A la veille des premiers essais de la saison 2010 de Formule 1, le quotidien Lemonde s'est livré à un petit entretien avec Henri Pescarolo. Le vieux routard n'a toujours pas sa langue dans sa poche, et nous délivre une interview pleine de bon sens ! Il nous éclaire tout d'abord sur cette saison de F1 à venir, puis nous donne son point de vue sur le sport automobile en France. Voici quelques morceaux choisis.

Au sujet de la F1 cette saison, Henri Pescarolo nous avoue que:

"La course s'annonce très ouverte. Il semblerait cependant que Ferrari ait préparé la meilleure voiture. Techniquement, les Ferrari ont l'air un peu meilleures que les autres. McLaren aligne deux pilotes champions du monde, Button et Hamilton. Red Bull cache bien son jeu. Avec Adrian Newey, l'écurie possède l'un des meilleurs ingénieurs de la Formule 1.

Le pilote Sebastian Vettel, révélation de l'an passé, aura à cœur de confirmer. Enfin Mercedes, avec Ross Brawn et Michael Schumacher, peut aussi prétendre au titre, même si elle a été moins brillante dans les essais. Mais Brawn a l'habitude de cacher son potientiel."

Il n'est en revanche pas tendre avec les nouvelles écuries:

"L'arrivée d'écuries bidons comme Virgin, Hispania et à un degré moindre Lotus est néfaste. C'était une volonté de Mosley. Ces écuries ne sont même pas au niveau GP2 et ce n'est pas bon pour l'image. Pour être au niveau des quatre grands, cela nécessite des budgets colossaux.

Et pour rivaliser avec les outsiders comme Force India, Sauber ou encore Williams, l'investissement financier est également très important. La F1 doit rester l'épreuve phare que cela soit au niveau des pilotes et des écuries. Il faut faire le ménage, chacun doit faire ses preuves avant d'accéder à l'élite. Jean Todt s'entoure de gens compétents. On peut lui faire confiance."

Pour Pesca, l'interdiction du ravitaillement en essence est une bonne chose:

"On en revient à ce que j'ai toujours défendu. La Formule 1 n'est pas une course d'endurance. Les arrêts ravitaillement ne devraient pas exister. A la grande époque, les pilotes devaient, eux-mêmes, gérer du départ à l'arrivée leur essence et leur usure de pneus. Lorsque l'on doit attendre les arrêts aux stands pour doubler quelqu'un, ce n'est plus l'esprit de la F1.

Il y a aura encore les arrêts pneus. Ce n'est à mon sens pas judicieux mais l'évolution est tout de même positive. Ce changement de règlement aura également un impact technique immédiat : avec le plein d'essence, des problèmes intéressants à résoudre vont se faire jour en termes de réglages et de pilotage."

Il pense également que le changement à la tête de la FIA va être bénéfique:

"Max Mosley et toute sa bande, c'était malsain. La FIA ne gérait que la F1. Personne ne s'intéressait au reste du sport automobile. Aujourd'hui, on peut faire n'importe quoi dans notre sport. Il y autant de formules que d'organisations privées. Le sport automobile repose sur la pointe de sa pyramide.

Jean Todt a pratiqué le rallye, l'endurance et la F1. Il connaît la diversité du sport automobile. Il va réorganiser la Formule 1 sans négliger les autres disciplines."

Pour finir, voici son point de vue sur le sport auto et la relation ambiguë que la discipline entretient avec la France:

"La France a des pilotes largement au niveau de la Formule 1. L'argent manque clairement. Beaucoup de pilotes ont le potentiel pour atteindre cette élite et même devenir champion du monde. Mais en France, l'automobile est un gros mot.

Je suis bien placé pour le savoir avec mon team d'endurance. Lorsqu'on démarche les partenaires, on vous met dehors dès que l'on évoque le sport auto. La voiture est réduite à la mort et à la pollution. Ce constat est catastrophique pour l'industrie automobile française, le sport automobile français et les pilotes français."

Un constat on ne peut plus véridique ! Il n'est pas étonnant dans ces conditions que le retour de la F1 en France soit du domaine de l'utopique...