En exclusivité, Caradisiac a pu pénétrer sur le tournage de la déclinaison française de l'émission culte américaine Pimp My Ride.

Un Pimp My Ride français donc... Difficile d'évoquer cette idée sans esquisser une moue dubitative. A quoi ça peut ressembler ? Une usine à saucisses du vendredi, suintantes et fumantes, dirigée d'une main recouverte de bagues en or par un rappeur français singeant sans vergogne ses confrères d'outre-Atlantique ? Non, franchement, ça ne marchera jamais. Pas en France. Nous n'avons pas cette culture et l'image du tuning reste encore trop souvent associée à de l'aile recouverte de mastic et aux meetings sur les parkings de supermarché, pas aux customs et aux hotrods. Pourtant, quand l'occasion s'est présentée de se rendre sur le tournage de l'émission, la curiosité nous a tout de même poussé à y aller. Sûrement pour voir à quel point ça pouvait être mauvais. Et nous moquer.

Les règles dictées par MTV, la chaîne qui diffusera l'émission, sont simples mais strictes : pas de photo et on ne dévoile ni le nom du garage ni les modèles de voitures modifiées. Ce qui paraît logique : le tournage ne veut pas être perturbé par des hordes de curieux et il faut garder un minimum de surprise pour le spectateur qui découvrira le résultat chaque semaine à partir du 2 septembre à 17h30.

En franchissant la barrière de ce garage de la banlieue de Paris, rien ne laisse d'ailleurs imaginer ce qu'il s'y joue. Ce n'est qu'au fond de la cour, derrière les bâtiments, qu'on découvre une véritable fourmilière. Quarante personnes s'activent sur les cinq premiers projets, tous à différents stades de leurs transformations et qui seront ensuite suivis de cinq autres. Il y aura donc dix épisodes pour cette première saison, donc dix chanceux choisis par les plus de 2000 candidatures reçues lors du casting.

Pierre-Yves Gaudillat nous accueille. Producteur exécutif via sa société Colorada Production, c'est le réalisateur de l'émission, mais c'est aussi un nom connu dans les sports mécaniques, puisque ancien champion de quad et cascadeur à ses heures perdues. Et le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il n'est pas peu fier de son bébé et est intarissable sur le sujet.

« Ce qu'il faut retenir, c'est que ce n'est pas une émission de télé-réalité comme les autres, ici on ne fait pas semblant, il n'y a rien d'artificiel au niveau de notre envie de faire cette émission : nous aimons tous ça. On n'est pas dans un studio en Seine-Saint-Denis, on est dans un vrai garage. On forme tous une équipe, des mécaniciens aux caméramen, on travaille d'arrache-pied et on se serre les coudes pour terminer dans des délais quasiment impossibles à tenir. Autant dire que pour nous les journées de travail durent 24 heures et les semaines sept jours », ce qui est confirmé par la profondeur de ses cernes.

Une partie des idées préconçues tombe, en même temps que la mâchoire inférieure, à l'évocation de celui qui porte la casquette de « chefs des pimpers », celui qui a la lourde tâche d'être le pendant français de West Coast Custom, hôte historique de la version américaine dirigée par le charismatique Ryan Friedlinghaus. Il s'agit de Prorider. Dans le monde du tuning français, ou disons plutôt francophone, ce genre de garage est pratiquement inexistant, et les rares qui existent ne subsistent en général pas très longtemps. On note toutefois deux exceptions : Parotech et Prorider. Malheureusement, le premier se contente depuis quelques années d'équiper ses show cars de deux paires de jantes avant de les recouvrir d'une peinture mate. Le second est moins connu du grand public, mais aussi plus authentique, réservé aux connaisseurs. A sa tête, le très tatoué Gerry Blyenberg. Lui n'aime pas vraiment le tuning. Non, son truc, c'est le custom, de préférence avec comme base des américaines classiques. Pas difficile de reconnaître ses créations, il suffit par exemple de revenir sur les plus beaux projets de chaque édition du PTS, c'est à coup sûr son équipe et lui qui en sont à l'origine.

« Au début, il a refusé », nous confie Pierre-Yves, « puis il a fini par accepter après de longues discussions ». Gerry embraye : « ce que je voulais, c'était avoir la garantie d'avoir mon mot à dire sur les castings, et d'avoir le champ libre pour les modifications. Je ne veux pas faire du jacky, pas de kit large, ni de transformations exagérées. Certaines peintures sont voyantes, c'est vrai, mais on respecte les lignes d'origine, et l'esprit custom est omniprésent ». La question de la légalité vient très vite, la législation française étant bien plus stricte que l'américaine. « En France, difficile de modifier quoique ce soit sans dépasser les limites de la légalité : clairement, ce sont des show cars qui ne sont pas destinés à emmener leurs propriétaires tous les jours au boulot, mais nous avons préservé au mieux la sécurité, par exemple en laissant les airbags aux véhicules qui en étaient pourvus ou en ne rabaissant pas trop les voitures. »

Nous assistons au tournage d'une scène. Tout comme l'émission américaine, cinq personnes, chacune chargée d'un département des modifications, seront à l'écran. Ici, c'est Cutlaw, le spécialiste de la sellerie, qui s'affaire sur une banquette arrière avec dextérité dans la chaleur des projecteurs tout en décrivant face à la caméra ce qu’il fait. En deux prises, c'est dans la boîte. « Ce sont des artistes, ils ont des mains en or » nous dit Pierre-Yves. « Mais au début, ils n'étaient pas très à l'aise, ce n'est pas leur travail d'être filmé, mais on arrive à rompre la timidité au bout de sept ou huit prises. Et après quelques jours, ils deviennent très pros et savent exactement ce qu'ils doivent dire. »

A la place de Xzibit, c’est Ramzy qui a été choisi, comme nous le savons déjà. Pourquoi avoir opté pour un acteur comique et non un rappeur comme Booba ou M Pokora, bien connus pour leurs goûts pour l’automobile modifiée ? « Nous avons voulu respecter les codes de l’émission originale » nous répond Pierre-Yves. « Mais il ne s’agissait pas de faire une imitation aveugle. Les rappeurs américains ont été élevés dans le culte de l’entertainment, ce qui n’est pas le cas en France. Xzibit est bon dans la présentation de Pimp My Ride avant tout parce que c’est un showman, pas grâce à sa carrière musicale. Et Ramzy est un showman. Et puis on le sait peu, mais c’est un vrai fan de voitures, il s’y connaît vraiment. »

Alors que la nuit tombe, l’équipe termine de préparer l’une des voitures avant de la pousser dans la cabine de peinture. Cette journée a été très instructive. Arrivés sans enthousiasme, la découverte de chacun des rouages de cette émission et de ceux qui les font tourner a su nous faire changer d’avis. Pimp My Ride France a tous les ingrédients pour être une belle réussite. Espérons que le résultat final soit à la hauteur des efforts fournis pour la concevoir.