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L’industrie automobile se sert-elle de corps donnés à la science pour ses crash-tests ?

Dans Pratique / Sécurité

Stéphanie Fontaine , mis à jour

Le scandale du Centre du don des corps (CDC), qui a mis à jour l'existence d'un charnier en plein cœur de Paris, n'en finit pas de retentir. Parmi les derniers soubresauts en date, France 2 a découvert que des corps donnés à la science et conservés au CDC avaient servi lors de crash-tests automobiles. Est-ce que c'est vrai ? Est-ce que c'est légal ? Voici ce que peut en dire Caradisiac.

L’industrie automobile se sert-elle de corps donnés à la science pour ses crash-tests ?

26 novembre 2019, le scandale éclate au grand jour. L’Express révèle les conditions de conservation « indignes » des dépouilles confiées au Centre du don des corps (CDC), hébergé à l'université René-Descartes à Paris.

Les manquements sont gravissimes : les corps sont en décomposition avancée, dévorés par les rongeurs, entassés dans des chambres froides en panne. Sans parler de leur possible marchandisation !

« Comment ces hommes et ces femmes qui, noblement, ont fait don de leur corps à la science ont-ils pu se retrouver dans un tel cloaque ? », s’interroge l’hebdomadaire, qui dévoile ainsi l’existence d’un « charnier » en plein cœur de Paris, dans l’une des plus prestigieuses facultés de France.

Dans la foulée de ces révélations, le CDC, considéré comme le plus grand centre du don des corps d’Europe avec environ 600 dons par an, est fermé par la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Frédérique Vidal.

Le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire, transformée, quelques mois plus tard, en une information judiciaire pour « atteinte à l'intégrité du cadavre ». L’instruction est toujours en cours. Une centaine de familles se sont constituées parties civiles.

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Un scandale de plus de 30 ans

De 2019 à aujourd’hui, les détails sordides ont continué à se faire jour. Les sonnettes d’alarme étaient pourtant tirées depuis des années, a notamment révélé France Inter, mais rien n'a bougé pour mettre fin à ce scandale qui durait depuis plus de 30 ans, selon Paris Match.

En juin dernier, c’est au tour de France 2 de revenir sur un pan de l’affaire passé plutôt inaperçu jusqu’ici, même si LCI s’en était fait l’écho dès 2019 : « Nous avons découvert, entame l'Œil du 20h, que certaines dépouilles, censées faire avancer la recherche médicale, ont servi à des crash-tests pour l’industrie automobile. » Pour les familles, c’est une nouvelle douche froide… Glaciale, même.

Pour le démontrer, les journalistes de la chaîne s’appuient notamment sur le rapport de mars 2020 remis par l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS), qui avait été missionnée par Frédérique Vidal pour enquêter sur les conditions de fonctionnement du CDC au moment de l’éclatement de l’affaire.

Seule une synthèse de ce rapport a été rendue publique. Mais France 2 a pu le consulter en entier. C’est ainsi que l’on découvre qu’à l’article 132 de ce rapport, il est question de « la mise à disposition de corps pour des crash-tests dans le secteur automobile », et qu’au total, en 2019, « 37 % des revenus du Centre du don des corps provenaient de sociétés dont l’objet principal était industriel ».

Qu’en est-il vraiment ? La réalité n’est pas tout à fait celle qui a été racontée. Caradisiac a mené sa propre enquête. Et voici ce que l’on peut retenir sur le sujet.

L’université a-t-elle vraiment mis à disposition des corps de personnes décédées aux constructeurs automobiles ?

Non. Du moins, pas directement.

C’est le Centre Européen d'Études de Sécurité et d'Analyse des Risques, le CEESAR, qui était sous convention avec le Centre du don des corps (CDC) pour la mise à disposition de « sujets (...) nécessaires [à ses] travaux de recherches ».

Mais les constructeurs sont bien parties prenantes au CEESAR, d’où ce lien qui a été fait.

