A l’heure des bilans financiers de l’année 2008, toutes les entreprises françaises liées à l’automobile ne sont pas forcément dans le rouge. Il y a par exemple Total, qui a dévoilé ses résultats hier : 13,9 milliards d’euros de résultat net, soit un progrès de 14% et le plus gros bénéfice jamais dégagé par une entreprise française.

Néanmoins, le quatrième trimestre 2008 aura pourtant été moins bon qu’en 2007 (38,7 milliards d’euros contre 43,2), principalement à cause de la baisse du prix du baril jusqu’à 35 dollars après une pointe à 147 dollars en juillet. Mais la moyenne sur l’année s’est établie à 97 dollars, à comparer avec les 72 dollars de moyenne du baril en 2007, ce qui explique à elle seule une grande partie de l’augmentation de ses bénéfices, le reste s’expliquant par ses marges de raffinage supérieures de 38% par rapport à l’année précédente. Merci le diesel !

Au final, le chiffre d’affaire pour 2008 du groupe pétrolier, le cinquième mondial, s’établit à 179,98 milliards d’euros contre 158,75 milliards un an plus tôt.

Et 2009 s’annonce sous les meilleurs auspices. Avec "plus de 18 milliards de dollars en 2008", selon Christophe de Margerie, directeur général, investis pour préparer l’avenir sur le long terme et autant prévus pour 2009, Total est une entreprise qui ne connaîtra certainement pas la crise, même si le prix du baril devrait rester sous la barre des $40 cette année.

Après la publication de ces chiffres donnant le tournis, un véritable débat s’est engagé sur que faire de tels profits. Total devrait augmenter les dividendes de 10% pour ses actionnaires cette année, leur redistribuant 37% de ses bénéfices net, et procéder à des embauches pour venir grossir les rangs de ses 96 400 employés dans le monde, même si Hutchinson, filiale du groupe, vient d’annoncer 216 suppressions d’emplois. Mais des voix s’élèvent, comme chaque année à l’annonce des résultats du groupe pétrolier, pour proposer d’autres idées qui pourraient fortement déplaire à aux actionnaires.

Certains demandent une "taxe exceptionnelle", comme François Carlier, directeur adjoint des études à UFC-Que Choisir, de la même forme que celle imposée par Jimmy Carter aux groupes pétroliers dans les années 80. François Carlier reproche de plus à Total de ne pas assez investir dans les capacités de raffinage, ce qui aurait pour effet de diminuer les marges et donc le prix à la pompe.

D’autres, comme Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, aimerait qu’une partie de ces bénéfices soit investie "dans des systèmes d'intérêt général qui créent de l'emploi", parce qu’"il ne peut pas y avoir que l'Etat, que les syndicats, que les gens en difficulté qui adaptent leur comportement en période de crise".

Ségolène Royal, présidente PS de la région Poitou-Charentes propose ni plus ni moins que d’en redistribuer la totalité : "Je demande qu'il y ait un tiers pour les consommateurs sous forme soit de baisse de prix de l'essence, soit de prime aux consommateurs, un tiers à la recherche et à l'investissement et un tiers à l'écologie".

Du côté du ministère de l’Economie, Christine Lagarde se réjouit "qu'il y ait des entreprises en France qui réussissent, qui fassent des profits", comme elle l’a dit aujourd’hui sur l’antenne de RTL. Elle attend toutefois de voir ce que va être fait d’une telle manne financière en terme d’investissement et d’embauche, même si elle estime ne pas avoir à porter "de jugement sur la répartition telle qu'elle est décidée par les actionnaires dans un groupe privé". Sans surprise, Laurence Parisot, présidente du Medef, a qualifié ces nouvelles de "formidables" hier sur RMC : "c'est une excellente nouvelle de voir nos entreprises gagner de l'argent".