Les compagnies pétrolières, des puissances financières redoutables, considèrent les biocarburants comme un business florissant. D'après les scénarios de l'Agence internationale de l'énergie (AIE), "la multiplication de cinq à sept fois de la production mondiale de carburants verts attendue d'ici à 2030 devrait bouleverser l'économie des productions et des échanges agricoles et énergétiques mondiaux dans les dix à quinze prochaines années. La compétitivité de chaque filière (maïs, canne à sucre, colza etc.) et donc de chaque région du monde dépend à la fois de son rendement énergétique (qui doit être supérieur à l'énergie consommée pour produire, transporter), de ses coûts de production, de la capacité de ses acteurs à profiter - ou à se protéger - de la concurrence mondiale et du prix du pétrole."

Des récentes études de l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) ont souligné que les biocarburants actuels ne sont compétitifs, sans subventions, qu'au-delà de 80 dollars le baril de pétrole. Une étude de la Federal Reserve Bank of Kansas City, l'une des douze composantes de la Fed, la banque centrale américaine, met aussi en garde contre l'espoir démesuré des "farmers" du Middle-West. Au fur et à mesure que les distilleries grandissent et se multiplient, les investissements deviennent si lourds que leur propriété passe des mains des coopératives (100 % de la production en 1999) à celles des compagnies pétrolières, jusqu'à ne détenir que 10 % de la production en 2006. Les agriculteurs, même regroupés, ne sont pas non plus en mesure de supporter les fortes variations des cours de l'éthanol, liés à ceux du pétrole. Dans les zones agricoles, la concentration de la production pose aussi des problèmes de transport : l'éthanol ne passe pas dans les oléoducs, il faut l'acheminer par rail et par route jusqu'aux raffineries de pétrole. Celles-ci étant situées dans les ports, près des terminaux pétroliers, les majors du pétrole peuvent être tentées d'importer l'éthanol des pays du Sud, dont l'agriculture est plus compétitive. Vincent Gitz, chercheur au Centre international de recherche sur l'environnement et le développement (Cired), a déclaré que "toute la question est de savoir comment va se répartir la rente des biocarburants."

Le commerce de l'éthanol (plus facilement transportable que le biodiesel) est le sujet phare lors des négociations commerciales internationales : dans le cadre des Nations unies, les Etats-Unis, l'UE, le Brésil, la Chine, l'Inde et l'Afrique du Sud se sont penchés sur les biocarburants le 2 mars 2007. Les biocarburants ? L'or vert est en route.

Source : Le Monde