La Toyota GT 86 était tellement attendue que nous avons eu l'impression qu'elle jouait à l'Arlésienne entre deux salons, mais dès le début lors de la présentation du concept FT-86 au Japon à l'automne 2009, Toyota a toujours tablé sur une commercialisation en 2011. Soit, il a fallu patienter jusqu'à la toute fin d'année, et seule la clientèle japonaise a commencé à être servie à la suite de la présentation du modèle définitif au Salon de Tokyo et sur Caradisiac. Elle arrivera en France au début de l'été 2012, près de trois mois avant son homologue de Subaru.

Petit rappel, le coupé GT 86 doit son nom à la Corolla de 5e génération, la dernière à propulsion, et plus précisément à l' AE86 Trueno particulièrement prisée des drifteurs japonais.


Prise en mains -Toyota GT 86 : un petit régal sur piste

Fruit d'une étroite collaboration avec Subaru chez qui elle adopte le matricule BRZ sans autres changements que les boucliers, les sigles et quelques babioles, le GT 86 est un coupé 2+2 original -non dérivé d'une berline-, relativement léger, propulsion avec différentiel à glissement limité et quelques autres ingrédients qui caractérisent une vraie sportive. Le tout avec un comportement facile à cerner -parfaitement adapté pour faire ses premières armes sur circuit-, et un moteur plutôt modeste -mais sobre- afin de s'afficher à un tarif raisonnable à l'achat, et de proposer un coût d'usage sensiblement inférieur à une Nissan 370Z par exemple.

En piste


Le circuit de Jarama au Nord de Madrid n'est pas follement rapide, mais particulièrement séduisant, technique et vallonné. Ce tracé de 3,4 kilomètres inauguré par Jim Clark en 1967 et a été abandonné pour la F1 une douzaine d'années plus tard (en 1981, après une victoire de Gilles Villeneuve sur Ferrari) en raison de son étroitesse…


Dès les premiers kilomètres bien installés dans les semi-bacquets, le plus surprenant à bord du GT 86 provient des suspensions franchement souples -en comparaison de vraies ou de fausses sportives de puissance comparable- qui n'engendrent pourtant pas des mouvements de caisse marqués. Cette prouesse tient notamment à un centre de gravité bas et un poids raisonnable, non à des barres antidévers au diamètre de pipeline. Le centre de gravité a effectivement été soigné, il se situe à seulement 460 mm. Pour donner une idée, le coupé Porsche Cayman grimpe à 482 mm et l'Impreza malgré son boxer dépasse 530 mm. Quant à la masse de l'engin, elle est relativement contenue, aux environs de 1 200 kg. Certes, c'est bien plus que les petites Lotus Elise et Exige, mais des coupés au gabarit très proche comme la Volkswagen Scirocco 2.0 TSI 211 chevaux affiche une centaine de kilos supplémentaires, plus encore pour un coupé BMW Série 1 (120i et 125i), voire près de trois quintaux de plus dans le cas du Nissan 370Z -dont il est vrai la structure, les freins, etc., doivent digérer des performances sensiblement plus élevées.


Prise en mains -Toyota GT 86 : un petit régal sur piste

L'amplitude mesurée du roulis provient aussi du choix des pneumatiques. C'est la deuxième surprise de cette auto, chaussée en 17 pouces avec les Michelin Primacy HP de la Prius, et non de Pilot Exalto ou de Sport 3. Ce choix a priori incongru rend le comportement encore plus prévisible (la glisse précoce et progressive diminue la prise de roulis), permettant de se familiariser avec le GT 86 les premiers milliers de kilomètres. L'adhérence latérale plus faible que des enveloppes sportives nuit bien sûr à l'efficacité, mais rien n'empêche de passer par la suite à une monte au grip d'enfer selon les ingénieurs de Toyota qui ont évidemment procédé à des batteries de tests avant d'homologuer le Primacy.


