Lundi, le secrétariat d'Etat chargé des Transports a confirmé la constitution d'un comité de pilotage dont la mission est de réfléchir aux conditions de mise en place d'une expérimentation mesurant l'impact de l'utilisation des camions géants dans notre pays. Une annonce entourée d'une multitude précautions qui a pourtant suffit à mettre les Verts dans le rouge.

Un "méga-camion" est un ensemble constitué d'un camion "porteur" et d'une remorque traditionnelle. Long de 25.25m contre seulement 19m pour un semi-remorque classique, ces engins de 60 tonnes permettent évidemment de transporter plus de marchandises en un voyage et de ce fait, devrait permettre de réduire théoriquement le nombre de poids-lourds sur les routes et de diminuer les émissions polluantes globales du transport routier. Sur le papier, il y a donc un intérêt à étudier l'autorisation de circulation de ces camions géants, c'est ce que fait le gouvernement.

Réaction épidermique et idéologique

Mais cette simple annonce d'une réflexion sur le sujet a suffi à faire réagir France Nature Environnement, une fédération associée aux discussions regroupant 3000 associations écologistes, qui se mobilise et pointe du doigt la dangerosité de ces engins. En s'appuyant sur un sondage CSA révélant que 81% des français refusent les méga-camions sur nos routes et que 79% des personnes interrogées affirment qu'elles seraient inquiètes en termes de sécurité de circulation si ces camions déboulaient sur nos autoroutes, la FNE demande l'arrêt immédiat du gaspillage des investissements publics sur des sujets inutiles et lance une pétition nationale.

En cherchant à effrayer avant d'expliquer, la FNE érige ce système de transport comme une monstruosité dévastatrice qui mettrait notre vie en jeu : "les poids lourds actuels sont déjà responsables de 2 fois plus de décès que les voitures. Qu’il s’agisse des conditions de dépassement, de freinage, de manœuvre dans les carrefours étroits, tout indique que ces méga-camions sont encore plus dangereux que les camions qui circulent actuellement. "

Pourtant ces méga-camions roulent déjà en Hollande et en Suède, qui reste un des pays les plus sûrs en matière de sécurité routière. Alors cette peur des méga-camions véhiculée et amplifiée par une fédération écologiste est-elle justifiée ?

La FNE affirmait également que l'expérimentation grandeur nature aurait probablement lieu sur un axe de 1000 kms entre Nantes et Strasbourg, ce qui a été démenti par le ministère des Transports qui a aussi exprimé ses doutes sur les avantages apportés par ces camions. Le Ministère réclame toutefois l'avis d'experts pour se décider.

Le scandale est ailleurs

Au lieu d'orchestrer la peur de ces camions, il faudrait plutôt s'élever une nouvelle fois contre l'incapacité des pouvoirs publics à organiser le ferroutage. Des transporteurs étranglés par le prix du carburant et les difficultés toujours plus grandes de circulation aimeraient pouvoir mettre leurs camions sur des trains mais personne n'est capable de leur garantir des délais sûrs et constants et l'absence de grèves extraordinairement pénalisantes dans un marché aussi concurrentiel. C'est bien ce point là qu'il faut soulever plutôt que l'idée de ces méga-camions qui, sans être plus dangereux, ne sont de toutes façons pas la panacée. Hors de l'autoroute et des zones industrielles, ils seront forcément inadaptés et "destructeurs d'infrastructures routières, plus lourds et pas forcément mieux motorisés, ils consommeront et pollueront plus tandis qu'en ces temps de tensions sociales et de hausse du chômage, il serait malvenu de donner la possibilité aux entreprises de transports, traditionnellement génératrices d'emplois, de réduire leurs effectifs. En effet, 2 camions géants valant 3 semi-remorques, c'est forcément 1 chauffeur de moins pour le même volume transporté.

Le méga-camion n'est pas un monstre dont il faut s'inquiéter, ce n'est simplement pas la bonne solution.