En s'attaquant au code, le ministère des Transports a décidé de prendre des risques, car avec près de 1,5 million de personnes passant leur permis chaque année, c'est une réforme délicate qui attendait Jean-Claude Gayssot.

Les différentes séries de diapositives qui étaient employées jusqu'à présent dans les auto-écoles dataient de 1972, elles avaient par conséquent besoin d'un bon coup de dépoussiérage. C'est chose faite désormais. Les diapositives avec les Peugeot 404, les Citroën DS ou les Dauphine vont pouvoir être reléguées au grenier. Pour remédier à ce vieillissement, le ministère a concocté une petite réforme. Depuis le 19 février, les auto-écoles de six départements (Paris, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne, Vienne et Isère) testent donc un nouveau dispositif. Ce projet devrait être généralisé à l'ensemble du territoire vers la fin de l'année. Pour ceux qui douteraient encore de l'esprit d'initiative de Jean-Claude Gayssot, le ministre est déjà en train de nous concocter une nouvelle petite réforme visant aussi l'examen du permis, avec la mise en place d'une épreuve orale. Les candidats seront interrogés sur un thème bien précis de la sécurité routière et se retrouveront, par conséquent, dans une situation analogue à ceux passant le permis moto.

Une évolution plutôt qu'une refonte

La réforme du code voulue par le ministère des Transports tient en trois points :

De nouvelles questions

- La principale nouveauté concerne l'introduction de nouvelles questions. Fini le temps où apprendre bêtement le code de la route était synonyme de réussite. Désormais, l'accent est mis sur l'apprentissage du “bon comportement” au volant. Le candidat est mis en situation et doit choisir, parmi les réponses proposées, celle(s) qui lui semble(nt) la(les) plus judicieuse(s). Ce projet veut donc éliminer toute notion de bachotage afin de privilégier le sens pratique et l'intelligence du candidat. Voici un exemple de nouvelle question :

Caradisiac a passé le nouveau code de   la route

Je peux trouver ce signal de danger :

- au bord des routes


OUI__A

NON__B

- sur la boîte de certains médicaments


OUI__A

NON__B

(NDLR : la bonne réponse est "sur la boîte de certains médicaments)

A noter également : les énoncés de cinq lignes disparaissent au profit de phrases plus simples.

Ex. : “Vous vous trouvez sur une route prioritaire, devez-vous laisser passer la voiture bleue qui veut tourner à gauche ?” devient : “Vous vous trouvez sur une route prioritaire, devez-vous laisser passer la voiture bleue ?”

Plus besoin de signaler que la voiture bleue en question veut tourner à gauche, le candidat le voit sur l'écran, avec les clignotants qui se mettent en action.

La nature des sujets abordés évolue également. Une large place semble avoir été accordée aux facteurs à risque comme la pluie, le verglas ou la fatigue. De nouvelles catégories d'usagers apparaissent également dans les questions : les personnes âgées ou les handicapés physiques deviennent des usagers à part entière.

De nouveaux outils de projections

Caradisiac a passé le nouveau code de   la route

Ce souci d'efficacité et de clarté se retrouve également au niveau de la projection, avec l'utilisation par certaines écoles de CD-ROM, de CD-I et même parfois de vidéo. Ces nouveaux moyens technologiques permettent, entre autres, une meilleure visualisation de l'image et des animations.

Le moniteur au cœur de l’apprentissage

Enfin, le dernier point important de cette réforme concerne la revalorisation du métier de moniteur. Parfois, dans certaines écoles, les candidats devaient se débrouiller tout seuls pour apprendre leur code, la machine ayant remplacé l'homme. Retour à la tradition, avec des séances corrigées par un moniteur qui explique les erreurs. Il est vrai qu'un ordinateur, aussi moderne soit-il, ne remplacera jamais un vrai dialogue. La chasse au tout-électronique est donc commencée.

Caradisiac a passé le nouveau code de   la route

Testé pour la première fois le 19 février, ce code réformé a déjà fait une véritable hécatombe. Au petit jeu des statistiques, les chiffres sont cruels : avant la réforme, le code affichait un taux de réussite de plus de 65 % ; depuis, 37 % seulement des candidats testés réussissent leur examen. Pourtant, le nombre de fautes maximum n'a pas changé, car au-delà de cinq erreurs, il faudra recommencer…

Caradisiac a passé le nouveau code de   la route

L'avis d'un professionnel

Nous avons interrogé Alain Maréchal, qui est moniteur et vice-président du CNPA (Conseil national des professions de l'automobile), section formation des conducteurs.

Caradisiac : Cette réforme vous semble-t-elle nécessaire ?

Alain Maréchal : Oui et cela pour trois raisons. Tout d'abord, les élèves étaient surpris de voir de vieilles voitures sur les diapositives. Deuxièmement, il y avait, sur certaines images, un problème de netteté. Enfin, deux à trois questions par série n'étaient plus valables, car la législation avait changé. Il fallait donc réagir, et cette réforme tombe très bien.

Caradisiac : Selon vous, est-ce un nouveau code ?

Alain Maréchal : Non, c'est une réactualisation. Il y a principalement un changement dans la formulation car le ministère a changé le contenu des questions. Désormais, on accorde davantage d'importance à la notion de danger et à la pratique avec, par exemple, des questions sur la position de conduite.

Caradisiac : Vous faites partie des écoles qui testent cette réforme, comment réagissent les élèves ?

Alain Maréchal : Au départ, nombre d'entre eux ont été surpris car ils se faisaient recaler pour deux ou trois fautes. Les premiers examens ont même été sanglants car on avait beaucoup d'échecs ; maintenant cela va mieux, mais les statistiques nationales sur les trois mois d'expérimentation restent bien en deçà de celles de l'ancienne formule. On voit bien à présent que le rôle du moniteur est essentiel. Grâce à cette réforme, il va même devenir primordial.

Caradisiac : Y a-t-il des choses à améliorer encore ?

Alain Maréchal : Oui, il faudrait augmenter l'interactivité car, malgré les progrès, l'élève est trop statique. La vidéo devrait se développer, mais cela demande des investissements que toutes les écoles ne peuvent pas assumer. Par ailleurs, le délai de passage à l'examen est trop important et cette situation ne va pas s'arranger avec cette réforme. Qui dit plus d'échecs dit plus de candidats par la suite. Seul avantage : le délai au permis va se réduire car il y aura moins de candidats, du fait d'un taux d'échec plus important au code.