De quoi s’agit-il ? Le CEESAR est une association à but non lucratif, créée en 1992, qui selon ses statuts « a pour objet et vocation principale d'améliorer la sécurité routière, vocation élargie aux recherches d'intérêt général pour une mobilité sûre et durable, ainsi qu'à celles visant la sécurité des personnes vis-à-vis de tout risque d'accident ».

Les recherches qui y sont entreprises relèvent de la biomécanique des chocs. Selon les documents en notre possession, elles portent par exemple sur la compréhension des mécanismes lésionnels, l'évaluation des conséquences de positions non nominales [c’est-à-dire en dehors des recommandations des constructeurs] chez les occupants de véhicules par rapport aux systèmes de protection ou encore l'acquisition de données d'essai permettant de valider les modèles numériques d'êtres humains.

Structure de recherche scientifique reconnue, le CEESAR n'en est pas moins un organisme mixte. Il réunit certes des universités, des chirurgiens, des enseignants-chercheurs, mais pas seulement…

Sur son site Internet, il est d'ailleurs bien annoncé que ses membres fondateurs sont l'université Paris-Descartes, la grande école Centrale Supélec ET les constructeurs automobiles français, c’est-à-dire Renault et PSA Peugeot-Citroën, en plus de la fondation MAIF.

D’ailleurs, le siège du CEESAR est situé à l’adresse du LAB, le laboratoire d’accidentologie de Renault et PSA.

Le LAB et le CEESAR partagent les mêmes locaux
Le LAB et le CEESAR partagent les mêmes locaux

Ces corps servaient-ils aux crash-tests automobiles ?

Non, cela fait belle lurette que la pratique a disparu.

Ce qui sous-entend tout de même qu'elle a bel et bien existé !

Selon les informations recueillies par Caradisiac, elle a eu cours au moins jusqu'au début des années 90… Difficile d’être plus précis, quand toutes les personnes qui sont susceptibles de bien connaître le sujet refusent d’en parler !

Ni le CEESAR, ni les constructeurs automobiles n’ont en effet accepté de répondre à nos questions. Le sujet est sensible, notamment et surtout depuis la diffusion du reportage de France 2.

Parmi toutes les personnes sollicitées tant du côté des médecins, que du CEESAR, en passant par les constructeurs, mais aussi plus largement, les organismes effectuant des crash tests en France, comme l’UTAC, une seule a accepté de nous répondre en toute transparence : le professeur Claude Got.

Chef de service d'anatomie pathologique dans les années 70 à 80 à l'hôpital Raymond Poincaré de Garches, connu notamment pour la prise en charge des grands accidentés de la route, le médecin a aussi été le vice-président du CEESAR et le président de son conseil scientifique jusqu'en 2002. De fait, il a participé à la création de l’association.

Des crash tests pour quoi faire ?

C’est justement Claude Got qui a convaincu l’un de ses confrères, Claude Tarrière, médecin et créateur du LAB en 1969, de développer ces recherches en matière d’accidentologie dans la deuxième moitié des années 70.

À l’époque, il faut se souvenir que c’est l’hécatombe sur la route, avec près de 17 000 morts par an.

L’un comme l’autre sont convaincus que ces recherches scientifiques peuvent donc contribuer à l’amélioration de la sécurité des passagers, comme d’ailleurs des piétons, lors des accidents.

Et c’est ce qui s’est passé : « cela a été un succès extraordinaire », s’enthousiasme le professeur Got.

À l’époque, les patients qui décédaient à Garches étaient presque systématiquement autopsiés par ses soins.

« On avait une bonne compréhension des lésions causées dans les accidents, mais on avait une difficulté pour mesurer les vitesses et les forces. C’est comme ça qu’on a eu l’idée d’utiliser les corps donnés à la science. »

« Tout a été publié, tout est extrêmement précis. Ces recherches étaient fondamentales, et surtout rien n’a été dissimulé. Pour nous, c’était parfaitement clair, et tout à fait autorisé ! », poursuit Claude Got, qui nous renvoie sur une partie de ces publications citées sur son site Internet.

