Quand l’électrique battait l’essence sur le marché US
Les électriques représententaient près de 40 % du parc roulant américain, contre moins de 30 % aux modèles à essence au début du 20e siècle. Puis, elles se sont écroulées commercialement. Mais comment cela a-t-il pu se produire ? Point de conspiration, les raisons sont bêtement pragmatiques….

Si elle est perçue aujourd’hui comme ultramoderne, la voiture électrique est pourtant tout aussi ancienne que celle utilisant des carburants fossiles. Dès 1891, aux Etats-Unis, la première voiture à batteries est commercialisée par William Morrison, et elle connaît son petit succès. Elle roule à 25 km/h et peut parcourir 80 km entre deux charges.
Dès 1897, une compagnie de taxi new-yorkaise se dote d’une flotte d’autos électriques, et en 1900, 38 % du marché automobile américain est constitué par ce type de modèles. Ce, alors que les engins à essence restent à 22 %. Fou, non ? En réalité, pas tant que ça. A l’époque, les véhicules motorisés, en général, ne s’adressent qu’aux riches particuliers et aux entreprises : le prix n’est donc pas si déterminant.

Ensuite, le réseau routier demeure archaïque en-dehors de villes, donc pas du tout adapté aux voitures, ce qui , pratiquement, interdit les longs voyages à leur bord. Elles ne servent donc qu’à parcourir de petites distances, en ville. Et là, face aux thermiques, les électriques font valoir non seulement le silence de fonctionnement, mais aussi leur propreté d’utilisation et leur absence de fumées.
En ce temps-là, utiliser une voiture à essence n’avait rien d’évident. Ces autos sont difficiles à faire démarrer (chauffage du moteur, manivelle dure à tourner et carrément dangeureuse), compliquées à manier car il faut changer de vitesses, une opération demandant une certaine dextérité, peu évidentes à régler et sales. L’huile gicle, l’essence fuit, bref, on se salit à coup sûr en les conduisant. De plus, elles tombent souvent en panne, et le carburant n’est pas très bien distribué. Comment ne pas préférer l’électrique ?

Les dames new-yorkaises, pour ne citer qu'elles, les apprécient beaucoup pour leur facilité et leur propreté, et elles peuvent les recharger chez elles. Les marques sont nombreuses : Baker, Detroit Electric, Frichtle, Oldsmobile, Studebaker… Même la femme d’Henry Ford préfère sa Detroit aux productions de son mari, qui envidage d’ailleurs de s’associer à Edison en 1912 pour fabriquer sa propre électrique. Seulement, en 1907, Ford révolutionne le marché avec sa Model T.

Fabriquée à la chaîne, elle casse les prix, coûtant initialement trois fois moins cher qu’une électrique équivalente (650 $ contre 1 750 $), puis beaucoup moins encore à mesure que les cadences de production augmentent (390 $ en 1915). D’abord destinée à remplacer les mules à la campagne, la Ford T envahit progressivement les villes, d’autant que sa boîte pour ainsi dire semi-automatique en facilite la conduite. Par ailleurs, elle est relativement fiable. Les électriques, de leur côté, évoluent insuffisamment, demeurant onéreuses, lourdes et pas assez rapides. Il leur a manqué un entrepreneur capable de les faire évoluer efficacement sur la durée, malgré quelques tentatives intéressantes.

Paradoxalement, c’est un moteur électrique qui assènera un coup fatal aux électriques : le démarreur ! Equipant une Cadillac dès 1912, il rend les thermiques bien plus faciles à utiliser, cependant que leurs performances progressent de façon exponentielle. Après la 1ere guerre mondiale, le réseau routier s’améliore, tout comme la distribution du carburant, et les distances parcourues par les automobiles à essence augmentent.
Faute d’évolution probante, les électriques ne peuvent pas suivre, et restent cantonnées à la clientèle aisée des grandes agglomérations. Déjà déclinantes à partir de 1914, les ventes accentuent leur chute dans les années 20, et en 1935, il n’y a pratiquement plus de constructeur de voitures individuelles électriques. En somme, celles-ci ont été pénalisée par leur prix colossal et leur manque d’autonomie, points sur lesquels elles demeurent, près de cent ans plus tard, devancées par les thermiques…Mais la GM EV1 et surtout, la réussite de Tesla contribueront à sortir les électriques de leur carcan.

Ceux qui ont suivi se demanderont quels sont les autres types de moteurs qui ont été compétition avant 1914 avec ceux brûlant de l’essence et ceux utilisant des batteries. On l’a oublié, mais la vapeur était très appréciée au début du 20e siècle, y compris sur les autos individuelles. Nous y reviendrons.
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