Marie-Aimée Moindrot, psychologue, anime des stages destinés à sensibiliser des conducteurs sanctionnés pour conduite dangereuse. Son cheval de bataille : s’élever contre des idées reçues dont les conséquences sont parfois dramatiques. Elle s’adresse à des personnes qui, en toute bonne foi, se considèrent comme de bons conducteurs. Car c’est bien connu, l’enfer c’est toujours les autres.

Interview de Marie-Aimée Moindrot, psychologue.

L’alcool au volant ?

Pour beaucoup, c’est un fléau qui concerne le jeune, l’inconscient, le fêtard invétéré .Mais soi-même, après quelques verres ? On se rassure vite sur sa propre conduite. Mon rôle est précisément de faire prendre conscience aux personnes présentes que l’alcool est dangereux avant même qu’ils le réalisent, avant même que les autres le perçoivent. Mon credo est donc le suivant : ne vous fiez pas à ce que vous ressentez ; ce "ressenti" n’offre aucune garantie sur votre état réel. Un individu dont le taux d’alcoolémie varie de 0,60 à 1,20 gramme se sent pleinement confiant. Parfois, il se sent même mieux que d’habitude, moins stressé, plus conquérant. Il n’a pas conscience que l’alcool a une influence sur ses capacités physiques. Pour ébranler les plus incrédules, je leur répète qu’avec ce taux d’alcool : leur vision sur les côtés est altérée, leur temps de réaction en cas d’imprévu est rallongé, leur capacité à se remettre de phares éblouissants est réduite. Mauvaise réaction, mauvaise coordination des gestes l’accident est vite arrivé.

Ces mises au point, permettent de faire passer le message. En général, au fil des discussions, chacun reconnaît que l’alcool au volant est dangereux.

D’autres préjugés ont malheureusement la vie encore plus dure. Les effets pervers de l’ABS et de l’airbag.

Prenons l’ABS

Cette technologie est un vrai gage de sécurité : elle améliore la tenue de route lors d’un freinage brutal. Mais elle ne permet pas de réduire la distance de freinage sur sol sec. Sur sol mouillé, l’ABS réduit la distance de freinage de seulement 5 % . Les conducteurs bénéficiant de ce type de freins sont pourtant persuadés qu’ils peuvent freiner plus rapidement. Ils ont donc tendance à moins respecter les distances de sécurité. Même effet pervers pour l’airbag qui remplacerait avantageusement la ceinture de sécurité. L’airbag n’est qu’un complément à la ceinture, rien de plus ! C’est la ceinture qui permet de rester solidaire de l’habitacle conçu pour résister aux chocs. L’airbag, lui, protège simplement du volant. C’est déjà bien mais il ne faut pas lui en demander plus ! Le conducteur parfait n’existe pas mais chacun est persuadé de l’être... Chacun se permet de transgresser le code de la route de temps en temps, à sa convenance, quand il fait beau et que la route est dégagée, quand il fait nuit et qu’il n’y a plus personne, quand un camion se traîne sur une nationale et que le temps presse.

A chacun donc de se remettre en cause. A chacun de se demander pourquoi il ne met pas son clignotant, pourquoi il accélère dès que le feu passe au rouge. Pourquoi un jour il est exaspéré quand les autres se traînent et pourquoi le lendemain il est stupéfait de l’agressivité de ceux qui ne savent pas prendre le temps de vivre.

Source: www.doctissimo.fr