Lors de la grève, les transports sont fortement perturbés (TGV, Corail, Eurostar, trains Thalys, tramway, métro, bus, RER) : du coup, les Français utilisent davantage la voiture. Le quotidien "Le Figaro" a fait deux articles détaillés sur les émissions polluantes supplémentaires engendrées par la grève : le premier article, daté du 16 novembre 2007, est une interview d'Olivier Carles (ingénieur, spécialisé dans les bilans carbone - il a participé à la mise au point de la méthode "Bilan carbone" de l'ADEME destinée aux collectivités) et le second article, paru aujourd'hui, évoque la compensation de CO2 des grévistes. Tout d'abord, voici l'entretien du "Figaro", Olivier Carles a calculé le bilan carbone des grèves :

" Le Figaro : Quelques semaines après le Grenelle de l’Environnement, la grève des transports a repoussé les habitants d’Ile-de-France vers leurs voitures. Peut-on calculer le coût écologique de cette grève ?

Olivier Carles : Habituellement, en semaine, 5 millions de Franciliens vont travailler. 500 000 y vont à pied, 2 000 000 en voiture et 2 000 000 en transports en commun. Ces derniers, en temps de grève, font un peu de marche à pied, mais se reportent majoritairement sur la voiture, et le covoiturage reste marginal. Les kilomètres de bouchons les jours de grève sont un indicateur supplémentaire. Au total, j’estime qu’en gros, il y a 1, 5 million de voitures en plus sur les routes d’Ile-de-France les jours de grève. En moyenne, elles parcourent 27 kilomètres dans la journée, ce qui nous donne au minimum 40 millions de kilomètres parcourus en plus, soit environ 10 000 tonnes équivalent CO2 de gaz à effet de serre rejetées dans l’atmosphère.

Pourtant, les transports en commun ne circulant pas, n’y a-t-il pas une économie de ce côté ?

Métros et RER sont très peu émissifs, puisqu’ils fonctionnent à l’électricité, dont 80% est d’origine nucléaire. Quant aux bus, même si à vide ils polluent plus qu’une voiture, leur coût écologique rapporté au nombre de passagers est plus faible que celui d’un véhicule particulier. Et certains RER ont d’ailleurs été remplacés par des bus, plus polluants. Sinon, il y a probablement eu quelques économies avec des déplacements annulés, bien que la plupart ont sûrement été simplement reportés. Ces économies sont donc tout à fait négligeables par rapport au surcroit de gaz rejeté par les voitures.

Pourrait-on imaginer des grèves plus propres ?

A chaque fois qu’il y a une grève SNCF, il faudrait presque organiser une grève des aiguilleurs du ciel pour compenser… C’est une boutade, mais dans le futur, il faut que chacun puisse s’organiser à l’avance les jours de grève pour trouver un moyen propre de se rendre au travail, et surtout mettre en place une « mobilité solidaire » efficace.

C’est-à-dire du covoiturage ?

Aujourd’hui, il n’y a que les jeunes à dreadlock qui pratiquent réellement le covoiturage. Dans la tête des gens, il y a encore des barrières psychologiques, car laisser un étranger rentrer dans sa voiture, ou monter dans celle d’un inconnu, est difficile. Il existe déjà quelques incitations financières. Et sur l’A10, par exemple, il y a un abribus et un parking qui relient le réseau départemental à l’autoroute. Les habitants y laissent leurs véhicules et terminent leur trajet en bus. Mais pour pousser à fond le covoiturage, on pourrait réserver les files de gauche, fluides, aux voitures pleines, tandis que les conducteurs qui rouleraient à vide devraient supporter les bouchons."

Désormais, voici des extraits du second article du Figaro :

"Les reports vers l’automobile ont généré l’équivalent de la consommation annuelle de 20 000 Français. La quasi-absence de transports en commun en Ile-de-France depuis huit jours a un effet désastreux sur l’effet de serre. Sur huit jours, c’est de 160 000 tonnes d’équivalent CO2 dont il faut parler. Soit l’équivalent des rejets annuels de gaz à effet de serre de 20 000 Français (8 tonnes par an et par habitant). Et encore, ces calculs ignorent nombre de paramètres, comme par exemple les acquisitions de deux-roues motorisés (+ 308 kg éq. CO2 par an comparé au tramway, a calculé un journaliste de l’Auto journal) ou – mieux – de vélos, qui modifient durablement les habitudes de transports. Les grévistes ayant mauvaise conscience ont encore la possibilité de procéder à une compensation carbone. Cela consiste à verser une somme sur des sites dédiés, comme actioncarbone.org, qui seront investis vers des projets dédiés à la lutte contre le changement climatique. Pour compenser ces 160 000 tonnes de CO2, il leur en coûtera la modique somme globale de 145 000 euros (49 400 euros après déduction fiscale). À raison de 18 % en moyenne de grévistes parmi les 238 000 salariés de la SNCF et les 44 860 de la RATP, soit 50 000 environ, cela ne fait jamais que 2, 90 euros par gréviste. Messieurs, à votre portefeuille !"

(Source : Le Figaro Photo : Marmara/Le Figaro)