Monter à bord demande de franchir les spectaculaires portes en élytre. C'est très peu pratique et ça ne sert à rien, mais c'est tellement évocateur que c'est finalement indispensable dans une voiture qui a tout d'une soucoupe roulante. Une fois installés au fond d'un baquet enveloppant, coincés entre le large ponton d'un côté et le tunnel de transmission hébergeant en fait ici la batterie, les habitués de la i3 ne seront pas dépaysés avec deux écrans massifs dominant l'habitacle, l'un jouant le rôle du combiné d'instrumentation, l'autre relayant le système iDrive. Ayons cependant le sens des priorités pour un tel véhicule : nous détaillerons l'équipement à la page suivante, place maintenant à la conduite. Enfin pas vraiment maintenant, puisqu'il faut d'abord choisir un mode ou une combinaison de modes parmi ceux proposés, du plus sage au plus énervé, constituant autant de facettes de la personnalité de l'i8.


Essai vidéo - BMW i8 : visiteur du futur

Le mode eDrive assure un fonctionnement 100 % électrique et peut être choisi en sus des modes Eco Pro (alimentation électrique optimisée des organes secondaires et des équipements comme la climatisation, les sièges chauffants et les rétroviseurs, et récupération de l'énergie au freinage ou en fonctionnement roue libre) et Confort (équipements disponibles sans restriction et récupération de l'énergie seulement au freinage). Ainsi, la i8 est une paisible traction 100 % électrique pouvant atteindre 120 km/h avec une autonomie allant jusqu'à 37 km (comptez sur une grosse vingtaine dans la réalité), le moteur thermique ne se déclenchant que sous un certain seuil ou en cas de forte sollicitation de l'accélérateur. Les modes Eco Pro ou Confort seuls, sans le eDrive, combinent les moteurs thermique et électrique, transformant alors la i8 en aimable hybride consommant 2,1 l/100 km en mixte et émettant 49 g/km de CO2, permettant de décrocher le bonus de 4 000 €. L'autonomie s'établit alors à 440 km, voire même 600 km avec le réservoir de 42 l en option, au lieu de 30.


Mais le mode qui nous intéresse véritablement, on ne va pas se le cacher, c'est évidemment le mode Sport s'activant en basculant le sélecteur de vitesses vers la gauche, où les moteurs thermique et électrique s'associent avec la performance comme seul objectif. Les compteurs passent d'un doux bleu à un rouge vif (mais le manque de contraste les rende malheureusement difficile à lire), le moteur thermique s'ébroue bruyamment, l'accélérateur se fait plus réactif, les temps de passage des rapports, maintenant manuels via des palettes derrière le volant, deviennent plus courts, les amortisseurs pilotés se raidissent et la direction change de cartographie.

Dr Jekyll sous Tranxen devient Mr Hyde sous Extasy : maintenant, on se retrouve au volant d'une GT digne de ce nom. Le moteur électrique se charge alors de lisser la courbe de couple du thermique pour faire disparaître tous les trous ou pics qu'on serait en droit d'attendre d'un moteur de petite cylindrée à gros turbo pour obtenir au final une poussée instantanée et avec la linéarité d'un avion de ligne au décollage. On n'a pas l'impression d'être assis sur un baril de poudre mis à feu, plutôt sur une catapulte médiévale, une sensation normalement typique d'une puissante voiture 100 % électrique. Et c'est plutôt efficace : BMW annonce en effet 4,4 s au 0 à 100 km/h et 2,6 s au 80 à 120 km/h, soit un dixième de plus sur les mêmes exercices qu'une Porsche 911 Carrera 4S PDK de 400 ch ou qu'une Audi R8 V8 S-Tronic de 430 ch. Agréable à l'oreille, le bruit du 3 cylindres quand il est poussé vers la zone rouge est pour le moins étonnant, aussi artificiel soit-il, rappelant bien plus à l'oreille un flat6 de Zuffenhausen qu'une six cylindres en ligne typique de la marque.


Essai vidéo - BMW i8 : visiteur du futur

Le premier virage arrive alors et la légèreté de l'i8 se fait immédiatement sentir. Les freins (étriers fixes à 4 pistons et disques ventilés de 340 x 29,2 mm à l'avant, étriers flottants monopistons et disques ventilés de 340 x 19,2 mm à l'arrière) se rient de la masse et s'affranchissent de leur double tâche de ralentir et de récupérer de l'énergie sans que ça se sente à la pédale. Même raffermies en mode Sport, les suspensions gardent tout de même un peu de souplesse, la direction manque de consistance mais reste toutefois précise, et la voiture se place parfaitement en entrée de virage. On note rapidement qu'à la remise (franche) des gaz, c'est le train avant qui déviera vers l'extérieur plutôt que son homologue arrière, comme on le constate souvent dans les voitures à moteur central et pneus avant fins. C'est une i et non une M : il est clair que BMW a voulu en faire une GT orientée confort et longue distance plutôt qu'une pistarde aguerrie, mais une fois qu'on s'accorde à son rythme, elle reste tout de même tout à fait efficace et plaisante sur de petites routes de montagne, avec une agilité satisfaisante et une prédictibilité rassurante. La boîte de vitesses automatique de son côté remplit ses fonctions de façon convaincante à la montée des rapports mais se montre parfois flemmarde à la descente, ce qui peut être agaçant et la place largement en dessous de l'efficacité d'une PDK Porsche ou d'une S-tronic Audi.


Le rythme de l'essai et les exigences du tournage de la vidéo dans les environs de Milan n'ont pas permis de vérifier les consommations annoncées, mais l'ordinateur de bord affichait en instantané entre 2 et 3 l/100 km stabilisé à 120 km/h sur l'autoroute. Et jusqu'à 35 l/100 km pied au plancher en mode Sport.