Le comportement fait preuve d'un bel équilibre, bien aidé par une répartition des masses 47/53 proche de l'idéal. Les réactions sont prévisibles, bien plus saines que celles d'une Mazda RX-8 par exemple. On note une bonne vivacité sur les changements d’appui, la facilité à provoquer du survirage à l’inscription, un différentiel à glissement limité qui officie discrètement (taré assez faiblement afin de ne pas trop perturber les conducteurs peu expérimentés sur le mouillé ?) et apporte une belle motricité..., bref que du bonheur. L’angle de roulis est bien contenu, et comme la vitesse de ce roulis l’est également, il est facile d'entretenir la glisse, sans dépasser le bon angle de dérive sanctionné par un tête-à-queue.

Prise en mains -Toyota GT 86 : un petit régal sur piste

La bête n'est donc pas méchante, et constitue un excellent engin d'initiation au pilotage. Tout cela le VSC off évidemment. Le plus rageant, c'est que j'ai passé une bonne partie de ma séance d'essai à chercher comment enlever entièrement ce satané contrôle de stabilité à trois positions : on, sport et entièrement déconnecté. Ce qui me permet au moins d'avancer que la position intermédiaire semble trop intrusive sur le sec, mais se laissera apprécier en conduite de tous les jours sur le mouillé.



Pour le reste, la direction nous a paru bien calibrée, précise, avec une montée en effort linéaire. Bons freins, facile dosage de la pédale qui réagit à l’effort exercé, et non pas à la profondeur de la course, endurance excellente (plaquettes racing pour notre séance d'essai ?) que l'on espère retrouver sur la version de série. Petit bémol pour le vrai frein à main, qui peut provoquer un douloureux contact des phalanges contre la console centrale lorsqu'on le desserre. C'est un des très rares défauts d'ergonomie du coupé, avec la ceinture qu'il faut aller chercher très loin derrière.

Prise en mains -Toyota GT 86 : un petit régal sur piste
Prise en mains -Toyota GT 86 : un petit régal sur piste

D'un autre point de vue, les larges portières et le pilier B reculé autorisent un accès aux deux places de secours pas vraiment pénible. Evidemment, nous avons affaire là à un coupé 2 + 2, mais l'habitabilité n'est pas du tout indécente pour une longueur hors tout de 4 240 mm.


Moteur Toybaru réjouissant


Le moteur à architecture boxer cher à Subaru a été retenu afin d'abaisser le centre de gravité. Cet atmosphérique possède néanmoins des gènes Lexus puisqu'il adopte une double injection indirecte et directe comme la plupart des moteurs de la marque premium du groupe Toyota. Cette injection concourt à un bon rendement et à un niveau d’émission appréciable de 173 g/km de CO2 avec la bvm6, à peine un gramme de plus que la Volkswagen Scirocco 2 II 2.0 TSI 211. Compte tenu du poids moindre du GT 86, on peut avancer que malgré la technologie Toyota/Lexus, un boxer continue d'offrir un rendement énergétique moindre qu'un 4 cylindres en ligne. Mais bon, par rapport aux 2 litres atmo pur Subaru antérieurs, les progrès sont considérables. Il en ressort une consommation moyenne normalisée de 7,4 l/100. Après la séance circuit musclée, l'OBD affichait à peine 17,5 l/100.


Prise en mains -Toyota GT 86 : un petit régal sur piste

Carré (alésage égal à la course), ce quatre cylindres est particulièrement vivant jusqu'aux alentours de la puissance maxi atteinte à 7 450 tr/mn. Pas les envolées du regretté 4 pattes de la Honda S2000, mais on dispose toutefois d'une mécanique déjà clairement typée sport. Cela transparaît peu à l'extérieur (moteur et échappement très silencieux), plus à bord mais sans excès de décibels, distillant une sonorité plaisante bien qu'assez éloignée du timbre des boxers purement Subaru.