Il y en a une sur laquelle il souhaite tout particulièrement notre attention. Son titre est en effet assez évocateur : « Proposal for a thorax tolerance level in side impacts based on 62 tests performed with cadavers having known bone condition ». La recherche portait ainsi « sur la tolérance au niveau du thorax aux chocs latéraux basée sur 62 tests effectués sur des cadavres dont l'état osseux est connu ».

Cette étude fut publiée en 1982 lors de la 26e Stapp Car Crash Conference, le congrès international qui se tient chaque année aux États-Unis sur les accidents routiers. Et dans son intitulé, toutes les parties prenantes y sont clairement énumérées : Claude Tarrière du LAB Peugeot-Renault compris.

« Pour nous, il n’y avait aucune raison de considérer ces crash tests comme une anomalie sur le plan éthique », insiste-t-il.

Il lui revient d’ailleurs le souvenir d’une émission télévisée diffusée en 1978 sur la première chaîne, à l’époque publique, dans laquelle il s’en était largement expliqué.

Les images auraient de quoi choquer si elles étaient rediffusées aujourd’hui ! Il faut comme on dit avoir le foie bien accroché quand il nous présente celui justement d’un accidenté de la route qu’il vient d’autopsier.

Claude Got, lors d'une émission télévisée diffusée en 1978. Il y expose clairement ses recherches en matière d'accidentologie.
Claude Got, lors d'une émission télévisée diffusée en 1978. Il y expose clairement ses recherches en matière d'accidentologie.

Photos ainsi à l’appui présentant des corps de tués sur la route, Claude Got livre un vrai cours d’anatomie, face caméra, et formule ses hypothèses sur les raisons de ces décès.

Surtout, l'émission dévoile au grand public l'existence des reconstitutions de vrais chocs, via des crash tests automobiles, grâce aux dons des corps.

« Les téléspectateurs ont parfaitement compris l’intérêt de nos études, à l’époque, se remémore-t-il. Pour preuve, juste après cette émission, il y avait eu une recrudescence des dons ! »

Toutes ces autopsies, ces essais réalisés grâce aux moyens des constructeurs automobiles, qui selon ses souvenirs se sont surtout concentrés sur la période 1975-1985, ont été d’une importance telle qu’ils sont encore très utiles aujourd’hui : « Rendez-vous compte, ils servent toujours, 40 ans après ! »

La France était d’ailleurs en pointe sur ces recherches scientifiques. Et si elle a pu l'être, c'est aussi parce que ces dons à la science n'étaient pas forcément autorisés dans les autres pays.

L'idée de ces corps utilisés dans des crash tests a-t-elle toujours été bien acceptée avant ces dernières années ?

Si elle paraît acceptée dans les années 70 et même 80, elle est tout de même propice aux polémiques.

Le sujet nécessite bien évidemment d'être explicité, et surtout réalisé le cas échéant dans des conditions très strictes.

En 1998, par exemple, le quotidien britannique, The Sunday Times, avait relancé la problématique, en affirmant que Renault avait utilisé par deux fois, il y a une vingtaine d’années, des cadavres d'enfants dans des crash tests.

Il s'agissait alors de mettre au point des sièges de sécurité dos à la route.

Le professeur Got, interrogé par Le Monde à l'époque avait évidemment confirmé, sans sourciller, l'information. Tout en nuançant la responsabilité de Renault.

Car, comme au CEESAR ces toutes dernières années, c'est avant tout sous la houlette des médecins universitaires qu'étaient conduites ces recherches, dont Renault - mais aussi Peugeot - était partenaire.

