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Décarbonation du transport routier : l'avis de Jean-Marc Rivera, Délégué général de l’OTRE

Organisation des flux, carburants alternatifs, transition énergétique. Jean-Marc Rivera, Délégué général de l’OTRE, l’Organisation des Transporteurs Routiers Européens, nous a accordé un long entretien en amont de son intervention, le 30 juin, lors du 7e Forum Electric-Road Business & Seminar.

Jean-Marc Rivera est le Délégué Général de l'Organisation des Transports Routiers Européens (OTRE) - Crédit OTRE
Jean-Marc Rivera est le Délégué Général de l'Organisation des Transports Routiers Européens (OTRE) - Crédit OTRE

Caradisiac : Vous participez à Electric-Road dans le cadre d’une séquence intitulée « Décarbonation de la chaîne logistique et transport : du transport lourd au dernier kilomètre ». Décarboner le transport lourd en France, c’est complexe ?

Jean-Marc Rivera, Délégué général de l’OTRE : Oui, c’est quelque chose de complexe, notamment car la décarbonation du transport routier n’est souvent envisagée, que ce soit d’un point de vue assez politique ou du point de vue du ressenti collectif, que sous le champ du verdissement des flottes.Certes, le verdissement des flottes reste un élément central pour améliorer les performances énergétiques du transport mais on occulte un autre pan, qui nous semble à nous tout aussi important et qui est relatif à l’organisation des flux de transport : comment le transport est-il organisé ? y-a-t-il aujourd’hui du transport inutile et est-ce qu’on créé du transport inutile ? les flux de transport sont-ils bien organisés ? […] Là, il y a un vrai débat et sur ces sujets-là, on reste encore un peu dans la réflexion ou dans l’incantation et on s’aperçoit que globalement, il n’y a pas une vraie prise en compte de ces questions-là.

 « Il est grand temps de récréer de la logistique de proximité »

Caradisiac : Justement, pour améliorer les performances énergétiques du transport sous l’angle de l’organisation des flux, vous émettez deux idées. 

Jean-Marc Rivera : Nous voyons deux grandes idées en effet. La première idée consiste à dire qu’il est grand temps de ramener la logistique en France, de recréer de la logistique de proximité, et cela pour diminuer les distances de circulation des marchandises. Plus on va ramener la logistique à proximité des lieux de distribution et moins nous aurons des distances à parcourir.

Nous nous interrogeons par ailleurs beaucoup sur le développement du e-commerce. Nous n’avons pas de difficultés à le voir se développer. En revanche, nous nous interrogeons sur le modèle dans lequel il se développe et qui se construit pour nous sur deux arguments (livraison dans des délais records et retour des produits gratuitement) qui ne nous semblent pas compatibles avec une vraie responsabilité de transition énergétique, avec une logistique et un transport vertueux […] Nous nous posons même la question de savoir s’il n’est pas plus pertinent de prioriser la livraison en points de relais plutôt que la livraison à domicile, ce qui nous permettrait de centraliser les livraisons et certainement de mieux organiser les flux de transports. Il faut absolument avoir une réflexion pertinente sur l’organisation des flux de transport et des prises de décision.

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Carburants alternatifs : "aucune énergie à prioriser plus qu'une autre"

Caradisiac : Parallèlement, sur le plan de la carburation, que dites-vous et quelles solutions alternatives proposez-vous pour décarboner efficacement et à son rythme votre filière ?

Jean-Marc Rivera : Nous disons que le verdissement des flottes dans un rythme raisonnable et assez rapide ne peut s’entendre qu’avec ce que nous appelons un mix énergétique. Il n’y a pour nous aucune énergie à prioriser plus qu’une autre. C’est-à-dire que nous regardons assez favorablement l’électrique et l’hydrogène, qui semblent aujourd’hui être les deux énergies plutôt mises en avant dans la décarbonation du transport, mais sur ces deux énergies, nous faisons (aux côtés des autres acteurs de la Task Force*) un constat relativement clair : si l’offre des constructeurs semble assez avancée, tout ce qui concerne les réseaux de distribution et d’avitaillement de ces énergies nous amène à dire que nous sommes sur des échéances lointaines, ce qui signifie que rien de dense n’est envisageable sur le segment des véhicules lourds avant 2040. 