Sans être franchement creux, ce 2 litres manque un peu de couple (205 Nm à 6 600 tr/mn). Ce défaut est compensé par la boîte manuelle six rapports à l'étagement suffisamment serré et par une masse à mouvoir contenue. On eut aimé un rapport de pont encore plus court sur circuit, mais ce serait too much en conduite de tous les jours. A signaler qu'en France, on échappe à la boîte longue prévue pour certains marchés.


Prise en mains -Toyota GT 86 : un petit régal sur piste

Nous avons très rapidement testé la GT 86 avec la boîte automatique à six rapports et palettes au volant. Elle nous a semblé très réactive et appropriée à une conduite ludique. Après 7 kilomètres, on se dispensera de conclusions hâtives, mais pour ceux qui ne maîtrisent que partiellement le talon/pointe ou ceux qui ont peur de se lasser de l'excellente commande de la manuelle (petit levier aux débattements courts et aux verrouillages fermes), c'est certainement une bonne alternative.


Environ 1 200 kg pour 200 ch (1 180 kg selon Toyota en configuration de base non retenue en France), cela donne un rapport poids/puissance de vraie sportive. Avec 6 kg/ch, la GT 86 reste derrière le coupé 370Z (4,6 kg/ch), mais fait mieux que la Lotus Elise 1.6 de base (875 kg pour 136 chevaux). Grâce à la bonne motricité, le coupé GT 86 devrait accélérer correctement, et selon notre chronopifomètre, le 0 à 100 km/h est avalé en un peu moins de 7 secondes.


Prise en mains -Toyota GT 86 : un petit régal sur piste

Nous n'avons pas atteint les 230 km/h et des poussières annoncés en vitesse maxi, mais on arrive en fin de ligne droite du circuit de Jarama à un peu plus de 200 km/h en cinquième, bien aidé par la descente du début et la boîte bien étagée. Des perfs très convenables, et bien suffisantes pour se faire plaisir sur route, un peu juste pour faire monter l'adrénaline sur certains circuits comme celui de Jarama. Pour la version turbo ou à compresseur 250 chevaux, il faudra certainement attendre 2013 et peut-être voir chez Subaru si le concept Sti présenté aux States l'an dernier a une suite.


La version qui sera commercialisée en France à partir de juillet bénéficiera d'un équipement assez complet et sera en conséquence un peu plus pondéreuse que la basique, certainement un peu plus de 1 200 kg. Un seul degré de finition est prévu chez nous, avec une possibilité de packs supplémentaires pour améliorer l'ordinaire.

Nous nous risquerons à un pronostic sur le tarif en France : 28 900 €. A mille euros près, nous ne devrions pas être très loin du prix définitif qui sera annoncé au courant du printemps. Si on compare à la concurrence des rares coupés propulsion de constructeurs généralistes, c'est bien, excellent face à un coupé BMW Série 1 (120i ou 125i), mais encore un peu cher pour la clientèle jeune à laquelle le GT 86 est censé s'adresser.


Prise en mains -Toyota GT 86 : un petit régal sur piste

Est-elle bien la voiture plaisir abordable que de nombreux passionnés attendaient depuis des années ? Après ce premier galop d'essai, on peut pronostiquer que oui. Apparemment sans vices cachés -ou alors ils le sont parfaitement ! -, elle distille un véritable plaisir de conduite -et de pilotage malgré une puissance un peu juste-, et semble réaliser un parfait compromis entre une Lotus Elise/Exige trop radicale et une Hyundai Genesis trop bourgeoise. Bref, le coupé GT 86 semble un engin bluffant de polyvalence, un petit régal sur piste, prometteur en dehors, a priori utilisable au quotidien sans sacrifices.

Il ne reste plus qu'à la tester plus longuement sur route au début de l'été afin de confirmer ces premières impressions, et à connaître les tarifs définitifs, qui à notre avis seront très proches de la BRZ.