Et, comme aujourd’hui, il assumait complètement, sur le plan de l'éthique, l'utilisation de corps humains dans des simulations d'accidents, dès lors que « les résultats sont immédiatement mis à la disposition de la communauté scientifique mondiale ».

Il précisait : « Nous avons fait deux expérimentations avec des enfants, pas plus. Elles nous ont apporté des enseignements précieux, car les mannequins anthropomorphiques étaient trop rigides pour refléter la réalité. »

Car c’est bien cela dont il s’agit : « développer des "mannequins de choc" fiables, qui n’auraient jamais pu exister s’il n’y avait pas eu ces crash tests », aux dires des observateurs. Claude Got va plus loin : « c’est parce qu’on en a fait cet usage, qu’aujourd’hui on peut s’en passer ».

Pour lui, si l’information choque aujourd’hui, c’est qu’elle n’est pas assez expliquée.

Mannequin de choc/50 ans du LAB
Mannequin de choc/50 ans du LAB

Qu'est-ce qui dérange vraiment les familles ?

C'est surtout l'absence d'information.

Sur cette affaire de crash tests - qui n'existent donc plus de toute façon depuis 20 ans -, c'est en tout cas ce qui paraît le plus perturber les familles, comme en atteste le témoignage poignant de la fille d'une mère décédée dans le reportage de France 2.

« Tout ça paraissait très beau sur papier, on leur dit : “vous allez servir à quelque chose de noble”. C’est un acte d’amour en fait. Bien sûr, on ne lui a pas dit : “vous allez peut-être servir pour des crash tests et être envoyée à 150 à l’heure dans un mur”. C’est clair qu’elle ne l’a pas su, évidemment. »

« Les familles sont déjà privées de recueillement, renchérit David Artur, fils de José Artur, homme de radio, lequel a fait don de son corps à la science, et là, on leur envoie l’image d’une bouillie intégrale de leur parent bien aimé ! »

Comme lui, à l'association Charnier Descartes Justice et Dignité pour les Donneurs, qu'il a participé à fonder pour réunir les familles à la suite de l'éclatement du scandale, ils sont nombreux à considérer que les donneurs n'avaient pas conscience de cette possible destination.

« En soi, les essais automobiles, s'ils ont été réalisés dans le cadre de véritables recherches scientifiques, c'est vrai que ça paraît acceptable, convient-il, mais ce qui pose problème, c’est sur le consentement… Les donneurs n’étaient pas au courant, leur libre arbitre a été lésé. Il pouvait y avoir des antimilitaristes, comme des anti-voitures parmi eux. C'est inacceptable de ne pas les avoir correctement éclairés. »

Il paraît assez évident que c'est là en effet où le bât blesse particulièrement dans cette affaire, c'est-à-dire dans la mise à disposition de ces corps à des entités extérieures à la fac, comme ici au CEESAR. Quand bien même il s'agissait bien d'un institut de recherche.

À la lecture des documents que le CDC remettait aux donneurs, il est permis de douter que l'information qui leur était transmise était suffisante. Déjà, il est bien rappelé que c'est à l'université Paris-Descartes que les corps sont donnés.

Et comme nous le confirme Élise Roumeau, docteur en droit privé, dont la thèse a porté sur les droits fondamentaux du cobaye humain, et qui a publié récemment une étude sur le sujet, relayée dans The Conversation, c'est sûr que ce manque de précision pose problème.

« De son vivant, la personne accepte de donner son corps à un établissement en particulier. Il n’est pas prévu que cet établissement puisse le mettre à disposition à l'extérieur de ses murs, d'autant plus à des structures privées, et de manière tarifée ! [au sujet de ces tarifs potentiellement problématiques, voir notre question "Combien ça coûte", ci-dessous] »

Si ce n’est pas aux crash tests, à quoi servaient les corps, au CEESAR ?