Caradisiac : Vous pensez également à d’autres alternatives ?

Jean-Marc Rivera : Oui, nous pensons notamment que la filière gaz, et notamment tout ce qui concerne le biogaz, a tout à fait sa pertinence. Je pense d’ailleurs que certains ont peut-être condamné un peu trop vite cette filière. Aujourd’hui, c’est une filière dans laquelle les véhicules sont là et où un réseau de distribution a commencé à se mettre en place et où il y a une vraie volonté de continuer à développer ce réseau. Pour nous, il ne faut pas abandonner cette filière.

Parallèlement, il y a les biocarburants. On connaît les limites de production de ces énergies-là et nous n’avons pas de difficultés pour dire qu’il faut peut-être plafonner leur production pour ne pas que nos terres agricoles soient demain des terres qui soient plutôt dédiées à la production de carburants qu’à la production alimentaire. Mais pour autant, il faut faciliter l’usage de ces biocarburants, ce qui a été fait partiellement avec le B100 (Ndlr : Carburant 100 % végétal), qui a obtenu récemment la vignette Crit’Air 1 qui devrait lui permettre d’accéder notamment aux ZFE.

« Dire : "Plus de diesel dans des échéances proches" semble irréaliste »

Caradisiac : Le Parlement européen a programmé et voté la fin de vente des motorisations thermiques, du diesel en particulier, au cours de la prochaine décennie. Qu’en pensent les transporteurs routiers que vous représentez ?

Jean-Marc Rivera : Moi, je vais même aller plus loin que ce qu’a dit Bruxelles. Je vais simplement regarder ce qui a été dit en France à travers la Loi Climat et Résilience. Il y a deux articles aujourd’hui qui sont des « missiles » à destination du diesel. Le premier article cible la fin de vente des véhicules lourds à énergies principalement fossiles en 2040. Le deuxième article, lui, a pour objectif de supprimer le remboursement partiel de la TICPE (Ndlr : Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques) sur le diesel en 2030.

Pour ces deux articles-là, nous disons qu’il n’y aurait absolument pas de problèmes à les accepter si on était certains qu’on soit capable dans le même timing de pouvoir utiliser des véhicules qui ne roulent pas au diesel. Or aujourd’hui, tous les travaux de la Task Force nous démontrent que le diesel restera probablement l’énergie principalement utilisée (non pas parce qu’on le veut mais parce qu’on va être contraints) jusqu’en 2040. Dès lors, tout ce qui tend à vouloir dire « plus de diesel dans des échéances proches » nous semble assez irréaliste.

Caradisiac : Un mot sur votre présence au Forum Electric-Road. Elle est importante ?

Jean-Marc Rivera : Notre présence à Electric-Road est effectivement extrêmement importante car nous voulons très clairement continuer à afficher la volonté de notre secteur du transport routier d’aller vers la transition énergétique. Aujourd’hui, s’il y a des freins, ce ne sont pas des freins liés à l’absence de volonté des transporteurs. La volonté est clairement là. Il y a en revanche des freins, ce sont des freins de disponibilité de l’offre, et particulièrement de l’offre d’énergie. Nous voulons donc continuer à accompagner la filière électrique dans son développement mais nous voulons que cela se fasse dans un agenda qui soit crédible et réaliste.

 

*La « Task Force » dédiée au transport routier de marchandises est une concertation menée depuis le début de l’année 2021 par l’Etat, en lien avec les transporteurs, les constructeurs et les énergéticiens, sur le thème de la transition énergétique.

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