Durant toute la semaine des 24 Heures, des pilotes professionnels se sont plaints du comportement de pilotes débutants au volant de prototypes, LMP1 ou LMP2. Enquête sur un phénomène qui inquiète dans le paddock.


La multiplication de pilotes peu expérimentés ou de propriétaires d’écuries souhaitant se mettre derrière le volant n’a pas rassuré tous les acteurs de l’endurance, au Mans. Si certains n’ont rien contre ce phénomène, d’autres s’inquiètent de la différence de niveau entre les pilotes d’une même voiture. Ainsi, un proto LMP1 ou LMP2 peut se montrer très rapide dans les mains d’un pilote professionnel, puis beaucoup plus lent quand le relais est passé à un gentleman driver. Pas forcément informé des passages de témoins, certains pilotes Audi ou Peugeot ont dû faire face à des bolides perdant ou gagnant, selon le changement de pilotes, de 10 à 12 secondes au tour !


Et, au delà de la différence de vitesse, c’est le comportement même de ces pilotes qui beaucoup inquiété. « Quand tu arrives dans les virages Porsche, que le pilote t’ouvre la porte et que, quand tu arrives à côté, il te tourne dessus alors que tu es à 250 km/h, tu te dis que ça ne va pas bien se passer, expliquait Sébastien Bourdais à AUTOhebdo.fr. Il y a des moments chauds. Parfois, c’est comme du poker. D’un côté, tu ne peux pas te permettre d’attendre derrière l’autre voiture le temps qu’il serait nécessaire pour doubler. Mais d’un autre côté, si tu n’attends pas et que tu doubles le plus tôt possible, tu peux t’accrocher et tout perdre. Il faudra être très vigilant là dessus. »


Le Manceau n’est pas le seul à s’être méfié du comportement de ces pilotes. Romain Dumas, vainqueur des 24 Heures du Mans, expliquait avant la course qu’il gardait toujours une certaine appréhension au moment de doubler ces bolides, rapides mais parfois mal contrôlés. « C’est évident car tu ne sais jamais comment il va réagir, ce qu’il veut faire et même s’il t’a vu, nous confiait Romain. Car il est déjà tellement difficile pour lui de conduire qu’il regarde la route et pas dans ses rétros. Il y a une loi qui existe mais elle n’a jamais été appliquée. »


« Tu peux te faire piéger très, très vite dans le trafic, nous confiait en marge de la course un pilote LMP1 d’usine. Cette année, c’est encore plus difficile car il y a beaucoup de nouveaux. Le niveau général est plus bas que d’habitude. Ce n’est pas pour être méchant mais c’est un constat : le niveau général est plus bas que d’habitude. Dans le trafic, c’est difficile et même limite. Certains pilotes sont limites. Ce sont des gens qui ne sont pas confortables dans la voiture, qui peuvent se faire peur sur un circuit aussi difficile. Ca fait partie du Mans, ça a toujours été comme ça mais il faudrait peut-être faire en sorte qu’il y ait une moyenne car un écart de 20 secondes entre deux pilotes d’une même voiture, ça ne va pas. »


Toutefois, un bémol est à apporter tant certains gentlemen drivers ont affiché au Mans un excellent rythme. Quelques uns d’entre eux, habitués à la course auto depuis de nombreuses années, en sont à rivaliser avec des pilotes professionnels, permettant à des équipages privés-pros de se battre pour le podium. Et même pour la victoire puisqu’en GT1, c’est l’équipage de Larbre Compétition qui l’a emporté dans la Sarthe, alors que les trois pilotes, Julien Canal, Gabriele Gardel et Roland Bervillé ne comptaient à eux trois que quatre participations aux 24 Heures du Mans, avant de prendre le départ de la course samedi dernier et de s’imposer.


Au delà de la polémique des pilotes débutants, certains pilotes professionnels se retrouvent parfois au milieu du problème des dépassements, davantage en raison de la différence de vitesse entre les LMP1 et les GT2, par exemple. Ce sont notamment ces deux catégories qui ont été impliquées lorsque Manu Collard (Corvette n°64), excellent pilote mais surpris par un dépassement d’Anthony Davidson (Peugeot n°1), est parti à la faute. « Notamment dans les virages Porsche, ils ne veulent pas se laisser doubler alors qu'ils sont beaucoup moins rapides , confiait Davidson après cet incident. « Moi, j’ai gardé ma ligne et il a été surpris. » Rendez-vous donc en 2011 pour tous ces acteurs et ces voitures qui doivent cohabiter sur les 13 km du circuit du Mans.



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Le Mans, des pilotes « limites » ?