« Il n’y a pas de crash test, mais le corps humain est bien soumis à des chocs. Le terme de "crash" correspond simplement à l’écrasement du véhicule, mais là il n’y a pas de véhicule ! Ces recherches se font, disons, en laboratoire », nous explique un fin connaisseur de ce sujet, qui souhaite, comme tous les autres à part le professeur Got, rester anonyme.

Dans l’une des conventions signées entre l’université Paris-Descartes, « pour le compte du Centre du don des corps », et le CEESAR, que Caradisiac a récupérée, les recherches entreprises par l’association sont précisées en annexe.

Les recherches à venir et passées du CEESAR, à l'époque où le Centre du don des Corps fonctionnait
Les recherches à venir et passées du CEESAR, à l'époque où le Centre du don des Corps fonctionnait.

On comprend qu’il existe - ou a existé - des investigations pour la Direction Générale des Armées (DGA), que des études ont été menées sur les lésions pelviennes à partir de « dix-huit sujets humains post mortem soumis à des impacts latéraux obliques » ou encore qu'est recherchée la « personnalisation des tissus mous chez des sujets obèses (…) testés en choc frontal. »

On comprend aussi qu’à chacune de ces recherches, plusieurs publications scientifiques sont attachées.

Selon notre enquête, la mise à disposition des corps par le CDC au CEESAR a donné lieu à une centaine de publications scientifiques, entre 1997, année où commence vraiment son activité biomécanique, et la fermeture du CDC à la fin 2019.

Combien de corps le CEESAR a-t-il eu besoin pour ces recherches ?

Nous savons juste que le CDC a mis à disposition de l’association « 8 sujets » en 2018, 4 en 2017.

On sait aussi que le CEESAR avait besoin de corps entiers, même si les conventions, comme toutes les autres conventions passées par le CDC, évoquent la mise à disposition de « pièces anatomiques ».

Combien ça coûte ?

C'est le second point qui pose potentiellement problème, après celui de la piètre information transmise aux donneurs.

Comme le rappelle à Caradisiac l’avocat toulousain, Frédéric Douchez, qui défend la plupart des familles, parties civiles dans le volet judiciaire, « la marchandisation d’un corps est prohibée par la loi ».

Or, il est bien question de tarifs dans les conventions signées entre le CDC et le CEESAR. « Oui, mais il s’agit simplement d’une participation aux frais de mise à disposition des corps », nous rétorque une source anonyme.

En l’occurrence, en 2019, pour un sujet entier, cette participation s'élevait à 1 100 euros. Reste à savoir si ce niveau de frais correspondait vraiment à une réalité…

Le barème, fixé par le Conseil d’administration de l’université Paris-Descartes, n’a pas cessé d’évoluer ces dernières années. Avant 2016, selon nos informations, les frais de mise à disposition se montaient à 1 250 euros, puis ils ont été réduits, jusqu’en 2019, à 900 euros, avant de réaugmenter à 1 100 euros, comme indiqué précédemment.

L'évaluation de ces frais a-t-elle pour autant été scrupuleusement calculée, afin de pouvoir les fixer ? D’après notre enquête, on peut sérieusement en douter.

Mais comme pour le défaut d'information réservé aux donneurs, le CEESAR n’y pouvait de toute façon pas grand-chose…

Selon un témoin des dérives inacceptables du CDC, la convention avec le CEESAR ne l’a d'ailleurs jamais préoccupé : « pour le coup, il n’y a jamais eu de soupçon de "maltraitance" vis-à-vis de ces corps qui étaient ainsi respectés, comme il se doit, et qui servaient à des protocoles de recherche, dont il ne faisait aucun doute non plus qu’il étaient scientifiques », affirme-t-il.

Comment le CEESAR finance ses recherches ?

Alors là…

On aurait aimé mieux comprendre l’importance de Renault et PSA au sein de cette structure de recherche, mais comme déjà dit, tous ces acteurs n'avaient guère envie de s'exprimer sur le sujet.

