Hier soir, sur le plateau de l’émission télévisée « Face à la crise » où Nicolas Sarkozy faisait face aux questions des journalistes, l’automobile a tenu une bonne place dans les débats. Comme prévu, les annonces sont peu nombreuses, mais importantes, comme notamment la suppression de la taxe professionnelle, mais le président de la république a surtout distribué les bons et les mauvais points, en distinguant le bon élève Renault du cancre PSA à mots couverts.

"Je veux qu’on arrête les délocalisations et qu’on relocalise", telle est la phrase forte du Président de la République hier soir. Pour cela, il a annoncé que la taxe professionnelle serait supprimée en 2010, une mesure qui était le cheval de bataille de Carlos Ghosn, lors des Etats Généraux de l’Automobile. Nicolas Sarkozy a d’ailleurs cité mot pour mot l’exemple du PDG de Renault-Nissan, qui disait qu’il fallait compter 1000€ supplémentaires pour construire une voiture en France notamment à cause de la taxe professionnelle, car c’est "un impôt qui n’existe nulle part ailleurs en Europe".

Mais cette mesure, dont le coût en argent public est estimé à 8 milliards d’euros et qui a aussi pour but d’aider les constructeurs à investir dans les technologies propres, ne se fera pas sans contreparties en terme de "de délocalisation, de relocalisation, de licenciements, de politique de dividendes". Et celles-ci seront décidées le 18 février lors de la rencontre avec les partenaires sociaux, salariés comme syndicats. "Qu'on crée une usine Renault en Inde pour vendre des Renault aux Indiens est justifié, mais qu'on crée une usine en Tchéquie pour vendre des voitures en France, ce n'est pas justifié". La Tchéquie ? Une allusion à peine voilée à PSA, qui y produit ses Citroën C1 et Peugeot 107 dont les ventes, douce ironie, sont particulièrement stimulées par le système du bonus/malus. A la place de Tchéquie, Nicolas Sarkozy aurait aussi pu citer la Slovénie ou la Turquie, où Renault y assemble respectivement la Twingo et la Clio.

Un système dont s’est d’ailleurs particulièrement félicité le Président de la République hier, l’estimant responsable ex aequo avec la prime à la casse du maintien des ventes d’automobiles en France par rapport aux marchés étrangers.

Second volet délicat : les rémunérations des grands patrons, bête noire de Barack Obama. Après avoir contraint les dirigeants des banques à renoncer à leurs bonus, en sera-t’il de même pour les constructeurs automobiles ? "Je ne suis pas trop pour une règle générale" a répondu Nicolas Sarkozy. "Parce que l’intérêt de la France c’est d’avoir les meilleurs managers. Ce qui m’a choqué, c’est que des gens qui faisaient des erreurs considérables étaient récompensés de façon considérable. Mais s’ils gèrent bien leurs entreprises, s’ils découvrent de nouveaux process, s’ils font des inventions, s’ils font grossir leurs entreprises, il est normal qu’ils gagnent de l’argent. Et même beaucoup d’argent".

Pourtant, il déclarait quelques minutes avant que l’industrie automobile était "face à une crise d'une ampleur considérable qui n'est pas simplement due à ce que nous connaissons aujourd'hui, mais à une mauvaise gestion avant", en soulignant que, malgré la présence en France de deux des plus importants constructeurs, le pays était devenu "importateur de véhicules", citant même les chiffres de production passés de 3,2 millions de véhicules en 2004 à 2,1 millions en 2007. Cette prise de position va aussi à l'encontre des déclarations de Christine Lagarde, ministre de l'Economie, pendant les Etats Généraux de l'Automobile, et Carlos Ghosn lui-même qui ne s'y était pas montré hostile.

Prochaine étape : les entretiens avec les partenaires sociaux le 18 février. Si Luc Chatel ne dévoile pas d’ici là la totalité de son très attendu plan pour l’automobile.