Dans le nord de l'Alberta (ouest du Canada), l'exploitation des sables bitumineux a un impact non négligeable sur l'environnement : hausse des émissions de gaz à effet de serre, détournements de rivières, forêts rasées. La facture risque de s'alourdir dans les semaines qui suivent. Sur la route des sables pétrolifères, des pelles mécaniques géantes avalent quotidiennement un sable noir opaque, gorgé de bitume. Le bitume est isolé et "upgradé" pour produire un pétrole dit synthétique destiné aux raffineries américaines, une série d'étapes qui rend très polluante l'exploitation de ces ressources non conventionnelles, estimées à 173 milliards de barils dans cette province.

Afin de séparer le bitume du sable, les groupes utilisent séparément ou ensemble de la vapeur et de l'eau chaude, puisée dans la rivière Athabasca, un fleuve de 1 200 km, soit 349 millions de m3 d'eau par an qui sont accordés à l'industrie. Simon Dyer, analyste à l'Institut Pembina, une organisation écologiste, explique : "Le niveau d'eau de la rivière a constamment baissé depuis les 30 dernières années, en raison de l'industrie des sables bitumineux mais aussi du changement climatique puisqu'elle prend sa source dans les glaciers de Jasper qui ne cessent de fondre." Les écologistes craignent l'assèchement progressif de cette rivière si la production pétrolière poursuit sa croissance. Et il faut prendre en compte les problèmes liés à la qualité de l'eau. Terry, un jeune autochtone habitant la réserve de Fort McKay qui est entourée de grands projets pétroliers, a souligné que certains pêchent encore dans la rivière mais plus personne ne mange le poisson. Un médecin albertain a constaté récemment des taux de cancer anormalement élevés sur la réserve indienne de Fort Chipewyan, située près du Lac Athabasca, une mer intérieure en aval de la rivière éponyme où se concentre la pollution produite par l'industrie pétrolière.

Pour le Canada qui n'a pas respecté ses objectifs de réduction de gaz à effet de serre établi dans le cadre du protocole de Kyoto (ses émissions ont bondi de plus de 25% depuis 1990 pour atteindre 747 mégatonnes), ce boom de l'industrie pétrolière est mal placé. Le gouvernement conservateur prévoit des réductions de 20% des émissions d'ici à 2020 pour l'industrie mais ces baisses se fondent sur "l'intensité", c'est-à-dire sur les émissions pour chaque baril produit, et non sur les émissions totales.

D'après les derniers chiffres du ministère de l'Environnement, les sables bitumineux génèrent 29 mégatonnes de GES chaque année. Et ces émissions vont augmenter : la production de pétrole dans les sables doit quadrupler à l'horizon 2020 pour atteindre quatre millions de barils par jour. Michael Borrell, président de Total Canada, a indiqué : "Si on regarde pour la compagnie pétrolière Total au Canada, c'est quasiment impossible de réduire nos émissions absolues. En passant de 2 000 barils par jour aujourd'hui à 250 000 dans dix ans, nos propres émissions vont augmenter".

Source : AFP