève a été un feu d'artifice de sportives, ce salon a montré que les autos (ainsi que les gens qui les conçoivent et les "pensent") revendiquent toujours cette faculté à procurer de l'émotion et c'est important.

Certes, la technologie qui monte actuellement et que l'on a pressenti à Genève nous poussera à lâcher les commandes mais il ne faut pas y voir un frein au plaisir. Bien au contraire. Car nous affranchir des tâches de conduite purement utilitaires pourrait bien nous redonner goût à la vraie conduite, celle qui envoie des frissons dans le bas du dos, qui vous colle parfois une boule dans l'estomac et vous pousse à la concentration la plus aiguisée ou celle qui vous propulse ailleurs, qui vous fait oublier tout le reste quand en bord de mer à la tombée de la nuit, vous laissez un ronflement mélodieux vous bercer les esgourdes tout en enroulant sur le couple le bout de bitume qui s'échappe face à vous.

Quand les aigris anti-voiture n'assimileront plus le déplacement automobile en milieu non adapté (villes) à un calvaire et une agression, peut-être découvriront-ils enfin comment la « bagnole » peut devenir un plaisir.


L'avis de François Chapus

Mon bilan de Genève 2015, pourrait se résumer en déception et pauvreté chez les marques françaises,  millésime moyens pour les autres grands constructeurs, et  grande cuvée pour les marques spécialisés et les concepts-cars.

Bon, on va me taxer de pro Honda, parce que je choisis parmi les nouveautés de série le HR-V (j’ai aimé le premier, j’aime le second) et la NSX (même rengaine). J’ai tellement aimé la première NSX au tout début des années 90, à conduire, à piloter, que je ne peux pas imaginer que celle de seconde génération soit décevante en mouvement. Et puis, avoir attendu des années de concepts en concepts, il n’est pas possible que les Honda boys se soient plantés. Plus que son esthétique,  c’est sa motorisation hybride qui paraît extrêmement judicieuse, même si’il n’y a pas 650 chevaux au total. Si elle est vendue à moins de 140 000 € comme cela se murmure, ce sera l’affaire de la fin de cette décennie. Rien de moins.

Et ne dites pas qu je suis vendu à Honda, puisque je ne place pas la Civic Type R  ou la Jazz dans mon tiercé de tête des  véhicules de série. La troisième place va pour moi à Skoda Superb, grande routière bien aboutie, mais cela aurait pu être le nouveau crossover de Mazda, le CX3.

 

Parmi les nombreux concepts-cars de luxe, j’ai plus d’interrogations que de coups de foudre.  Je pense à Spania en particulier qui présente concept sur concepts à Genève depuis des années. Mon castillan est trop mauvais, mais j’aurais bien aimer poser la question aux dirigeants de cette officine comment ils financent leur(s) projet(s) depuis si longtemps sans jamais avoir vendu une voiture…

Mes concepts préférés préfigurant la grande série sont -dans le désordre-  le Mitsubishi XR PHEV II malgré son nom à coucher dehors qui va réussir à donner un coup de vieux au Range Evoque quand il passera à la série fin 2016, le concept  Nissan Sway qui préfigure une future Micra européenne (fabriquée à Flins)  et le Kia Sportspace, grand break sur base de la future Optima.

Quant à Quant (j’ai pas pu m’empêcher), j’oublie le style de la grande Quant F qui succède sans grosses différences visibles  à l’E-Sportlimousine présentée en 2014, et  je tire mon chapeau à l’étude Quantino.  Comme  la F, elle fonctionne à l’eau salée. Je ne comprends strictement rien au stockage de l’électricité et aux technologies de nanoFlowcell  (deux solutions ioniques à la polarité opposée qui génèrent de l'électricité par oxyréduction en remplacement de l'hydrogène, mariant les avantages des batteries et de la pile à combustible), solution qui est peut-être une des vraies ruptures technologiques de ces dernières années. Si elle est tenue, l autonomie de 1 000 kilomètres de la Quantino se doit d’être saluée,  surtout si considère la compacité étonnante de ce coupé 2+2 (3,91 m de long) malgré ses deux réservoirs de 175 litres, le tout  sans sacrifier la ligne.