Le site quelleautomobile.fr m'apprend que ma voiture me coûte 3 300 € par an. En moyenne. Tant mieux, je croyais que c'était plus : 7 991 € -notez la précision- selon l'Automobile club association. En fait, je m'en tamponne. Comme de savoir qu'un homme a 120 000 cheveux sur la tête "en moyenne". En comptant les chauves ? Ces chiffres ne veulent rien dire. Et surtout, il y a ce qu'ils ne peuvent pas dire.


Par exemple, que depuis 10 ou 15 ans, les caprices des designers nous ont plus troué le portefeuille que l'Opep, la fiscalité des carburants et les compagnies pétrolières réunies. Je parle de l'inflation de la taille des roues. Comparez le tarif d'un pneu 185/60 R15 et celui d'un 205/55 R17, multipliez par quatre et vous vérifierez que la mode de la grande roue vaut largement 15 centimes de plus à la pompe. Michelin plus fort que Total…

Ces chiffres ne révèlent pas non plus qu'à cause de sa fragile sophistication, un diesel moderne revient désormais souvent plus cher à l'usage qu'un V6 essence. Sauf que d'un côté on a un coût d'emmerdement et de l'autre le prix de l'agrément. Ni que pour un particulier qui achète une voiture neuve, il y en a cinq ou six qui optent pour l'occasion, ce qui invalide d'emblée toute considération sur le prix d'achat et la décote.

Bref, 3 300 ou 7 991 euros par an et pourquoi pas la moitié ou le double, ça me chatouille une oreille sans faire bouger l'autre. Le conducteur moyen qu'ils disent… Il doit vraiment être très moyen s'il ne sait pas combien lui revient son parking, ce que l'entretien lui coûte, s'il ignore que le carburant n'est plus donné, que le péage n'a pas baissé ? Et que lui chaut le montant moyen d'une prime d'assurance et son pourcentage d'augmentation s'il s'est pris 10 % de malus ? Quelle conclusion doit-il tirer de ces chiffres pas ronds ? Qu'il devrait moins prendre l'autoroute, laisser sa voiture garée au Leclerc, délocaliser sa révision à Bucarest, s'assurer à Thiers, faire le plein à Bakou ? Que l'on cesse d'essayer de nous faire chougner. Marre de ces comptes d'apothicaire et de ces pleurnicheries frappées au coin du bon vieil "automobiliste vache à lait" perfusé par une "pompe à fric" selon le vocabulaire en vigueur depuis l'après-guerre.

Une voiture, c'est cher, OK. Et pas de voiture, c'est combien ? Demandez à ceux qui lâchent le volant, trop vieux, trop malades ou plus de permis. Pourquoi toujours parler de ce que ça coûte et jamais de ce que cela nous apporte ? Essayez d'imaginer un pays sans voitures, sa sociologie, sa géographie, son économie, sa culture... Une société où tout le monde prendrait le train, grimperait dans le bus, descendrait dans le métro ou prendrait son vélo. Cette société a existé, c'était la Chine de Mao et ça ne ressemblait pas au paradis sur terre. Une voiture n'est pas un centre de coût, mais d'abord une machine à aller voir ailleurs où on veut, qui on veut et quand on veut. Cela a un prix, mais ce que ça coûte, chacun s'en débrouille selon ses besoins, ses envies, ses possibilités et sa jugeote.