De ce que l'on en sait quand même, le CEESAR vit grâce à des subventions publiques, surtout européennes, mais aussi et surtout grâce aux constructeurs et aux équipementiers (membres également de l'association). Dans quelle proportion ? Nous n'avons pas réussi à le déterminer.

Dans le cadre des projets de loi de Finances, il existe quand même quelques précisions sur le budget alloué, chaque année, aux « Études et recherches » en matière de Sécurité routière. En 2019 et 2020, cette dépense publique était ainsi évaluée à 1,31 million d’euros.

Sur cette allocation de plus d'un million d'euros, combien revenait au CEESAR ? Interrogée, la Sécurité routière nous a adressé ces précisions :

  • Pour l'étude Stupéfiants et Accidents Mortels (ActuSAM), lancée en juin 2014, achevée en 2016, d'un montant de 17 236,80 €, le CEESAR a récupéré 10 756,80 €.
  • Sur l'étude Utilisation du Smartphone en COnduite Manuelle et Automatisée (USCOMA), commencée en novembre 2020 pour un montant global de 214 472 € ayant fait l'objet d'une subvention DSR de 93 632 €, 49 200 € sont prévus pour le CEESAR.
  • THORAX est une étude sur le potentiel de réduction de lésions graves au thorax en prenant en compte la fragilité osseuse liée au vieillissement. Lancée en novembre 2020 pour un montant global de 377 482 € ayant fait l'objet d'une subvention DSR d'un montant de 153 455,17 €, le CEESAR doit toucher 12 312 €.
  • Quant au projet « Sécurité des Usagers de la Route et Conduite Automatisées » (SURCA), porté par l’Université Gustave Eiffel (UGE), « d'un montant de 934 K€ et pour lequel la DSR apporte un financement de 280,5 K€ », avec pour objectif de contribuer à une meilleure intégration de la Conduite Automatisée dans la circulation actuelle, il ne prévoit pas de financement direct de la part de la DSR au CEESAR, qui participe pourtant bien à ce projet.

Mais attention, prend-elle bien soin de nous préciser : « Aucun essai sur corps humain n’est effectué dans le cadre de ces études » !

En tout, entre 2014 et 2020, la DSR a ainsi versé quelque 72 270 euros au CEESAR, sur une enveloppe annuelle destinée à la recherche d'1,31 million d’euros… Ça ne fait pas lourd.

Que se passe-t-il pour le CEESAR depuis la fermeture du CDC ?

Selon nos informations, cette fermeture administrative sans préavis est un coup dur pour le CEESAR.

Un observateur avisé affirme que ce qui est arrivé « a tué le seul laboratoire qui faisait des recherches et publications scientifiques d'intérêt général sur des sujets humains post mortem (SHPM). »

Les activités du CDC et donc les dons des corps à la science vont-ils reprendre ? Et sous quel délai ?

Cela reste un peu flou.

Interrogé à ce sujet, le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche nous a indiqué que « le Centre de Descartes est définitivement fermé ». Pour autant, les dons à la science restent autorisés par la loi relative à la bioéthique, promulguée cet été.

Selon l’article L 1 261-1 du code de la Santé publique qui s'applique désormais en la matière, le don du corps, en effet, n’est pas limité aux seules fins d’enseignement. Il reste donc possible pour une finalité de recherche.

Mais où ? Quoi pour remplacer le Centre du don des corps de Paris-Descartes qui n'avait rien à voir avec les autres centres qui existent (car il en existe d'autres en effet, mais de toute petite taille) ?

« Ce don ne peut être effectué qu'au bénéfice d'un établissement de santé, de formation ou de recherche titulaire d'une autorisation délivrée par les ministres de tutelle de cet établissement. Les conditions d'ouverture, d'organisation et de fonctionnement de ces structures sont définies par décret en Conseil d'État », dixit l'article en question…

La publication de ce décret reste à venir. Celle-ci permettra d'y voir peut-être un peu plus clair.

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