Signe des temps, c'est à Moscou qu'est dévoilé aujourd'hui le calendrier Pirelli 2011 avant sa présentation officielle à Paris courant janvier. La 38e édition de ce calendrier connu à travers le monde est l'œuvre du grand couturier Karl Lagerfeld qui a choisi d'immortaliser plusieurs de ses connaissances dans son studio parisien en ayant pour fil rouge les légendes et les mythes de la mythologie gréco-romaine, les dieux et déesses. Le Calendrier 2011 est d'ailleurs baptisé Mythology.

Dans un format noir et blanc, conforme à son image et à son ambition d'approcher au plus près les représentations sculpturales de ces dieux et déesses, Lagerfeld immortalise 20 nus dont Julianne Moore l'actrice, les italiennes Bianca Balti et Elisa Sednaoui, la danoise Freja Beha Erichsen, la brésilienne Isabeli Fontana, les polonaises Magdalena Frackowiak et Anja Rubik, l’australienne Abbey Lee Kershaw, l’indienne Lakshmi Menon, les américaines Heidi Mount et Erin Wasson, la russe Natasha Poly, la hollandaise Lara Stone e la canadienne Daria Werbowy (qui n'est pas Carla Bruni !), l’autrichienne Iris Strubegger et la jamaïcaine Jeneil Williams. Plusieurs d'entre elles ont déjà posé pour le Calendrier Pirelli les années précédentes.

5 hommes se retrouvent dans ce calendrier : les français Baptiste Giabiconi et Sébastien Jondeau, des américains Brad Kroenig et Garrett Neff et de l’anglais Jake Davis.

Pour nous faire patienter, Pirelli nous « offre » 6 images sur les 36 clichés réalisés pour l'occasion, ainsi qu'un interview de Karl Lagerfeld par Fredéric Beigbeder que je vous livre à la suite.


Les 6 images sont :

  • 01 Hera : Calendrier Pirelli by Karl Lagarfeld - Julianne Moore


  • 15 Flora : Calendrier Pirelli by Karl Lagarfeld - Elisa Sednaoui


  • 18 Athena : Calendrier Pirelli by Karl Lagarfeld - Iris Strubegger


  • 23 Ajax : Calendrier Pirelli by Karl Lagarfeld - Erin Wasson


  • 31 Apollo : Calendrier Pirelli by Karl Lagarfeld - Baptiste Giabiconi


  • 34 Artemis : Calendrier Pirelli by Karl Lagarfeld - Daria Werbowy





Calendrier Pirelli 2011 par Karl Lagerfeld : les 6 premières images

Depuis plus de 40 ans, la marque Pirelli donne chaque année carte blanche à un grand photographe pour immortaliser les plus belles femmes du monde. Au départ l’idée était d’offrir un sublime cadeau pour motiver la force de vente ! Aujourd’hui le calendrier Pirelli est devenu un objet de collection luxueux en même temps qu’un symbole de notre société. Chaque année, cette authentique oeuvre d’art constitue un baromètre reflétant l’évolution de la féminité dans notre siècle. Premiers seins nus en 1972, interruption de 1974 à 1984 à cause de la crise pétrolière : l’histoire du calendrier Pirelli raconte aussi la nôtre. Toutes les plus grandes stars de la mode y ont collaboré, incarnant la beauté de chaque époque. C’est devenu un élément de la mythologie contemporaine. Il était logique que Pirelli s’adressât un jour au grand créateur Karl Lagerfeld, puisqu’il est à lui seul une légende, en même temps qu’un catalyseur de tendances. Premier couturier de la liste à s’être prêté au jeu (allant jusqu’à créer des accessoires et bijoux spécialement pour cette occasion), il a logiquement choisi un thème qui le tenait à coeur : la mythologie gréco-romaine. Alea jacta est !

Par Frédéric Beigbeder

Frédéric Beigbeder: -Pourquoi avoir choisi comme thème la mythologie grecque et romaine ?

Karl Lagerfeld: -Parce que c’est ma religion favorite : un dieu pour chaque rayon. Je suis polythéiste, toutes les religions actuelles sont récentes, je préfère cette mythologie sans enfer, sans péché (ce frein au bonheur), sans pardon. Il faut revenir à une certaine beauté disciplinée de l’Antiquité. Simone Weil disait que Jésus descendait tout droit de Prométhée, ça a fait scandale à l’époque. J’adore les déesses car elles étaient les premières femmes libérées, qui avaient droit à tout. Les divinités et les muses sont féministes !

F.B: -De quand date ta fascination pour les mythes de l’Antiquité ?

K.L: -Les deux premiers livres que j’ai lus à 6 ans sont « L’Iliade » d’Homère et les Nibelungen. Bon, les contes germaniques m’ont effrayé, mais Homère m’a énormément influencé, il me fonde complètement. Ce qui est génial dans le paganisme antique, c’est que les dieux sont multiples, les âmes circulent, il y a des héros, des demi-dieux, des génies et des nymphes… Les humains étaient moins éloignés des dieux que dans les religions monothéistes. Je ne savais pas à l’époque que je deviendrais un dieu moi-même !! (rires)

F.B: -Oui, mais attention : les dieux ne sont que des mortels à peine améliorés ! (rires) Donc le but de ces photographies est de fonder une nouvelle religion ? Je tiens à dire après l’avoir feuilleté que ce calendrier m’a donné la foi en ton Olympe, me voilà converti, instantanément !

K.L: -Blague à part, ce qui est moderne dans la mythologie, c’est l’amour de la jeunesse, le culte du corps, le désir assumé, sans punition divine, et l’hommage permanent rendu à la Nature. Il y a une éthique de la beauté dans la civilisation gréco-romaine que nous avons perdue aujourd’hui.

F.B: -Avant d’être choisi par Pirelli pour cette édition 2011, connaissais-tu les calendriers Pirelli ?

K.L: -Oui surtout celui d’Avedon (1995) que j’avais beaucoup aimé. C’était cultivé mais pas juste cul ! Sexy, simple. Je suis aussi un fan de Sarah Moon, c’est la première qui a montré des seins en 72. Il émane d’elle une grande poésie.

F.B:-Qu’est-ce que Pirelli représente pour toi ?

K.L: -C’est un fabricant de pneus qui s’est bâti une réputation avec ces calendriers qu’on ne peut pas acheter, ce qui leur donne un mystère. C’était du marketing viral avant l’heure. Au départ ils l’ont fait pour les garagistes, pour les camionneurs ! Mais l’objet est vite devenu une référence artistique.

F.B: -Raconte-moi les trois jours de shooting. C’était où ?

K.L: -Dans mon studio à Paris, rue de Lille. J’ai choisi des amies pour poser, je ne voulais que des personnes qui soient très à l’aise avec moi. J’ai fait une liste de corps montrables, je refuse de déshabiller des gens qui ne sont pas d’accord ! Et il n’y a pas de mineures !!

F.B: -Pourquoi le fond noir ?

K.L: -Je trouve que ça met en valeur la nudité, le contraste souligne la beauté corporelle.

F.B:-Et pourquoi shooter en noir et blanc plutôt qu’en couleur ?

K.L: -C’était rafraîchissant, un peu de black and white, pour changer de mes illustres prédécesseurs, et puis après tout je suis noir et blanc dans la vie !

F.B:-Est-il exact que les modèles deviennent particulièrement « open-mind » lors des séances du calendrier Pirelli ?

K.L: -Mon studio est antiseptique, c’est très boulot-boulot. Il n’y a rien de louche qui traîne. Ce qui me plaisait dans les mythes grecs, c’est qu’ils n’ont pas besoin de s’exciter avec des bas résille et des froufrous, c’est charnel sans chichi. Les talons aiguilles et les porte-jarretelles, Helmut Newton a fait ça mieux que moi.

F.B: -Pourquoi Julianne Moore en Héra ?

K.L: -Je voulais absolument une actrice pour faire la femme de Zeus et la mère des dieux de l’Olympe. Julianne est une belle femme, plus matrone que les gamines sous les oliviers. C’est une amie très chère. Avec moi elle savait que c’était le risque zéro, qu’il n’y aurait pas une production parallèle à vendre sous le manteau !

F.B: -Ah bon, il n’y a pas de clichés secrets pour un usage privé ?

K.L: -Voyons Frédéric, ça ne rentre pas dans la mythologie. Regarde les statues antiques, elles ne sont jamais cochonnes, sauf à Pompéi mais c’était dans une maison close !

F.B: -Tu as spécialement créé des objets, bijoux, accessoires pour la séance de photos.

K.L: -Stéphane Lubrina et George Cortina ont réalisé les bracelets, les armes, les boucliers.

Peter Philips a collé des feuilles d’or sur les seins. Je ne voulais pas que ça fasse « farces et attrapes » ou déguisement de théâtre. Donc j’ai dessiné les colliers, les sexes d’or, les bracelets qui deviennent des écorces d’arbre, une chouette, un casque en plexiglas...

F.B: -Aurais-tu aimé vivre dans l’Antiquité ?

K.L: -L’immortalité avec un physique parfait, à qui ça déplairait ?!

Entretien réalisé le 15 octobre 2010 au domicile de Karl Lagerfeld, à Paris.

1964 Robert Freeman à Mallorque

1965 Brian Duffy au Sud de la France

1966 Peter Knapp à Al Hoceima, Maroc

1967 Non publié

1968 Harry Peccinotti en Tunisie

1969 Harry Peccinotti à Big Sur, Californie

1970 Francis Giacobetti à Paradise Island, Bahamas

1971 Francis Giacobetti en Jamaïque

1972 Sarah Moon à Villa Les Tilleuls, Paris

1973 Allen Jones à Londres

1974 Hans Feurer aux Seychelles

1975-1983 Non publié

1984 Uwe Ommer aux Bahamas

1985 Norman Parkinson à Edimbourg, Ecosse

1986 Bert Stern dans les Cotswolds, Angleterre

1987 Terence Donovan à Bath, Angleterre

1988 Barry Lategan à Londres

1989 Joyce Tennyson dans les Polaroid Studios, New York

1990 Arthur Elgort à Séville, Espagne

1991 Clive Arrowsmith en France

1992 Clive Arrowsmith à Almeria, Espagne

1993 John Claridge aux Seychelles

1994 Herb Ritts à Paradise Island, Bahamas

1995 Richard Avedon à New York

1996 Peter Lindberg à El Mirage, Californie

1997 Richard Avedon à New York

1998 Bruce Weber à Miami

1999 Herb Ritts à Los Angeles

2000 Annie Leibovitz à Rhinebeck, New York

2001 Mario Testino à Naples

2002 Peter Lindbergh à Los Angeles

2003 Bruce Weber dans le sud de l’Italie

2004 Nick Knight à Londres

2005 Patrick Demarchelier à Rio de Janeiro

2006 Mert and Marcus à Cap d’Antibes, France

2007 Inez and Vinoodh en Californie

2008 Patrick Demarchelier à Shanghai, Chine

2009 Peter Beard à Abu Camp/Jack’s Camp, Botswana

2010 Terry Richardson au Brésil

2011 Karl Lagerfeld à Paris